Meurtre de James Dubé

UN CRIME PRESQUE PARFAIT

Qui a tué James Dubé ? Pendant près de 15 ans, l’assassin du pêcheur de Grande-Rivière, en Gaspésie, a réussi à échapper aux enquêteurs. Jusqu’à ce que la Sûreté du Québec lance une délicate opération d’infiltration pour gagner la confiance du principal suspect, à plus de 500 km de là…

Ils allaient se marier

GRANDE-RIVIÈRE — Il est près de 3 heures du matin quand James Dubé ouvre les yeux pour entamer ce qui va être la dernière journée de sa vie.

Prenant soin de ne pas réveiller ses deux filles, sa conjointe à ses côtés, le pêcheur enfile sa tenue de travail et sort de sa maison. Il monte à bord de sa camionnette Ford blanche et roule sur la route 132 pendant 3 km, jusqu’au quai de Grande-Rivière.

Avec son partenaire de pêche Gilles Lebreux, James Dubé monte à bord de son bateau. Vêtus de manteaux pour les protéger de la nuit fraîche du 30 avril 1998, les deux hommes prennent la mer pour aller récupérer leurs casiers à homards.

« James remontait les cages, et moi, je les vidais et remettais un appât de maquereau à l’intérieur, se souvient Gilles Lebreux. Nous avions 250 cages. Il fallait travailler vite, nous ne parlions pas beaucoup. »

Après la pêche, James Dubé vend les homards à l’usine de poissons de Grande-Rivière, dont il est l’un des copropriétaires. Plus tard, il remonte à bord de son camion pour rentrer chez lui, dans son bungalow en briques brunes qui fait face à la mer, sur la route 132.

À 37 ans, James Dubé est au sommet de sa forme. Le sourire facile, la poignée de main forte, il est connu de tous à Grande-Rivière, la ville qui l’a vu grandir. Sept ans plus tôt, son père, Raymond Dubé, lui aussi pêcheur de homards, est resté accroché à un filet qui l’a tiré dans le treuil de son bateau, le tuant sur le coup. Cela n’a pas découragé son fils de reprendre la mer avec le même bateau et de pratiquer ce métier qui lui permet de partir à la chasse à l’orignal l’automne et de faire des voyages en motoneige à travers la Gaspésie l’hiver.

« Quand James rentrait quelque part, il prenait sa place, il était imposant, se souvient une personne qui l’a connu et qui veut garder l’anonymat. Disons qu’il n’y a personne qui allait lui piler sur les pieds. »

Trois semaines plus tôt, James Dubé et sa conjointe Johanne Johnson ont ravi des amis durant un souper en leur montrant une bague de fiançailles. « Ils allaient se marier. C’était un beau moment pour eux. »

Vers midi, Johanne Johnson arrive à la maison avec deux sous-marins qu’elle a achetés au dépanneur. Puis le couple fait l’amour. Mme Johnson, qui travaille à l’usine de homard, ne peut rester plus longtemps : elle doit aller travailler. James Dubé s’allonge pour faire une sieste, les bras croisés, sur le canapé du salon.

Quelques heures plus tard, André Dubé, le frère aîné de James, propriétaire d’un garage de débosselage à Grande-Rivière, s’apprête à peindre la voiture d’un client quand le téléphone sonne dans le bureau, près de l’entrée. Au bout du fil, une connaissance lui dit que quelque chose de grave vient de se produire chez James Dubé.

Un désordre voulu

André Dubé saute dans sa voiture et arrive chez son frère en moins de cinq minutes.

« Je stationne dans l’entrée et je vois des policiers et des ambulanciers partout. Il y avait une vingtaine de personnes sur place. Je n’avais pas le droit d’entrer dans la maison. »

Cent cinquante kilomètres plus au sud, l’agent enquêteur Guy Lebel, du bureau des crimes majeurs de la Sûreté du Québec pour l’est du Québec, est en route vers Rimouski quand il reçoit un appel lui disant de faire demi-tour et de se rendre à Grande-Rivière.

Il est environ 17 h quand Guy Lebel gare sa voiture devant le bungalow de James Dubé. Des enquêteurs de la SQ du poste de Pabos le guident à l’intérieur, jusqu’au salon, le centre d’intérêt de tous ceux qui se trouvent sur place.

« Je vois un homme couché sur le divan, sans vie. Il est habillé avec des jeans, il est habillé comme un travailleur. Il a une blessure par balle à la tête. La maison semble avoir été fouillée. Il y a des casseroles par terre. C’est la plus vieille de ses filles qui l’a trouvé. Elle pleure et elle panique dans la cuisine. »

Alertée à son travail, Johanne Johnson arrive en voiture. « Elle semblait être en état de choc », dit M. Lebel.

Des policiers de la SQ établissent un barrage routier sur la 132 et fouillent toutes les voitures qui circulent dans le secteur, à la recherche de l’arme du crime. Les enquêteurs interrogent les voisins, les collègues de travail, des membres de la famille de James Dubé, histoire d’avoir un portrait du déroulement de sa journée.

Guy Lebel établit un périmètre de sécurité autour de la maison. Lui et l’agent du service d’identité judiciaire fouillent le rez-de-chaussée, le sous-sol et le vaste terrain. « On cherchait des objets où il aurait pu y avoir du sang, mais on n’a pas trouvé grand-chose. »

Guy Lebel a travaillé pendant près de 10 ans au poste de la SQ de Pabos, à sept minutes de route de la maison où s’est produit le meurtre. Il a plusieurs fois croisé James Dubé. « Lui et son frère n’étaient pas des gens qui revenaient dans notre radar. C’était des gens qui travaillaient, qui faisaient leur vie. »

Sur la scène du meurtre, un détail surprend M. Lebel.

« La télé, les armes de chasse au sous-sol… Tout était encore là. J’ai trouvé ça étrange. D’habitude, les objets de valeur, c’est eux autres qui disparaissent en premier. Et les casseroles par terre… Quelque chose clochait. La maison était en désordre, mais ce n’était pas un désordre normal. Ça avait l’air d’un désordre voulu. »

Des projets de maison

En plus de le plonger dans un état de choc, le meurtre de son frère fait exploser une série de questions dans la tête d’André Dubé.

« Qui a fait ça ? Est-ce qu’il y a eu une chicane avec un autre pêcheur ? Est-ce une histoire de femme ? Est-ce que la personne qui a fait ça va revenir ? »

James était son meilleur ami, dit-il. « Nous étions toujours ensemble. Nous étions presque comme des jumeaux. »

Quelques jours après le meurtre, le deuxième voisin de James Dubé fait une chute en descendant dans son sous-sol. Il se coupe au cou sur la paroi d’un aquarium et meurt.

« Ça a ajouté au climat de paranoïa. On se disait : mais qu’est-ce qui se passe ici ? C’est une petite place. Je ne suis pas quelqu’un de nerveux, mais pendant un mois après le meurtre, j’allumais les lumières partout la nuit. À l’intérieur et à l’extérieur. Je n’étais pas tranquille. »

André Dubé et sa femme accueillent chez eux Johanne Johnson et ses deux filles. Très vite, M. Dubé s’étonne de l’attitude de sa belle-sœur.

« Johanne ne posait aucune question sur la mort de James. Elle était froide, indifférente. Elle ne pleurait pas. »

— André Dubé, frère de James Dubé

« Elle ne posait aucune question sur la mort de James. Elle était froide, indifférente. Elle ne pleurait pas. »

André Dubé n’en revient pas non plus de voir sa belle-sœur retourner prendre sa douche dans la maison où son conjoint a été abattu quelques jours plus tôt.

Quelques jours après le meurtre, Johanne Johnson est au téléphone pour magasiner une voiture pour sa fille, achat auquel James Dubé s’est opposé avant sa mort, dit André Dubé. « Le jour suivant, elle parlait de se faire bâtir une maison. Moi et ma femme à l’époque, on s’est mis à trouver que ce n’était pas normal. »

L’après-midi où il est mort, James devait aller chez le notaire pour signer les papiers et dissoudre l’entreprise de l’usine de homard, se souvient André Dubé.

« Par le fait même, il aurait perdu son assurance vie. En ne sortant pas de la maison ce jour-là, les actionnaires, dont faisait partie Johanne, voyaient leurs dettes payées et touchaient l’assurance vie si un des actionnaires décédait. »

L’autopsie montre que la carabine qui a servi à tuer James Dubé est de calibre 22, le même qu’une carabine que le pêcheur gardait sur son bateau et qui avait été volée dans les semaines précédant le meurtre.

Les enquêteurs cherchent à voir si un pêcheur pouvait en vouloir à James Dubé, mais ne trouvent rien. Ils veulent faire passer le test du polygraphe à Johanne Johnson. Celle-ci refuse, répétant qu’elle n’a rien à voir avec le meurtre de son futur mari.

Les mois passent, puis les années. Un constat commence à s’imposer : le meurtrier n’a pas laissé assez de traces pour que son identité soit révélée.

50 $ dans un verre

Johanne Johnson descend de sa voiture devant la maison de son nouveau conjoint à Rivière-du-Loup peu après 15 h, le 6 décembre 2012, lorsqu’elle remarque une femme debout près d’une voiture garée dans la rue.

Elle lui demande si elle a besoin d’aide. La femme répond « qu’elle est perdue, qu’elle cherche sa sœur qu’elle n’a pas vue depuis longtemps pour lui annoncer que leur mère est décédée », selon les documents déposés à la Cour supérieure du Québec l’an dernier.

Johanne Johnson offre son aide. La femme accepte et les deux femmes entreprennent de quadriller le quartier en voiture.

Johanne Johnson ne le sait pas encore, mais l’inconnue désorientée qu’elle vient de faire monter à bord de sa voiture est une agente d’infiltration de la Sûreté du Québec.

Un grand manège lancé par l’équipe des dossiers non résolus de la SQ avec la participation de la Gendarmerie royale du Canada et du Service de police de la Ville de Montréal vient de se mettre en marche.

C’est d’ailleurs la huitième fois en plus de deux semaines qu’une approche est tentée. Mais, chaque fois, « les allées et venues de Johanne Johnson ne [permettent] pas » à l’agente de l’accoster.

Pendant que la voiture avance dans les rues de Rivière-du-Loup, l’agente, identifiée par le code SQ0902 dans les documents d’enquête, montre à Johnson une photo de sa sœur. Elle lui offre un billet de 50 $. La conductrice le refuse, affirmant que « c’est de l’aide ». L’agente met l’argent « dans un verre dans le milieu de la console ».

Pendant près de deux heures, les deux femmes discutent. Johanne Johnson, alors âgée de 52 ans, parle de ses ennuis de santé, de ses filles et de ses petits-enfants. Elle explique être en arrêt de travail.

Vers 17 h, elles reviennent au domicile de Johanne Johnson. L’agente SQ0902 lui offre un deuxième billet de 50 $, qu’elle refuse à nouveau. L’agente place le billet « au même endroit que l’autre ». Une récompense de 500 $ sera offerte à la personne qui l’aidera à retrouver sa sœur, lui dit-elle.

Les deux femmes échangent leurs numéros de téléphone. Johanne Johnson se porte volontaire pour continuer les recherches « les lundis, mercredis et vendredis ».

Du parfum et un CD de Céline Dion

Dans les jours qui suivent, Johanne Johnson et l’agente SQ0902 se voient régulièrement. Les deux femmes poursuivent les recherches avant d’aller dîner ou souper dans un restaurant. C’est l’agente SQ0902 qui paie la note.

L’agente donne des billets de 50 ou 100 $ à Johnson pour la remercier de prendre le temps de l’aider à retrouver sa sœur. Cette dernière accepte l’argent, qu’elle promet d’utiliser pour « gâter [ses] petits-enfants ». Les deux femmes deviennent amies.

Durant leurs conversations, Johnson est « de bonne humeur » et « parle facilement de sa vie privée ».

Elle raconte avoir été victime de violence conjugale de la part de son « ex » et affirme que ce dernier est « mort dans un accident ».

Elle dit faire du travail à domicile pour les personnes âgées – son employeur est le CLSC. Johanne Johnson confie qu’elle a déjà eu des problèmes d’alcool et de dépendance au jeu.

Les deux femmes font leurs recherches en voiture depuis plus d’une semaine quand l’agente SQ0902 reçoit un appel. Elle doit se rendre à Montmagny pour récupérer un véhicule pour l’apporter à Lévis. « Johanne Johnson est informée que le conjoint de SQ0902 a une compagnie et que SQ0902 travaille pour lui », peut-on lire dans le compte rendu de l’opération.

L’agente SQ0902 demande à Johanne Johnson si elle peut conduire le véhicule pour elle, qu’elle sera payée pour ce service, ce qu’elle accepte. L’agente lui « offre la job » au sein de l’entreprise sur-le-champ.

Johanne Johnson déplace des véhicules d’une ville à l’autre. Chaque fois, elle se fait payer en argent comptant. Si bien qu’elle lance un jour qu’elle « va devenir riche » à force de travailler de la sorte.

Le 20 décembre, l’agente SQ0902 surprend Johanne Johnson en lui offrant un cadeau : du parfum et un CD de Céline Dion. Johnson dit à l’agente SQ0902 qu’elle est « un cadeau du ciel ».

Peu à peu, la nature du travail confié à Johanne Johnson par l’agente SQ0902 se met à changer.

Johnson doit transporter une valise en autocar de Rivière-du-Loup à Sainte-Foy. Plus tard, elle déplacera une valise qui se trouve dans le coffre d’une voiture. On ne peut lui dire ce que les valises contiennent, mais « ce n’est pas de la drogue ». Elle rencontre aussi le conjoint de l’agente, identifié sous le nom de DG876, et d’autres prétendus membres de l’organisation.

Johnson accepte les tâches et peut toucher 400, 500 $, voire plus, pour une journée de travail.

Johnson accepte de transporter une valise qui contient des armes. Pour célébrer, le groupe s’offre des soupers copieux dans des restaurants haut de gamme, notamment chez La Bête, à Québec.

Le 29 janvier, lors d’un passage à Montréal pour une livraison, le groupe en profite pour assister à un match de hockey au Centre Bell, une première pour Johanne Johnson. Le Canadien l’emporte 4-3 contre les Jets de Winnipeg. Johnson « n’aime pas le hockey, mais apprécie sa soirée. […] [Elle] est de bonne humeur », note le compte rendu.

« La vérité, pas de menteries »

Johanne Johnson apprend qu’une « grosse job » l’attend si elle se montre à la hauteur.

Avant d’avoir accès à cette « grosse job », elle doit rencontrer le grand patron de l’organisation. Cette rencontre a lieu le 19 juin dans un chalet de New Richmond, au bord de la baie des Chaleurs, en Gaspésie.

En route, l’agente SQ0902 arrête au Tim Horton’s à New Richmond. Elle téléphone au grand patron. De retour dans la voiture, elle est contrariée. « Il y a de quoi qui va pas, là. » Le grand patron n’est pas de bonne humeur.

Johanne Johnson demande « s’il va leur arriver quelque chose de grave. […] SQ0902 la rassure qu’il ne leur arrivera rien physiquement et de ne pas “ capoter ” ».

Pendant la rencontre, le patron affirme que le groupe a de la « câlisse de chaleur… ». « Je viens d’apprendre ça, là. C’est toutes des affaires qu’on aurait pu éviter. Parce que la chaleur ne vient pas de nous autres, là. La chaleur vient de ton amie icitte là », dit-il en se tournant vers Johanne Johnson.

Le patron dit que « c’est pire que ce qu’il pensait et que c’est par rapport à son ex qui a été tué ».

Les deux agents quittent la pièce. Johanne Johnson est seule avec le grand patron.

Le grand patron est « respectueux, ne monte pas le ton. Il n’y a pas de confrontation ou d’intimidation », lit-on dans les notes de la Sûreté du Québec.

« Fait que si tu veux que j’t’aide, là, […] tu vas commencer à me dire qu’est-ce qui est arrivé cette journée-là de A à Z, dit-il. La vérité, pas de menteries parce que si tu me contes une menterie, tu t’en vas. C’est quoi qui est arrivé ? […] »

J.J : « La journée de James ? »

Patron : « Oué. »

J.J. : « Je l’ai tué. »

Patron : « Comment tu l’as tué ? Qu’est-ce qui est arrivé ? Parce que. »

J.J. : « Ben là [inaudible] y me faisait tellement de pression su la [inaudible]. »

Patron : « Ok. […]. »

J.J. « C’est la première fois je le dis. »

Coke diète pour le grand patron

Le grand patron lui demande pourquoi elle a tué son conjoint ce jour-là.

« [Je] n’ai pas décidé du moment, c’est arrivé comme ça. C’est arrivé comme un flash », répond-elle.

Elle dit avoir tué James Dubé pendant qu’il faisait la sieste, allongé sur le canapé. Elle lui a tiré dans la tête avec une carabine 22. « Après avoir tué James Dubé, Johanne Johnson a jeté des chaudrons par terre pour simuler un vol », note le compte rendu.

« Elle prend l’arme, l’enroule dans un tapis, sort par derrière la maison, quitte en voiture et va porter l’arme dans le bois à Chandler à une quinzaine de minutes de chez elle. »

Johanne Johnson raconte avoir hérité du bateau de pêche de son conjoint, bateau qu’elle a vendu 175 000 $, et de 30 000 $ d’une assurance vie. Elle dit avoir vécu deux ou trois ans dans la drogue pour essayer d’oublier. « Elle se sentait suivie par les policiers. Elle a passé l’argent de l’héritage en drogue. Elle a donné 30 000 $ à son père pour payer ses dettes. Elle a gâté ses filles. »

Johnson raconte aussi au grand patron être inquiète, lorsque l’été arrive, que l’arme soit retrouvée et qu’on vienne frapper à sa porte.

Après la rencontre, le grand patron demande à deux membres d’accompagner Johanne Johnson dans le bois de la route de Pellegrin, à Chandler, là où elle dit s’être débarrassée de l’arme, histoire de tenter de la localiser et de la faire disparaître pour de bon.

Le groupe s’y rend, mais ne réussit pas à retrouver l’arme.

Sur le chemin du retour, le groupe s’arrête au IGA de Chandler, et Johanne Johnson se fait dire d’aller y acheter « du Coke diète et des biscuits aux brisures de chocolat » pour le grand patron. Lorsqu’elle ressort de l’épicerie, Johanne Johnson est mise en état d’arrestation pour le meurtre de James Dubé.

Épilogue

Le 13 avril 2016, après trois jours de délibération au palais de justice de Percé, un jury composé de cinq hommes et sept femmes reconnaît Johanne Johnson coupable du meurtre au second degré de James Dubé. Elle est condamnée à la prison à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 11 ans.

Johanne Johnson a fait une demande d’appel qui a été autorisée par la Cour d’appel du Québec. Le dossier final n’a pas encore été déposé.

Durant son procès, elle a soutenu n’avoir rien à voir avec le meurtre et dit avoir menti au grand patron par crainte de mourir.

Son avocat, Me Rodrigue Beauchesne, soutient que sa cliente est une victime.

« Avec le piège de l’opération M. Big, la police lui a fait dire ce que la police voulait entendre, dit-il. Mme Johnson est une citoyenne, et devant toute la machine, elle n’était pas de taille. »

Pendant l’opération d’infiltration, qui a duré plus de six mois, Johanne Johnson a reçu environ 18 000 $ en argent comptant pour le travail effectué et a été remboursée 2400 $ pour ses dépenses.

Encore aujourd’hui, André Dubé dit être abasourdi quand il réalise que son ex-belle-sœur était en pleine possession de ses moyens lorsqu’elle a abattu son frère pendant sa sieste.

« C’était de sang-froid. Si ç’avait été fait en boisson ou sur la drogue… Mais c’était sur l’heure du midi, alors qu’elle était à jeun. »

Il dit ne pas ressentir de colère à son endroit. « Maintenant, elle paie pour ce qu’elle a fait. »

Guy Lebel, premier membre de l’unité des crimes majeurs à arriver sur le lieu du meurtre, se rappelle avoir ressenti « du soulagement » quand il a appris que Johnson avait été arrêtée, 15 ans après le meurtre.

« Je me suis dit : On avait raison. L’enquête avait raison. »

La personne qui passe près de commettre un homicide parfait, c’est celle qui agit seule, dit-il.

« Celui qui le fait seul, il n’y a personne qui peut le vendre. S’il ne parle pas, ça ne sort pas. Dans le cas de Johanne Johnson, elle aurait pu l’emporter avec elle dans sa tombe, ce secret-là. »

Qu’est-ce qu’un « M. Big » ?

Un « M. Big » est une méthode d’enquête visant à faire croire à un suspect qu’il est en voie de se joindre à un groupe criminel, et qui est utilisée dans le but de lui soutirer une confession. Au moins 350 opérations de cette nature ont été menées depuis 30 ans au Canada. En 2014, la Cour suprême a maintenu la validité des opérations de type M. Big, tout en restreignant leur admissibilité en preuve. Les critiques de l’utilisation de ces opérations soutiennent que la seule participation d’un suspect à une opération de type M. Big est susceptible d’entacher sa crédibilité aux yeux d’un jury.

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