AFRIQUE DU NORD

« Dernier espoir pour la Libye »

Un premier ministre qui menace de démissionner. Un pays partagé entre différentes milices armées et deux gouvernements qui se disputent le pouvoir. Des négociations difficiles pour créer un gouvernement d’unité nationale. La Libye est au bord de l’éclatement. Résumé de la situation en cinq points.

DÉMISSION

« Si ma démission est la solution, alors je l’annonce ici », s’est exclamé Abdallah al-Theni, mardi soir, sur un plateau de télévision où des citoyens mécontents le critiquaient. Cette sortie du premier ministre libyen reconnu par la communauté internationale est survenue le jour même de la reprise des pourparlers visant à former un gouvernement d’union nationale. Le professeur Francesco Cavatorta de l’Université Laval, spécialiste du Moyen-Orient, évoque la possibilité que cette démission soit un « préalable » à la conclusion d’une entente, soupçonnant que « sa coalition le sacrifie au nom d’un accord avec l’autre coalition qui ne veut plus rien savoir d’al-Theni ».

NÉGOCIATIONS

Deux gouvernements se disputent le pouvoir, en Libye. Celui du premier ministre Abdallah al-Theni, élu aux dernières élections et reconnu par la communauté internationale, a dû fuir il y a un an la capitale, Tripoli. Une coalition de milices baptisée Aube de la Libye venait d’en prendre le contrôle et de rétablir le gouvernement précédent (Congrès général national, CGN). Des négociations tenues au Maroc avaient mené en juillet à un accord de paix et de réconciliation, que le CGN avait finalement refusé de signer. L’émissaire des Nations unies en Libye espère maintenant que la nouvelle ronde de négociations entamée mardi, à Genève, mènera à la formation d’un gouvernement d’union nationale d’ici le début du mois de septembre.

DIVISION

En plus des deux gouvernements, une multitude de milices revendiquent l’autorité sur différentes parties du territoire libyen. Ce qui amène Mohamed Ourya, professeur à l’Université de Sherbrooke et chercheur associé à la chaire Raoul-Dandurand de l’Université du Québec à Montréal, à se demander comment le pouvoir politique pourra asseoir son autorité. « La question libyenne est entre les mains des milices, ce ne sont pas les politiciens qui mènent le jeu », dit-il. Un éventuel gouvernement d’union nationale jouira cependant d’un outil de taille : une armée unifiée « pour faire face aux djihadistes » qui profitent de l’instabilité pour prospérer.

DANGER

La formation d’un gouvernement d’union nationale représente « le dernier espoir, pour la Libye, de sortir du chaos », lance Francesco Cavatorta. Faute d’un accord, il évoque carrément « la possibilité que l’État n’existe plus », ce qui ouvrirait toute grande la porte à des mouvements terroristes. « Un État en faillite, c’est toujours le refuge de toutes sortes de groupes extrémistes », dit-il. Le groupe armé État islamique, déjà présent sur le territoire, où il fait concurrence aux milices locales, pourrait notamment gagner en puissance. Mohamed Ourya abonde dans le même sens en évoquant « le scénario irakien ou syrien ».

RÉFUGIÉS

L’absence d’un accord risquerait aussi d’accentuer « cette migration incontrôlée et incontrôlable vers l’Europe », note Francesco Cavatorta. L’instabilité actuelle pousse des centaines de milliers de personnes à fuir les violences. Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) affirmait il y a un peu plus d’un mois que le nombre de déplacés internes se chiffrait désormais à 434 000. « Les chiffres pourraient cependant être bien plus élevés », prévenait la porte-parole Melissa Fleming, expliquant que « le HCR a un accès limité en Libye et gère ses opérations à distance ». Par ailleurs, à la fin de 2014, le HCR comptabilisait plus de 8000 Libyens ayant fui à l’extérieur des frontières.

— Avec l’Agence France-Presse

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