JFK, Trudeau et Biden

« La géographie a fait de nous des voisins. L’histoire a fait de nous des amis. L’économie a fait de nous des partenaires. Et la nécessité a fait de nous des alliés... Ce qui nous lie est de loin supérieur à ce qui nous divise. » Ces mots sont ceux du président américain John F. Kennedy et ils ont été prononcés lors du discours qu’il a tenu au parlement canadien le 17 mai 1961. Les paroles de Kennedy, qui sont depuis inscrites à l’entrée de l’ambassade des États-Unis à Ottawa, demeurent toujours pertinentes aujourd’hui.

Certes, les relations canado-américaines n’ont pas toujours été au beau fixe, mais la réalité décrite par Kennedy dicte l’importance d’y travailler constamment. La visite de l’actuel président des États-Unis, Joe Biden, les 23 et 24 mars, s’inscrit d’ailleurs dans cette mouvance.

En février 2021, Biden et le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, ont tenu un sommet virtuel sur le thème « Feuille de route pour un partenariat États-Unis–Canada renouvelé ». Celui-ci mettait l’accent sur les relations économiques, sur les actions pour lutter contre les changements climatiques et sur la façon de poursuivre la coopération multilatérale à l’international.

Dans quelques jours, le président des États-Unis prendra la parole au parlement canadien. Contrairement à la relation conflictuelle qui régnait avec l’ancien président Donald Trump, on peut s’attendre à un climat de bonne entente et de coopération.

Le contexte

Il faut signaler que les relations entre les deux pays sont étroites. Les États-Unis sont notre plus grand partenaire économique avec environ 400 000 Canadiens qui traversent la frontière quotidiennement. Puis, pour 35 États américains, le Canada représente le premier marché d’exportation. Bref, il s’agit d’une relation d’échanges commerciaux étroits et d’activités économiques fortement intégrées.

En 2020, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont signé une nouvelle entente de libre-échange (ACEUM), qui remplaçait l’ALENA de 1994. Les dispositions de l’ACEUM ont changé certaines règles de base concernant l’encadrement des produits, la gestion de l’offre dans le secteur laitier ainsi que les procédures de suivi et d’application de l’entente. Dans l’ensemble, le Canada s’en est bien sorti malgré les menaces et les propos du président Trump lors de la renégociation.

Aujourd’hui, l’administration Biden coopère, mais tient un discours protectionniste qui suscite l’inquiétude, et les litiges traditionnels comme le bois d’œuvre, la gestion de l’offre et l’accès aux marchés manufacturiers restent toujours de la partie.

Depuis l’accession de Biden au pouvoir en 2021, l’impact et la gestion de la pandémie de COVID-19, la guerre en Ukraine et les tensions avec la Chine ont dominé les manchettes. Sans doute, la coopération entre le Canada et les États-Unis fait partie de la donne, et rien n’indique que cela va diminuer.

Les économies des deux pays performent bien sur les plans de l’emploi et de la croissance, mais subissent le plus haut taux d’inflation en 50 ans. Bien sûr, l’inflation est observable partout dans le monde, tout comme les problèmes relatifs aux chaînes d’approvisionnement.

À quoi s’attendre

On peut prévoir que les discussions vont prioriser des questions reliées à la sécurité et à la défense, aux menaces à la démocratie, aux actions à prendre relativement aux changements climatiques, à la stabilité du système bancaire et à la coopération en matière économique dans le contexte du « Buy America » de Joe Biden.

D’autres sujets seront assurément abordés. Les questions reliées à l’Arctique, face aux actions de la Russie et de la Chine, seront au premier plan. Les rôles de l’OTAN et celui du NORAD seront déterminants.

L’accès aux minéraux critiques devient de plus en plus un enjeu essentiel pour les Américains dans le domaine de la technologie, alors que le Canada est en bonne position à titre de source d’approvisionnement. Trudeau et Biden ont donc tout intérêt à donner des signaux positifs à ce sujet.

L’immigration sera aussi de la partie. Plusieurs au Canada, et en particulier au Québec, anticipent des actions concernant le chemin Roxham et le statut de l’Accord des tiers pays sûrs. Cependant, il ne faut pas oublier que Biden a un problème plus sérieux à la frontière Sud des États-Unis. Reste à voir s’il fera démonstration d’autant de préoccupation pour celle du Nord, qui est la frontière terrestre la plus étendue sur la planète.

Il risque également d’être question de la crise des opioïdes et des problèmes de trafic de drogue vécus dans les deux pays. Aussi, la question de la crise en Haïti qui perdure sera certainement discutée, et on peut s’attendre à ce que Biden souhaite un rôle accru de la part du Canada compte tenu de la présence d’une importante diaspora haïtienne au pays.

Peu importe les résultats, il est certain qu’on peut prédire que les images et les paroles entourant le sommet Trudeau-Biden seront encourageantes car les deux dirigeants se connaissent bien.

Chose sûre, chaque leader va défendre les intérêts de son pays respectif, et particulièrement dans l’esprit des mots de JFK.

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