COP15 sur la biodiversité

Les villes réclament des ressources pour protéger la nature

Des réformes s’imposent pour que les villes et autres gouvernements infranationaux puissent mieux contrer la destruction de la nature sur leurs territoires, ont-ils plaidé dimanche en marge de la 15conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15), à Montréal.

« Les villes et les gouvernements infranationaux veulent en faire plus, et pour ça, il faut avoir des ressources et qu’on soit consultés », a lancé la mairesse de Montréal, Valérie Plante, à l’ouverture du 7sommet du Conseil international pour les initiatives écologiques locales (ICLEI, selon l’acronyme anglais), qui se tient au Palais des congrès dimanche et lundi.

C’est le message que les quelque 2500 gouvernements locaux membres de l’organisation entendent livrer d’une seule voix aux représentants des gouvernements nationaux réunis à la COP15, ainsi qu’au Forum économique mondial de Davos, en janvier.

« Notre ambition doit être globale, mais nos actions doivent être locales », a déclaré Martine Biron, ministre des Relations internationales et de la Francophonie du Québec, qui est membre de l’ICLEI, soulignant que les gouvernements infranationaux et les villes sont « au front » pour lutter contre le déclin de la biodiversité.

Les actions de ces gouvernements de proximité ont des effets directs sur la protection de la nature, ce qui rend leur place « autour de la table » essentielle, a poursuivi la mairesse Plante, appelant à la combinaison des efforts entre les gouvernements nationaux et infranationaux.

« Ensemble, on peut aller plus vite et plus loin pour protéger la biodiversité. »

— Valérie Plante, mairesse de Montréal

Trop souvent, le financement des solutions provient des gouvernements nationaux, qui le distribuent ensuite aux gouvernements infranationaux, déplore l’ICLEI, qui plaide pour une réforme de l’« infrastructure financière existante » pour permettre un meilleur accès des villes et des régions au financement de solutions fondées sur la nature.

« Nous appelons la communauté financière à créer de nouveaux instruments financiers directement accessibles aux gouvernements locaux et infranationaux qui permettront une intégration rapide de la nature dans la planification, la mise en œuvre et la gestion des interventions dans nos villes », a notamment déclaré une coalition de maires et de mairesses dans un appel lancé en amont de la rencontre.

Les entreprises, notamment celles qui possèdent des données sur les questions environnementales, sont aussi invitées à collaborer avec les gouvernements infranationaux.

« Nous demandons au secteur privé d’être notre partenaire en matière de connaissances, d’actions et de financement afin de s’orienter vers des solutions fondées sur la nature pour trouver des solutions aux enjeux en milieu urbain », plaident ces maires et mairesses, dont ceux et celles d’Athènes, Austin, Barranquilla, Kigali, Melbourne, Paris, São Paulo et Montréal.

Des actions « insuffisantes », dit Ghislain Picard

L’action des gouvernements de proximité est essentielle parce que l’exploitation non durable des ressources et des territoires continue d’accentuer le déclin de la biodiversité, est venu rappeler à l’auditoire Ghislain Picard, président de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, dont les territoires « sont gérés par d’autres », a-t-il rappelé au passage.

« Les actions des gouvernements sont insuffisantes », a-t-il déploré, citant l’exemple du « minashkuau-atik», le caribou forestier en langue innue.

« C’est un animal sacré pour mon peuple, le peuple innu », a-t-il rappelé.

« Protéger la biodiversité, c’est aussi la survie de nos peuples dont il est question. »

— Ghislain Picard, président de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador

Les Hommes se sont isolés de la nature en se plaçant au-dessus d’elle, au sommet d’une pyramide insoutenable, a quant à lui déclaré le célèbre biologiste et militant écologiste David Suzuki.

« On ne fabrique pas d’air frais, on ne fabrique pas d’eau pure, de sols riches ; la nature le fait, a-t-il dit. Nous faisons partie de la nature et ce qu’on lui fait, nous le faisons directement à nous-mêmes. »

COP15 sur la biodiversité

Les Canadiens très préoccupés par le sort de la nature

Une forte majorité de la population canadienne s’inquiète du déclin de la biodiversité et souhaite des actions immédiates pour le contrer, d’après un sondage dévoilé dimanche.

La disparition des espèces animales et végétales inquiète 87 % des Canadiens et 83 % des Québécois, révèle l’enquête réalisée par Ipsos pour l’organisme Conservation de la nature Canada (CNC).

Un cinquième des espèces sauvages fauniques et floristiques répertoriées au Canada sont menacées de disparition, indiquait un rapport du gouvernement fédéral publié à la fin de novembre.

La société dans son ensemble, des gouvernements aux entreprises en passant par les individus, n’agit pas assez rapidement pour s’attaquer au problème, croient 81 % des Canadiens – le résultat est identique pour les répondants du Québec.

Le sondage démontre par ailleurs que 80 % des Canadiens et 77 % des Québécois s’inquiètent du fait que les générations futures n’auront pas accès à la nature à proximité de chez eux.

Il est « encourageant » de constater que les Canadiens sont préoccupés par le déclin de la biodiversité, estime Catherine Grenier, présidente et cheffe de la direction de CNC.

L’organisation y voit « un véritable cri de ralliement » à l’intention des délégués réunis à la COP15 pour les inciter à adopter un cadre mondial audacieux et concret pour préserver et restaurer la nature, estime CNC.

Changements climatiques

Davantage de Québécois que de Canadiens, 75 % contre 63 %, croient que la conservation de la nature est un outil pour combattre les changements climatiques.

Une majorité de répondants (81 % au Québec et 80 % au Canada) se disent d’ailleurs inquiets ou très inquiets de l’impact des changements climatiques et dit avoir remarqué une hausse du nombre d’inondations, de tornades et de sécheresses au cours des dernières années (85 % au Québec et 84 % au Canada).

C’est en Colombie-Britannique que sont réclamées le plus vigoureusement des actions urgentes en réponse aux changements climatiques, avec 93 % des répondants estimant qu’il faut agir plus rapidement pour en contrer les effets ; le Québec suit à 90 %.

« Nous sommes aujourd’hui confrontés, en tant que société, à deux immenses défis : le déclin de la nature et les changements climatiques. Quand l’un de ces phénomènes s’accentue, l’autre aussi. Ni l’un ni l’autre ne pourront être résolus sans que soit conservée la nature. »

— Catherine Grenier, présidente et cheffe de la direction de Conservation de la nature Canada

Le sondage a été mené en ligne entre le 23 et le 28 novembre 2022 auprès de 2006 personnes de 18 ans et plus au pays, dont 524 du Québec, avec un niveau de précision de plus ou moins 2,5 points de pourcentage, 19 fois sur 20.

CNC est un organisme non gouvernemental voué à la protection de la nature qui revendique la restauration ou la conservation au pays depuis 1962 de plus de 150 000 km2 de milieux naturels, ce qui correspond à plus de deux fois la superficie du Nouveau-Brunswick.

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