TRÊVE à l’HORIZON

Le Washington Post a rapporté samedi soir qu’un accord provisoire était sur le point d’intervenir entre Israël, le Hamas et Washington : la libération d’otages par le mouvement palestinien en échange d’une pause dans les hostilités. Le tout, tandis que la bande de Gaza comptait une fois de plus ses morts.

Israël et le Hamas en guerre

« Le carnage doit cesser »

Peu avant que se profile la possibilité d’une trêve dans le conflit, la directrice générale d’UNICEF a décrit des « images horribles »

Ce qu’il faut savoir

Un accord visant à libérer des otages en échange d’une pause de cinq jours des combats pourrait intervenir prochainement.

Un camp de réfugiés a été la cible de frappes israéliennes, samedi, faisant au moins 80 morts, selon le Hamas.

Assiégé par l’armée israélienne, l’hôpital al-Chifa doit être évacué tandis que de nouvelles frappes meurtrières dans le sud de Gaza font craindre une intensification des combats.

Israël, les États-Unis et le Hamas sont sur le point de conclure un accord visant à libérer des dizaines d’otages en échange d’une pause de cinq jours des combats dans la bande de Gaza, selon des informations obtenues par le Washington Post, alors que des frappes israéliennes sur un camp de réfugiés ont fait 80 morts samedi, selon les autorités de Gaza.

Le quotidien américain avait dans un premier temps affirmé que cet accord avait été conclu – une information aussitôt démentie par une porte-parole de la National Security Agency sur X. Plus tard en soirée, un officiel ayant requis l’anonymat a affirmé que des « progrès ont été accomplis, mais que la situation reste volatile ».

Selon les termes du projet d’accord détaillé de six pages, toutes les parties du conflit devraient cesser les combats pendant au moins cinq jours, permettant la libération d’une cinquantaine d’otages dans les prochains jours, a rapporté en fin de soirée samedi le quotidien américain, citant des sources au fait du dossier.

En mettant sur pause les hostilités, l’accord cité par le Washington Post permettrait d’acheminer une aide humanitaire conséquente dans la bande de Gaza, où une famine généralisée et la grave pénurie d’eau potable guettent la population.

Les grandes lignes de l’accord souhaité ont été élaborées au cours de semaines de négociations au Qatar, entre Israël, les États-Unis et le Hamas, indirectement représenté par des médiateurs qataris, toujours selon le quotidien de référence.

Tard samedi, l’ambassade d’Israël à Washington a fait savoir par l’entremise d’un porte-parole qu’elle n’émettrait aucun commentaire sur la situation des otages.

Le nombre croissant de victimes civiles palestiniennes – 12 000 morts, selon le plus récent bilan du Hamas – n’ont cessé d’accentuer la pression sur le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, qui s’est montré inflexible depuis le début du conflit malgré les nombreux appels de dirigeants à un cessez-le-feu.

C’est qu’il doit aussi faire face à la pression de la population israélienne, qui exige la libération des otages.

Samedi, des milliers de proches de personnes enlevées par le Hamas ont conclu une marche de cinq jours entre Tel-Aviv et Jérusalem dans le but de maintenir la pression sur leur gouvernement.

Plus d’une centaine de pays, excluant les États-Unis et le Canada, ont appelé à un cessez-le-feu total et immédiat dans les dernières semaines. Le président de la République française, Emmanuel Macron, avait récemment durci le ton face à l’État israélien, qu’il a accusé « de tuer des civils à Gaza ».

Frappes sur un camp de réfugiés

Si un accord devait être conclu, il s’agirait de la première pause durable des combats dans l’enclave assiégée, où des frappes israéliennes sur le camp de réfugiés de Jabaliya ont fait 80 morts, dont plus de la moitié se trouvaient dans une école, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien.

« Le carnage doit cesser. La souffrance doit cesser », a plaidé la directrice générale d’UNICEF, Catherine Russell, décrivant « des images horribles d’enfants et de civils tués » alors « qu’ils s’abritaient dans une école ».

« Les civils ne peuvent pas et ne devraient pas avoir à supporter cela plus longtemps », a dénoncé le responsable de l’aide humanitaire de l’ONU, Martin Griffiths.

Plus grand centre hospitalier de la bande de Gaza, l’hôpital al-Chifa a commencé à être évacué, samedi. Un journaliste de l’Agence France-Presse sur place a observé une colonne de patients, dont des enfants blessés et des personnes âgées, fuyant à pied l’hôpital.

Il n’était toujours pas clair en fin de journée qui avait donné la consigne d’évacuer l’établissement. Selon les autorités du Hamas, l’armée israélienne a ordonné à tout le monde de quitter l’hôpital, une version rejetée par Tsahal, qui affirme avoir répondu à une « requête d’évacuation » de la direction de l’hôpital.

Le complexe hospitalier est assiégé depuis mercredi par l’armée israélienne, qui soupçonne qu’il abrite une base militaire du Hamas, ce que dément le mouvement palestinien.

Sans eau ni électricité, l’hôpital al-Chifa « n’est plus en mesure de fonctionner », a prévenu l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui y a mené une mission samedi.

« Pas d’eau, pas de nourriture, pas d’électricité, pas de carburant, des fournitures médicales épuisées », a déploré le secrétaire général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, qui a décrit l’établissement comme une « zone de mort ».

« Compte tenu de cette situation déplorable et de l’état de nombreux patients, y compris des bébés, le personnel soignant a demandé de l’aide pour évacuer les patients qui ne peuvent plus recevoir de soins vitaux sur place. »

— Tedros Adhanom Ghebreyesus, secrétaire général de l’OMS

Manque de carburant

Outre la pénurie d’eau et de nourriture, le manque de carburant se fait de plus en plus sentir dans l’enclave palestinienne.

Six ambulances ont ainsi cessé de fonctionner, a annoncé samedi le Croissant-Rouge palestinien.

Hôpitaux, usines de dessalement, pompes à eaux usées : la quantité de carburant livrée par camion dans la bande de Gaza est loin de répondre aux besoins quotidiens des réfugiés palestiniens, déplorent les organisations humanitaires.

« Nous demandons une livraison adéquate, régulière et inconditionnelle de carburant pour maintenir toutes nos activités vitales dans la bande de Gaza », a plaidé samedi l’ONU.

Crainte d’une intensification

Samedi, les forces israéliennes ont bombardé un immeuble résidentiel à Khan Younès, tuant 26 personnes et faisant craindre une intensification des frappes dans le sud de la bande de Gaza où sont réfugiés des milliers de civils.

Le porte-parole de l’armée israélienne avait déclaré vendredi que ses troupes attaqueraient « partout où le Hamas existe, y compris dans le sud de la bande de Gaza ».

La situation dans le territoire palestinien est « horrible » et « intolérable », a reconnu samedi le premier conseiller du président américain pour le Proche et le Moyen-Orient, Brett McGurk.

Lors d’un forum à Bahreïn, il a souligné la nécessité d’un accord sur la libération des otages détenus par le Hamas afin de parvenir à une pause « significative » des combats dans l’enclave palestinienne.

Par ailleurs, le président américain Joe Biden a appelé samedi à « réunifier » la bande de Gaza et la Cisjordanie sous une « Autorité palestinienne revitalisée », ce à quoi le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a rétorqué que l’organisation sous sa forme actuelle était « incapable d’assumer la responsabilité de Gaza ».

Hôpitaux encerclés en Cisjordanie

En Cisjordanie, les forces israéliennes ont encerclé samedi l’hôpital Khalil-Suleiman, soutenu par Médecins sans frontières.

Selon l’organisation, une explosion et des tirs ont été entendus dans l’enceinte de l’hôpital. L’armée israélienne aurait ordonné par mégaphone l’évacuation de l’hôpital avant de se retirer une heure plus tard.

« Les attaques contre le personnel et les établissements de santé sont devenues habituelles en Cisjordanie et se sont intensifiées depuis le 7 octobre. Le personnel de santé est régulièrement attaqué par l’armée israélienne, tandis que les ambulances ne peuvent pas se déplacer librement pour atteindre les blessés et les malades », a réagi le chef de mission de Médecins sans frontières dans les territoires palestiniens occupés, Renzo Fricke.

— Avec The Guardian, l’Agence France-Presse et l’Associated Press

Manifestation pro-Palestine à Montréal

« les gens continuent d’appuyer la Palestine »

Réclamant un cessez-le-feu immédiat, des milliers de personnes ont de nouveau manifesté dans les rues du centre-ville de Montréal samedi en soutien à la Palestine.

Des orateurs ont chauffé la foule qui se massait petit à petit au square Dorchester, malgré le temps froid contrastant avec les derniers jours. Les autorités ont estimé le nombre des manifestants à 10 000.

« On doit montrer à notre gouvernement que les gens continuent d’appuyer la Palestine », a lancé Rand, une travailleuse du secteur de la santé d’origine palestinienne qui dit avoir perdu plusieurs membres de sa famille dans les bombardements de la bande de Gaza.

Puis la foule est descendue dans la rue vers 15 h 30, suivant d’abord le boulevard René-Lévesque puis la rue Sainte-Catherine, encadrée par de nombreux policiers à vélo et à cheval.

« Mettre de la pression »

La position de Justin Trudeau, qui s’abstient de réclamer un cessez-le-feu, pousse de nombreux manifestants à descendre dans la rue, plus d’un mois après le début du conflit en Israël, explique une représentante du Palestinian Youth Movement, l’association derrière l’organisation de cette manifestation, Sarah Shamy.

Cette dernière se réjouit de constater que la mobilisation ne fléchit pas. « Ça ne ralentit pas et on voit différentes formes de pression », a-t-elle déclaré, citant le blocage du pont Jacques-Cartier jeudi dernier comme « la preuve qu’on est prêts à prendre tous les moyens pour mettre de la pression sur nos gouvernements ».

Le Service de police de la Ville de Montréal n’a signalé aucun débordement.

Le Palestinian Youth Movement convie ses supporteurs à un grand rassemblement national à Ottawa samedi prochain, un évènement que Sarah Shamy entrevoit comme « la plus importante manifestation en soutien à la Palestine de l’histoire du Canada ».

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