Omer St-Onges dans Utei

Paroles d’un survivant

Omer St-Onges n’est pas comédien ni dramaturge ; il a été pêcheur en haute mer pendant près de 20 ans. Mais d’abord et avant tout, cet Innu natif de Maliotenam est un survivant qui a choisi de faire partager de grands pans de sa vie – y compris son douloureux passage au pensionnat religieux – dans une pièce de théâtre intitulée Utei (cœur en innu) et présentée au Studio Hydro-Québec du Monument-National.

Omer St-Onges n’avait que 6 ans lorsqu’il a été séparé de sa famille pour aller vivre pendant un an dans un pensionnat avec son frère jumeau. « Mes parents ne parlaient que l’innu. Au pensionnat, on me parlait en français, une langue que je ne comprenais pas. On m’interdisait même de communiquer avec mon frère en innu. J’étais perdu. Et je haïssais mon père et ma mère de nous avoir abandonnés. »

Aujourd’hui âgé de 60 ans, ce père de quatre enfants tient à ce que son histoire ne disparaisse pas avec lui. Il veut raconter les ombres de son existence, mais aussi son enfance dans le bois, avec comme trame sonore les chants de sa mère sous la tente et les légendes que racontait son père le soir venu. « Depuis longtemps, je veux faire entendre nos histoires vécues, dit-il. On a eu des moments durs : l’alcool, les drogues, le suicide. J’avais 12 ans lorsque ma première amie proche s’est suicidée ; on allait à l’école ensemble… Mais il y a du beau aussi. Comme quand j’étais petit et que mon frère et moi, on jouait avec les raquettes de notre père. On pensait que la vie allait être belle… »

Témoignage essentiel

Omer St-Onges insiste : avec Utei, il veut notamment raconter les souffrances – les siennes et celles de son peuple –, mais pas culpabiliser qui que ce soit. « Les gens ne doivent pas se sentir coupables de l’histoire du Canada », lance celui qui dit porter encore plusieurs séquelles de son passage au pensionnat. « Encore aujourd’hui, je suis incapable de rentrer dans des toilettes publiques s’il y a quelqu’un. C’est là que les religieux nous attendaient pour nous poigner… » L’homme a aussi connu des problèmes de consommation qu’il a aujourd’hui réussi à surmonter.

Le metteur en scène et cofondateur de la compagnie théâtrale Menuentakuan, Xavier Huard, a prêté main-forte à Omer St-Onges pour porter sa parole sur scène. « La pièce s’est créée à travers un long processus de discussion, raconte le metteur en scène. C’est une belle occasion pour le public de rentrer en contact avec cette partie-là de notre histoire. Surtout qu’Omer la raconte de façon bienveillante. Lorsque les gens de cette génération nous auront quittés, il n’y aura plus personne pour témoigner de tout cela. »

Seul sur scène, Omer St-Onges va donc porter sur ses épaules tout le poids de cette parole essentielle, mais terriblement difficile à livrer. Pour y arriver, il va, dit-il, penser à tous ses amis « qui n’ont pas pu s’en sortir » et n’ont pas, comme lui, la chance de pouvoir témoigner de ce qui leur est arrivé.

« Utei raconte comment on vit les traumatismes, mais parle aussi beaucoup de la guérison et de la façon dont on peut passer par-dessus tout ça. »

— Omer St-Onges

La parole, il le sait, peut aider la guérison. Lors des audiences de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, il travaillait comme guide spirituel pour les Autochtones qui venaient témoigner des séquelles laissées par leur passage dans les pensionnats. « Je les aidais pour qu’ils sortent allégés de leur témoignage… »

Et c’est aussi pour terminer son spectacle sur une note plus légère qu’Omer St-Onges invite tous ceux qui y assisteront à partager le thé avec lui au terme de la représentation. « Pour dire merci aux gens d’avoir pris le temps de m’écouter. »

Utei : récit d’un survivant est présentée du 3 au 6 mars au Studio Hydro-Québec du Monument-National.

Run de lait

La popularité du théâtre documentaire ne se dément pas. Pour sa pièce Run de lait, Justin Laramée a entrepris, en 2016, une démarche théâtrale qu’on compare au spectacle J’aime Hydro, de Christine Beaulieu. Run de lait met en lumière la détresse psychologique chez les producteurs laitiers au Québec. Dans les 20 dernières années, la province aurait perdu la moitié de ses fermes laitières ! Pourtant, « l’industrie du lait, c’est notre territoire, c’est nous », estime le créateur. « Connaissons-nous vraiment la réalité des producteurs laitiers du Québec ? » L’auteur, cometteur en scène et interprète de la pièce espère que son spectacle transformera chaque spectateur qui y assistera. Au Trident, du 1er au 26 mars. — Luc Boulanger, La Presse

Les muses orphelines

Grand classique du répertoire dramatique québécois, voire mondial, Les muses orphelines, de Michel Marc Bouchard, fait l’objet d’une nouvelle production à Québec, sous la direction d’Amélie Bergeron, avec entre autres Ariel Charest, comédienne et reine du lipsync sur le web. « Des orphelins se sont élevés seuls et sont laissés-pour-compte dans un village isolé. Ce sont les marginaux de la savane que Michel Marc Bouchard, avec l’esprit et la plume qu’on lui connaît, apprend à nous faire aimer, en faisant d’eux une image du Québec qui traverse le temps », peut-on lire en résumé sur le site du théâtre. À La Bordée, jusqu’au 19 mars.

— Luc Boulanger, La Presse

Notre petite mort

Avec Notre petite mort, Émilie Lajoie suscite une réflexion sur la maternité et le deuil de l’enfantement. L’infertilité étant un sujet rarement abordé sur nos scènes au Québec. La pièce offre un doux regard sur ce deuil tabou, celui de ne pas arriver à donner la vie, celui d’un enfant qui n’existera pas. Avec ce premier texte, l’autrice remet aussi en question la maternité comme étant le point culminant de l’accomplissement de la femme dans notre société. Avec humour et humanité. Sophie Cadieux dirige Émilie Lajoie, Simon Rousseau et Sylvie Potvin dans cette création intimiste, à l’affiche dans la Salle intime du Théâtre Prospero à Montréal, du 1er au 19 mars.

— Luc Boulanger, La Presse

Nous nous sommes tant aimés

Nous nous sommes tant aimés, de Simon Boulerice, a été créée l’été dernier à Boisbriand. Cette comédie tire son titre du film d’Ettore Scola, sorti en 1974. Elle pose un regard doux-amer sur l’amitié, « celle qui perdure et celle qui se casse », à travers les années, de 1990 à nos jours. Sous la direction de Charles Dauphinais, les interprètes Marie-Hélène Thibault, Louise Cardinal, Luc Bourgeois, Sébastien Gauthier et Mélanie St-Laurent reprennent du service ces jours-ci au Petit Théâtre du Nord. Du 24 février au 12 mars.

— Luc Boulanger, La Presse

Les trois sœurs

Après sa relance au TNM jusqu’au 5 mars, la pièce Les trois sœurs, le chef-d’œuvre de Tchekhov, partira en tournée à travers le Québec. Ce spectacle mis en scène par René Richard Cyr avait dû brusquement annuler ses représentations, en mars 2020, lors de la première vague du coronavirus. Du 9 mars au 4 avril, entre autres à Drummondville, Québec, Gatineau, Sherbrooke, Saguenay et Rimouski.

— Luc Boulanger, La Presse

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