Mon clin d’œil

« Nous pouvons nous occuper de distribuer les données de la RAMQ aux pharmaceutiques. »

— Desjardins

Opinion : Proposition de Frédéric Bastien

Poussons cette logique tordue un peu plus loin

Frédéric Bastien, actuellement candidat à la direction du Parti québécois (PQ), a récemment proposé de ne plus permettre aux diplômés de la faculté de droit de l’Université McGill de devenir membres du Barreau du Québec parce qu’ils ne reçoivent pas une formation suffisante en droit civil*. En tant que récent diplômé de la faculté (2018) et membre du Barreau depuis 2019, je ne pourrais être plus d’accord.

Après tout, l’influence pernicieuse de McGill sur le droit civil dans cette province est bien connue et trop lamentable, y compris le fait que 10 diplômés sont devenus juges de la Cour suprême représentant le Québec, que le premier Code civil de cette province (le Code civil du Bas-Canada) a été dirigé par un ancien chancelier de la faculté, ou que le Code civil du Québec plus récent a été dirigé par un ancien professeur de la faculté, qu’au moins cinq juges actuels de la Cour d’appel ont étudié le droit à McGill. Il est franchement étonnant que ce groupe de personnes qui ne connaissent rien au droit civil ait pu arriver aussi loin.

Manifestement, la menace des anciens des établissements d’enseignement supérieur de langue anglaise aux postes de pouvoir au Québec est trop grande.

C’est pourquoi je propose la règle suivante : aucun diplômé ou enseignant d’une université ou cégep non francophone ne devrait pouvoir solliciter la direction du Parti québécois.

Ce serait un coup dur pour M. Bastien, qui, bien sûr, enseigne l’histoire au Collège Dawson, le cégep de langue étrangère le plus célèbre de Montréal. Mais je suis sûr qu’il serait d’accord – si les diplômés en droit de l’Université McGill, en vertu de leur alma mater, ne peuvent se voir confier notre droit civil, ce serait de la folie de laisser un professeur de Dawson, entouré de jeunes envahisseurs anglophones, se voir confier la direction du PQ. Si un diplômé de McGill ne peut pas comprendre le droit civil, comment un professeur d’histoire dans un cégep anglophone pourrait-il comprendre suffisamment la culture et l’histoire du Québec pour prendre la tête du défenseur traditionnel de (certaines) valeurs au Québec ?

Boisclair, Parizeau...

J’espère que M. Bastien lira ceci et acceptera de se retirer immédiatement. Il serait bien sûr rejoint par son collègue Paul St-Pierre Plamondon (McGill, 2006), par (rétroactivement, bien sûr) André Boisclair (diplômé de Harvard en 2005 et ancien professeur à Concordia), et par un envahisseur anglophone encore plus notoire, Jacques Parizeau (diplômé de la London School of Economics), sans compter les nombreux députés et membres du PQ qui ont malencontreusement étudié dans une université historiquement anglophone.

Cette mesure peut sembler radicale, mais quand on y pense, contrairement à la direction du PQ, le droit civil dispose au moins d’un assez bon mécanisme pour filtrer les menaces : l’examen du Barreau, que tout membre du Barreau doit bien sûr passer. Malheureusement, il n’a pas réussi à m’empêcher de passer (l’examen de compétence en français de l’OQLF non plus). En plus, selon les plus récentes statistiques du Barreau, les diplômés de McGill ont moins bien réussi l’examen du Barreau que les diplômés de l’Université de Montréal et de l’Université de Sherbrooke, mais mieux que ceux de l’Université Laval, de l’UQAM et de l’Université d’Ottawa. Si les diplômés de ces trois dernières écoles ne peuvent pas obtenir de meilleurs résultats que les étrangers de McGill à l’examen du Barreau, je parie que M. Bastien serait d’accord pour dire qu’ils ne peuvent pas non plus devenir membres du Barreau.

Si ce qui précède est inacceptable pour M. Bastien, je proposerais une position de compromis : étant donné la menace qui pèse sur le droit civil dans cette province, tout candidat à la direction du PQ, qui pourrait (au moins théoriquement) un jour être premier ministre, devrait devoir passer et réussir le même examen du Barreau que j’ai réussi en 2018. Je lui proposerais même d’être son tuteur.

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