L’ÉTAT DU HOCKEY AU QUÉBEC

Un outil personnalisé pour suivre les joueurs

Sept équipes de la Ligue midget AAA et trois autres de la Ligue de hockey junior majeur du Québec ont participé cette année à un projet pilote afin de tester le nouveau Programme de développement personnalisé (PDP). Cet instrument informatisé, qualifié de « succès extraordinaire » par le commissaire de la LHJMQ, Gilles Courteau, vise à améliorer le suivi individuel des jeunes joueurs de l’élite.

Étant donné que le Programme est encore en période de rodage – il est terminé à 90 % –, la LHJMQ ne l’a pas encore présenté aux autres circuits juniors canadiens. Mais La Presse a pu le survoler en compagnie de Georges Larivière, maître d’œuvre du PDP.

POURQUOI ?

La démarche du Programme de développement personnalisé a été entamée dans la foulée du Sommet québécois du hockey. On relevait à cette occasion que dans le réseau compétition, on travaillait souvent plus à la formation d’une équipe qu’au développement du joueur. Or, le PDP permet de compenser sur ce plan-là.

« L’impact concret de ce Programme, ça va être de pouvoir déterminer exactement à qui on a affaire et de voir la progression d’un joueur d’une année à l’autre, soutient Georges Larivière. On mesure la vitesse d’un joueur midget et deux ans plus tard, on voit où il en est dans le junior majeur. S’il n’a pas progressé, on peut regarder si c’est une question de technique ou de condition physique. »

COMMENT ÇA FONCTIONNE ?

Chaque joueur a un fichier dans lequel on fait un suivi sur trois grands volets : sa santé, ses performances sportives et l’aspect scolaire. L’entraîneur-chef est chargé de remplir le questionnaire trois fois par saison – au début, au milieu et à la fin – tandis que le conseiller pédagogique attitré à chaque équipe supervise les informations à caractère académique.

Pour chaque article nécessitant une évaluation, l’entraîneur (ou la personne qu’il aura mandatée) donne au joueur une note de 1 à 4 correspondant à un code de couleurs. Lorsque les informations de tous les joueurs d’une équipe sont superposées, on peut voir en un coup d’œil si l’équipe connaît des difficultés sur le plan de l’autonomie ou si elle excelle sur le plan de l’éthique de travail.

La grille couvre beaucoup de terrain, car elle évalue autant la compréhension du jeu que la relation avec ses coéquipiers, la qualité du sommeil ou le comportement en classe.

LA SANTÉ

L’historique de blessures, les visites chez le médecin, même un changement de coach ou de préparateur physique ; tout est répertorié. Tous les thérapeutes de la LHJMQ et du midget AAA envoient désormais des fiches à leur ligue de même qu’à Hockey Canada. En centralisant l’information, on pourra enfin récolter des données sur les blessures et identifier des tendances. « Les commotions sont la préoccupation principale, mais d’autres types de blessures vont pouvoir être suivis, note Georges Larivière. Ça va pouvoir nous aider à trouver des façons de les diminuer ou de les enrayer par des règlements ou grâce à la préparation physique… On pourra se demander si, par exemple, il y a plus de blessures qui surviennent après six heures d’autobus que lors des matchs à domicile. »

LA PERFORMANCE SPORTIVE

Toutes les composantes de la performance sont passées au peigne fin : attitude psychologique, résultats de tests de condition physique, habiletés sur glace, compréhension du match, évaluation du coach et autoévaluation.

LE VOLET SCOLAIRE

Dans la LHJMQ, les 18 conseillers pédagogiques ont accès au Programme pour documenter l’inscription des joueurs à l’école, leurs résultats scolaires et l’évaluation de leur attitude à l’égard des études (retard en classe, dans les travaux, etc.) « Si un joueur se comporte mal à l’école, c’est important que l’équipe le sache, insiste Georges Larivière. Ça permet d’anticiper certaines choses au lieu d’être en réaction. »

QUI A ACCÈS AU DOSSIER ?

Le PDP est en quelque sorte le livre de bord de l’entraîneur-chef auquel un thérapeute ou un préparateur physique, par exemple, peuvent ajouter des commentaires. Mais les données ne sont pas accessibles aux autres équipes.

Dès qu’un membre du personnel quitte l’équipe, il cesse d’avoir accès au Programme. Le dossier informatisé reste donc en inventaire pour les nouveaux dirigeants.

Une fiche remplie dans le midget AAA ne peut être consultée par les équipes du junior majeur tant que le joueur n’a pas été repêché. Par la suite le dossier est transféré à son organisation junior. Même principe lorsqu’une équipe de la LNH aura réclamé un joueur du circuit Courteau : ce n’est qu’après sa sélection qu’elle pourra consulter les données. Les règles de confidentialité sont très strictes.

L’AVENIR

« Quand la LHJMQ aura récolté suffisamment de données, elle pourra avoir des comparables, explique Georges Larivière. Elle pourra non seulement comparer le joueur avec la moyenne de l’équipe, mais comparer l’équipe avec la moyenne de la ligue. Un coach pourra comparer son défenseur de 17 ans avec les autres joueurs du même âge et de la même position. Ce sera intéressant pour eux de les suivre.

« Et dans deux ou trois ans, on pourra avoir des profils de joueurs. On pourrait tirer des enseignements et savoir dans quelle direction le hockey évolue. En tout cas, on ne se laissera pas arrêter par le fait que deux ou trois équipes ne veulent pas le faire ou ont des réserves. Ce n’est pas parce que quelqu’un ne veut pas participer que ce n’est pas bon ! »

Georges Larivière espère que toutes les équipes du Midget AAA seront partie prenante du projet dès l’an prochain. Dans le circuit Courteau, toutes les équipes participent déjà aux volets santé et scolaire, mais certaines se font tirer l’oreille en ce qui concerne le volet sportif.

« Je ne pense pas que la ligue le rende obligatoire, estime M. Larivière. Ce n’est pas ma préoccupation. Ce serait bien que tout le monde y adhère, mais j’aime autant que le monde soit convaincu [en le faisant]. »

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