Universités

Incursion dans le contingentement des programmes

Pour certains programmes, pratiquement tout étudiant qui réussit au cégep sait qu’il sera accepté à l’université. Mais pour d’autres, la lutte est féroce pour avoir sa place. Pourquoi certains programmes sont-ils si contingentés ? Qui décide de ces limites à respecter et comment ces décisions sont-elles prises ?

S’il y a un exemple de programme universitaire grandement contingenté, c’est bien celui de médecine. Et la décision par rapport au nombre de personnes admises est prise par le gouvernement du Québec, qui paie d’ailleurs pour l’essentiel de la formation dispendieuse de ces étudiants et qui sera aussi leur employeur.

« Le gouvernement a une cible actuellement pour augmenter le nombre de médecins formés, alors chacune des quatre facultés de médecine au Québec doit augmenter le nombre d’étudiants admis chaque année », explique Pascale Lefrançois, vice-rectrice aux affaires étudiantes et aux études à l’Université de Montréal (UdeM). Ainsi, si 332 étudiants ont commencé le programme de médecine à l’UdeM cet automne, ils devront être 362 en 2025.

Le gouvernement se prononce aussi sur certaines cibles à atteindre pour d’autres programmes, comme sciences infirmières et enseignement, sans toutefois imposer un nombre précis de personnes à accepter par université.

Les besoins et les limites

D’autres programmes sont contingentés par les universités elles-mêmes. « Par exemple, nous acceptons dans notre programme de médecine vétérinaire à notre campus de Saint-Hyacinthe 96 personnes par année, mais comme les besoins sont particulièrement grands en région, nous venons de conclure une entente avec l’Université du Québec à Rimouski pour en former 25 de plus, indique Pascale Lefrançois. Pour délocaliser ce programme, nous avons dû obtenir l’approbation de la ministre de l’Enseignement supérieur. »

Si les besoins du marché de l’emploi influencent les universités dans la création de nouvelles cohortes, la disponibilité des ressources matérielles et humaines est un autre facteur considéré.

C’est vrai pour le programme de médecine vétérinaire, mais aussi pour celui de génie aérospatial à l’Université Concordia. Seulement une centaine de personnes y sont admises chaque année et elles doivent avoir accès aux laboratoires et aux équipements à la fine pointe de la technologie.

« De plus, le programme est multidisciplinaire et fondé largement sur les principes de l’apprentissage expérientiel et de l’apprentissage par action, alors nous voulons maintenir des classes de taille raisonnable afin de maximiser le travail en groupe et les interactions entre les professeurs et les étudiants », indique Mourad Debbabi, doyen de l’École de génie d’informatique Gina-Cody de l’Université Concordia.

Des admissions plus inclusives

Traditionnellement, pour admettre les étudiants dans les programmes contingentés, les universités regardent les résultats scolaires. Mais cette façon de faire a ses limites et certaines universités mettent en place de nouvelles stratégies pour viser plus juste.

« Lorsque nous avons un programme contingenté, nous voulons que les étudiants choisis terminent le programme. Nous ne voulons pas, par exemple, en perdre 40 après la première année. »

– Pascale Lefrançois, vice-rectrice aux affaires étudiantes et aux études à l’Université de Montréal

Dans certains programmes, c’est un problème. « Par exemple, beaucoup d’étudiants qui vont en nutrition sont ceux qui n’ont pas été acceptés en médecine, illustre-t-elle. Mais, pour plusieurs raisons, notamment l’ambiance des cours, nous voulons des gens qui sont vraiment intéressés par ce champ d’études et qui y resteront jusqu’à la fin. »

C’est pour cette raison que pour la période d’admission de 2023 qui est commencée, l’UdeM a mis sur pied un projet pilote qui intègre des critères d’admission inclusive pour le programme de nutrition et d’optométrie. « On continuera de regarder les notes, mais nous ferons aussi des tests pour regarder différentes compétences transversales, comme la communication, le travail d’équipe, l’empathie, et nous réaliserons une entrevue pour voir si la motivation est réelle, explique Pascale Lefrançois. Nous voulons avoir les bons étudiants dans les bons programmes. »

L’UdeM a aussi des places réservées et des bourses d’études pour encourager des membres des communautés noires et autochtones à poser leur candidature dans des programmes où ils sont moins portés à aller spontanément, comme médecine et droit. « Nous voulons avoir dans nos programmes une diversité d’étudiants afin d’avoir une bonne représentativité de la population québécoise », ajoute Pascale Lefrançois.

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