Dans l’atelier de… Éliane Excoffier

Révéler l’intimité du mont Pinacle

Trois projets d’art public en deux ans, une exposition inédite à Frelighsburg, une participation aux Rencontres internationales de la photographie en Gaspésie : la photographe Éliane Excoffier a le vent dans les voiles. Nous l’avons rencontrée dans son atelier de Sutton et sur le mont Pinacle dont elle a dévoilé quelques secrets…

Le virage de Sutton

Après des années passées à explorer le corps, la sensualité et les rituels féminins, Éliane Excoffier a pris un virage en 2015, quand elle est venue vivre à Sutton. Elle a alors pointé ses objectifs sur la nature et les animaux, comme l’ont montré ses séries Fables (2015), Nightlife (2018) et Mille lieues (2021). La signature Excoffier est toutefois demeurée la même. Empreinte d’intuition, d’un attachement profond à la photographie traditionnelle et d’un style de mise en scène qui rappelle les natures mortes de la grande peinture flamande.

Passionnée d’histoire de l’art, étudiée à l’Université de Montréal dans les années 1990, Éliane Excoffier est une « bibitte » spéciale ! « Je ne me suis jamais insérée dans les courants de la photographie, dit-elle. Quand le monde faisait des grands formats en couleurs, je restais dans les petites photos noir et blanc. Je me suis souvent sentie un peu à part ! »

Faisant profil bas, elle est toutefois collectionnée par des amateurs, des entreprises et des musées. « J’ai toujours eu mon propre marché, dit l’artiste représentée par Simon Blais. Mais je préfère que mon travail soit exposé et que je reste derrière l’appareil photo. » Fascinée par Gabor Szilasi, elle sent une familiarité avec le travail de Yan Giguère, Alain Lefort, Marie-Jeanne Musiol, Janie Julien-Fort ou encore Michel Lamothe. Et apprécie les démarches de ses collègues Serge Clément, Geneviève Cadieux, Evergon, Michel Campeau, Bertrand Carrière, Normand Rajotte, Angela Grauerholz, Nicolas Baier ou encore Raymonde April.

Frelighsburg

Cet été, avec le soutien du centre Adélard de Frelighsburg, elle présente Nightlife sur le mont Pinacle. Des photographies qui découlent d’une expérience originale. Elle a fixé, sur des arbres du mont Pinacle, 11 caméras infrarouges pourvues de détecteurs de mouvement, qui ont fonctionné jour et nuit, d’avril 2021 à avril 2022. Elle a obtenu quelque 11 000 photos et vidéos d’animaux passant devant les caméras : cerfs, ours, castor, pécan, porcs-épics, coyotes, ratons laveurs, grands hérons, chouette, renards, etc. Une expérience qui a révélé la grande diversité animale de cette forêt. « C’est un des plus beaux projets sur lesquels j’ai travaillé », dit l’artiste née à Saint-Jérôme en 1971.

Cinq grandes photos et une vidéo du corpus sont présentées dans le village. Onze autres ont été intégrées au paysage, le long d’un sentier du mont Pinacle, un endroit que d’ordinaire on ne peut visiter, car il est géré, avec vigilance, par la Fiducie foncière du mont Pinacle. Le parcours photographique (une boucle d’environ 30 minutes) est proposé jusqu’au 9 octobre, les samedis et dimanches, de 12 h à 16 h.

L’atelier

Quand elle n’est pas en pleine nature, Éliane Excoffier est dans sa chambre noire. Elle y réalise ses essais à l’argentique, notamment après avoir utilisé son cher appareil photo 4 x 5. Elle travaille aussi en numérique, mais préfère le côté artisanal et expérimental de l’argentique. « J’aime ça quand je ferme la porte, que je me retrouve dans le noir, comme dans une bulle, coupée du monde, coupée du temps. Pour le mont Pinacle, j’ai dû travailler avec le numérique. L’argentique est trop fragile et convient pour des projets plus confidentiels. »

Éliane Excoffier participe aussi cet été aux Rencontres internationales de la photographie en Gaspésie. Elle expose des œuvres à Percé, tout comme sa bonne amie l’artiste Sophie Jodoin.

Art public

Éliane Excoffier a dû se diversifier durant la pandémie. Touchant pour la première fois à l’art public, elle a gagné trois concours en deux ans ! Elle a installé deux photographies à l’école secondaire Fadette, à Saint-Hyacinthe, en mai dernier. Et a décroché deux contrats pour deux maisons d’aînés. « À Châteauguay, je vais livrer cet automne 10 photos de paysages pour les murs des salles à manger, et à Longueuil, dans le hall d’entrée de la maison, il y aura une vue forestière, un gros plan sur une fougère et la photo d’une fleur délicate. »

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