Deuxième dose de vaccin

Place à la « deuxième campagne »

Québec — Maintenant que 75 % des adultes ont reçu leur première dose de vaccin contre la COVID-19, Québec appuie sur l’accélérateur pour administrer la deuxième. Il faut devancer 3 millions de rendez-vous afin d’arriver à un déconfinement plus important à compter du 31 août. L’opération commencera lundi.

« Le succès de la première campagne, c’est bien, mais le vrai succès, c’est quand on va avoir nos deux doses. Il faut les avoir le plus rapidement possible si on veut être capables d’avoir un retour à la normale le plus tôt possible », a affirmé le ministre de la Santé et des Services sociaux, Chrisitan Dubé, en conférence de presse jeudi.

Pour y arriver, il lance la « deuxième campagne » de vaccination. Le gouvernement Legault annonce qu’il sera possible de devancer son rendez-vous pour une deuxième dose au cours du mois de juin. Un calendrier est établi en fonction des groupes d’âge.

Ainsi, dès lundi, les personnes âgées de 80 ans et plus pourront prendre un nouveau rendez-vous pour la deuxième dose. Le lendemain, ce sera au tour des 75 ans et plus, et ainsi de suite. L’opération s’échelonne sur trois semaines.

Objectif : 31 août

Dans son plan de déconfinement, Québec s’est donné pour objectif que 75 % des 12 ans et plus aient reçu les deux doses d’ici le 31 août. De nouveaux allégements aux consignes sanitaires seraient alors apportés progressivement, dans les écoles et ailleurs. Ce serait la fin du code de couleurs. Il faut toutefois devancer les rendez-vous pour une deuxième dose déjà fixés afin de respecter l’échéancier.

« Pour qu’on soit capables de bien déconfiner au Québec, on va dire, début de septembre, c’est sûr qu’on doit être adéquatement vaccinés » et administrer deux doses, a affirmé Christian Dubé.

« Pour être capables de se rassembler à nouveau dans les maisons sans masque […], pour être capables de serrer nos proches, il faut faire un deuxième effort dans la vaccination. Je pense qu’on est capables de faire ça dans les deux prochains mois. »

— Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux

Cette « deuxième campagne », « ça semble simple », mais il s’agit d’un « réajustement important », a-t-il insisté. « C’est une grosse commande » sur le plan logistique d’arriver à devancer 3 millions de rendez-vous.

Pour obtenir plus vite la deuxième dose, il faut utiliser la plateforme Clic Santé, où il sera possible de prendre un nouveau rendez-vous. Celui qui avait déjà été fixé sera annulé automatiquement. La deuxième dose sera donnée au même centre de vaccination que l’a été la première. Il n’est pas obligatoire de devancer son rendez-vous.

« On a la garantie, pendant la période estivale, que ce soit juin, juillet, août, autant pour Pfizer, autant pour AstraZeneca que Moderna, qu’on va avoir la bonne quantité de vaccins pour honorer les deuxièmes rendez-vous », a indiqué le directeur national de la campagne de vaccination, Daniel Paré. D’ici la fin de juin, 1 million de doses du vaccin d’AstraZeneca arriveront au Canada. « En fait de timing, ça va être parfait pour justement honorer les rendez-vous de deuxième dose d’AstraZeneca pour ceux qui voudront le faire, et nous, on va aussi prévoir un vaccin ARN Messager pour ceux qui refuseraient [l’AstraZeneca] ou qui aimeraient avoir un autre vaccin. »

Encore des efforts à fournir

Le directeur national de santé publique, le DHoracio Arruda, a signalé que Québec aurait des efforts à faire pour s’assurer qu’un maximum de personnes se fassent vacciner pleinement.

« On sait que, naturellement, la deuxième dose, c’est toujours un peu difficile pour toutes sortes de raisons. Il y a des gens qui se sentent protégés à une dose. »

— Le Dr Horacio Arruda, directeur national de santé publique

Dans son calendrier pour devancer les deuxièmes doses, il n’y a rien au sujet des 12-17 ans. Les précisions viendront plus tard. « On va commencer par les faire en première dose », et « une fois qu’on aura vu comment s’est placée la deuxième dose pour tout le monde, on vous reviendra », a expliqué Christian Dubé. Jusqu’ici, un peu moins de la moitié des ados ont été vaccinés ou ont pris un rendez-vous. La vaccination organisée avec les écoles se fera la semaine prochaine et la suivante.

Québec a également annoncé jeudi qu’il réduisait de 16 à 8 semaines l’intervalle recommandé entre les deux doses pour tous les vaccins contre la COVID-19, à la suite d’un avis de ses experts. Le gouvernement Legault espère ainsi permettre à plus d’habitants d’obtenir une « réponse immunitaire plus élevée, plus rapidement ». Lorsqu’une personne voudra devancer sa deuxième dose, le délai minimal de huit semaines avec la première devra être respecté. « Ce que nos experts nous disent, c’est qu’après la 8e semaine, on est déjà bien protégés. La 10e, c’est aussi bon, ou la 13e », a précisé le DArruda.

La menace des variants

Professeur à la faculté de médecine de l’Université de Montréal, le DAndré Veillette assure que la réduction de l’intervalle est une bonne décision. « Le délai de 16 semaines était déjà long dans le contexte, et avec le variant [Delta, dit indien] qui est à nos portes, il fallait agir. Cette souche résiste davantage à une seule dose. Donc, on a besoin d’une deuxième dose plus rapidement », explique l’expert, aussi membre d’un groupe de travail sur la vaccination à Ottawa.

L’épidémiologiste Nimâ Machouf est du même avis. « Retarder à 16 semaines, ce n’était pas par choix. C’était parce que le gouvernement avait décidé que, pour arriver à bout du virus, il souhaitait d’abord offrir une première couverture à la majorité. Maintenant que la campagne roule bien, on n’a plus besoin d’attendre », explique-t-elle.

Il reste que des nuances s’imposent. « Dans le monde, il y a encore beaucoup d’endroits où le nombre de cas est élevé. Tant que le virus n’a pas perdu du terrain partout, on n’est pas tirés d’affaire. Ce qui va être extrêmement important, c’est la frontière. Les tests rapides et la surveillance de la quarantaine vont être essentiels », rappelle Mme Machouf, qui est aussi d’avis que le variant Delta pourrait « brouiller les cartes ».

« Plus tôt on est protégés contre le virus, moins on lui laisse de place pour muter, pour changer de face et nous rendre la vie encore plus difficile. »

— Nimâ Machouf, épidémiologiste

À l’Université du Québec à Montréal, le virologue Benoit Barbeau affirme que l’accélération des deuxièmes doses montre « que la campagne québécoise a bien progressé ». « En ce moment, contrairement au début de l’année, on ne voit pas une pénurie de doses vaccinales. On peut se permettre d’accélérer », analyse-t-il.

Jeudi, Québec a rapporté que 88 625 doses de vaccin avaient été administrées la veille, pour un total de 5,8 millions – dont 5,3 millions de premières doses. Il a annoncé 267 nouveaux cas de COVID-19, portant la moyenne quotidienne sur sept jours à 312, en baisse du tiers depuis une semaine. On a enregistré six décès supplémentaires.

Au total, 317 patients sont hospitalisés en lien avec la COVID-19 (- 23). La tendance des hospitalisations est en baisse de 20 % sur une semaine. Idem aux soins intensifs, où l’on compte 68 patients, 8 de moins que la veille. Aucune région n’affiche un taux de propagation correspondant à la zone rouge (supérieur à 10 nouveaux cas pour 100 000 habitants).

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.