transports collectifs

Deux projets de transports collectifs ont retenu l’attention, hier : un possible prolongement de la ligne orange à Montréal et le tramway de Québec, qui doit toujours faire l’objet d’un accord de financement.

Montréal

Québec ouvre la porte à un prolongement de la ligne orange

QUÉBEC — Alors que le prolongement de la ligne bleue et de la ligne jaune ou celui du métro à Laval se font attendre depuis des années, le gouvernement Legault a ouvert la porte à un autre projet d’expansion du réseau souterrain, hier : le tronçon ouest de la ligne orange.

La ministre responsable de la Métropole, Chantal Rouleau, a confirmé avoir demandé à l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) d’accélérer l’étude du prolongement du réseau entre le terminus Côte-Vertu et la gare ferroviaire Bois-Franc.

Ce nouveau tronçon comporterait deux stations. Il permettrait de raccorder le métro au futur Réseau express métropolitain (REM).

Mme Rouleau estime que le projet ferait d’une pierre deux coups. Il atténuerait les problèmes de circulation sur les autoroutes Décarie et Métropolitaine, l’un des secteurs les plus congestionnés de Montréal. Et il entraînerait une baisse de l’achalandage sur le tronçon est de la ligne orange, car plusieurs résidants de Laval et de la couronne nord pourraient y transiter pour se rendre au centre-ville.

« Non seulement ça vient aider le cœur de l’île de Montréal, qui est très enclavé, mais ça va aider aussi à la ligne orange sur les points d’engorgement. »

— Chantal Rouleau, ministre responsable de la Métropole

La ministre ne ferme pas non plus la porte à un projet plus ambitieux pour boucler la boucle jusqu’à la station Montmorency, à Laval. Mais elle a tempéré les attentes : il est « extrêmement coûteux » et « long » de construire un nouveau métro, a-t-elle dit.

Le prolongement de la ligne orange est l’une des 13 mesures proposées par un comité présidé par la professeure Florence Junca-Adenot, dans un rapport présenté mardi. Le groupe se penchait sur les problèmes de mobilité dans le secteur Namur–De la Savane, où le promoteur Carbonleo souhaite ériger le controversé projet Royalmount.

L’ARTM présentera l’an prochain un plan d’ensemble pour améliorer la mobilité dans le Grand Montréal. Elle compte alors établir une priorisation des projets d’infrastructure.

L’organisme s’est fait avare de détails sur l’expansion du tronçon ouest de la ligne orange, hier. Il a refusé de communiquer l’évaluation des coûts du projet.

« Il n’y a pas de projet », a même dit son porte-parole, Simon Charbonneau, pour illustrer le caractère préliminaire du projet.

Le prolongement de la ligne orange à l’ouest est pourtant discuté par les élus municipaux depuis des années. Dans une présentation faite à la mairie en 2013, des fonctionnaires ont évalué son coût à un peu plus de 1,1 milliard de dollars.

Déjà creusé

Mais la facture devrait être moins élevée, selon le maire de l’arrondissement de Saint-Laurent, Alan DeSousa. La raison : une partie du tunnel est déjà creusée.

La Société de transport de Montréal a en effet entrepris de déplacer le garage souterrain de la station Côte-Vertu, où sont stationnées les rames de métro. On a creusé sur une distance de 1,5 kilomètre pour aménager cette infrastructure. Il ne reste qu’environ 1 kilomètre à creuser pour gagner la gare Bois-Franc, note M. DeSousa.

Avec un investissement nettement moins important que celui que nécessiterait, par exemple, le prolongement de la ligne bleue, Québec pourrait améliorer de manière considérable la fluidité des déplacements sur l’île, selon le maire d’arrondissement.

« Sur tous les critères que je peux imaginer – le développement, le potentiel de développement, la desserte régionale, l’intermodalité, le coût par kilomètre et l’achalandage par kilomètre –, pour le gouvernement, c’est gagnant-gagnant-gagnant. »

— Alan DeSousa, maire de Saint-Laurent

Au conseil général de la Coalition avenir Québec la fin de semaine dernière, François Legault a laissé entrevoir des investissements sans précédent dans les transports collectifs pour réduire l’utilisation du pétrole.

Le premier ministre a alors énuméré sept projets qu’il souhaite réaliser, notamment l’expansion du REM et le prolongement de la ligne bleue. Mais il n’a fait aucune mention de la ligne orange, de la « ligne rose » souhaitée par la mairesse Valérie Plante, ni de la ligne jaune, à Longueuil, un projet pour lequel il avait pourtant déjà montré de l’intérêt.

L’opposition sceptique

Les partis de l’opposition se sont dits favorables au prolongement de la ligne orange, hier. Mais ils doutent de la volonté politique de M. Legault d’aller de l’avant.

Le député du Parti libéral Gaétan Barrette estime que le gouvernement multiplie les promesses sans prévoir de fonds pour les réaliser.

« Si on annonce un projet de transports en commun sans mettre d’échéancier ou de bureau de projet, c’est parce que le cadre financier ne marche pas. On est dans une espèce de spectacle de relations publiques bien construit de la part de la CAQ où il y a beaucoup de mots et peu de gestes. »

— Gaétan Barrette, député du Parti libéral

La co-porte-parole de Québec solidaire, Manon Massé, est favorable au développement des transports collectifs à Montréal. Mais selon elle, le prolongement de la ligne orange à l’ouest ne réglera pas les problèmes de congestion sur le tronçon est.

« Ça me rend un peu dingue de penser que, parce qu’un gros centre d’achat lève le petit doigt, le gouvernement décide de mettre le pied sur l’accélérateur pour regarder le projet, a-t-elle dit. Chaque matin, il y a du monde sur la ligne orange qui vont travailler, qui sont aux études, qui amènent leurs enfants à la garderie, et ça fait des années que cette ligne est saturée. »

Financement du tramway à Québec

Aucun compromis au détriment de Montréal, prévient Plante

Valérie Plante n’entend faire aucun compromis quant à l’utilisation des fonds fédéraux pour financer le projet de tramway à Québec. La réalisation de ce dernier ne doit pas se faire au détriment des projets de transports collectifs de la région métropolitaine, de leur financement, ni du calendrier de réalisation, a prévenu la mairesse de Montréal.

À la sortie de la réunion hebdomadaire du comité exécutif, Valérie Plante a d’abord affirmé être « une joueuse d’équipe » et elle s’est dite prête à trouver une solution afin de financer le tramway du maire de Québec, Régis Labeaume. « Ceci étant dit, il ne faut pas que ça se fasse au détriment des Montréalais parce qu’en ce moment, je sais quoi faire avec les 800 millions. J’ai assez de projets de transports collectifs pour les utiliser entièrement », a-t-elle déclaré.

Obtenir « un très bon deal » avec le gouvernement de François Legault est la condition sine qua non de Mme Plante. « Il n’y aura pas de compromis de ma part. Le programme fédéral comporte des critères qui correspondent à la réalité montréalaise et c’est tout à fait légitime puisque nous sommes la métropole du Québec. »

« Si Québec est prêt à nous faire une offre intéressante, on va être ouvert. Mais pour l’instant, il ne faut pas déshabiller Jean pour habiller Jacques. »

— Valérie Plante, mairesse de Montréal

Le gouvernement du Canada a mis à la disposition du monde municipal une enveloppe de 5,2 milliards destinée aux transports collectifs. La distribution de ces fonds se fait en fonction de normes strictes, dont l’achalandage des transports en commun. Ces critères correspondent aux besoins de Montréal, souligne Mme Plante, qui rappelle que la moitié de la population du Québec se trouve dans la grande région métropolitaine.

Pas de perte, dit Legault

Or, le gouvernement Legault veut convaincre l’administration montréalaise de faire preuve de souplesse. Il s’agit de permettre qu’Ottawa puise 800 millions dans ce fonds, portant ainsi à 1,2 milliard la participation fédérale au projet du maire Labeaume. Le projet de tramway à Québec nécessite des investissements totalisant 3 milliards. Le gouvernement Legault miserait sur une annonce dès la mi-juin dans le contexte où le gouvernement fédéral sera plongé dans les élections générales l’automne prochain.

« Les gens de Montréal ne vont rien perdre », a promis hier à Québec le premier ministre François Legault. Ce dernier, qui a parlé avec la mairesse Plante en matinée, affirme qu’il y a « des projets qui sont plus proches du déboursé que d’autres » et que le gouvernement ne veut tout simplement pas « laisser de l’argent sur la table ».

« Ce dont on veut s’assurer, c’est d’utiliser le 5,2 milliards le plus rapidement possible. »

— François Legaut, premier ministre du Québec

Selon la mairesse de Montréal, il n’y a aucune entente à portée de main, comme le laissait entendre hier le gouvernement Legault. « On n’est pas là du tout, du tout », a-t-elle dit en éclatant de son rire caractéristique. « Si, et je dis bien si, il y avait une entente avec le gouvernement du Québec, il faudra que ce soit une offre qui n’a aucun impact sur les projets, sur les calendriers de réalisation, ni le financement. Ça ne se fera pas à coût nul », a-t-elle affirmé.

« Si le gouvernement est sérieux et souhaite nous faire une proposition intéressante pour les Montréalais, je vais l’étudier avec attention », a ajouté la mairesse, qui a rappelé son devoir à l’égard des Montréalais : « Je dois à ma population de la soutenir en matière de transports collectifs. Les besoins sont immenses. »

De son côté, le chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville, Lionel Perez, se dit inquiet de la contradiction entre ce que disent le gouvernement du Québec, d’une part, et l’administration Plante, d’autre part. M. Perez craint que les Montréalais perdent 800 millions d’investissements dans les transports collectifs. « Il y a de l’inconnu. De plus en plus, la mairesse semble négocier sur la place publique pour cet enjeu-là. Elle ne se gêne pas pour envoyer des flèches au gouvernement. Je ne pense pas que ce soit une façon de traiter son gouvernement, dont on a besoin pour différents dossiers. Le temps nous dira ce qu’elle aura dû abandonner », a commenté M. Perez.

— Avec la collaboration d’Hugo Pilon-Larose, La Presse

Un projet de loi pour permettre les expropriations

Le ministre des Transports, François Bonnardel, dépose aujourd’hui le projet de loi donnant les assises juridiques à la Ville de Québec pour aller de l’avant avec son projet de tramway, une facture de plus de 3 milliards. En gros, le projet de loi transférera de la société de transport municipale à la Ville des pouvoirs, notamment la capacité d’exproprier les terrains et bâtiments sur le tracé du projet. Le gouvernement Couillard avait fait de même pour la Caisse de dépôt et placement du Québec afin de donner le feu vert au projet du Réseau express métropolitain.

— Denis Lessard, La Presse

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