Sommet sur le climat

La Chine et les États-Unis au cœur de la solution à l’urgence climatique

À la fin mars, le président Biden a invité 40 dirigeants du monde à un sommet virtuel sur le climat, intitulé Leaders Summit on Climate, qui se tiendra les 22-23 avril, et auquel est convié le Canada et son premier ministre Justin Trudeau.

Parmi les invités, un pays avec lequel les États-Unis entretiennent présentement une relation tendue : la Chine de Xi Jinping. C’est pourtant ces deux pays qui détiennent la clé pour que notre planète fasse des progrès significatifs face aux changements climatiques.

Qu’on en juge : la Chine et les États-Unis contribuent pour presque la moitié des émissions annuelles de dioxyde de carbone (CO2), soit 16 milliards de tonnes sur des émissions annuelles mondiales de plus de 36 milliards (données de 2019).

Si les États-Unis ont été, et de loin, les plus grands émetteurs historiques, leurs émissions annuelles se sont stabilisées depuis quelques années, notamment grâce au remplacement graduel (non encore achevé) du charbon par le gaz.

À l’inverse, devant la croissance économique phénoménale de la Chine depuis 20 ans, les émissions affichées par ce pays sont en forte hausse. En 2006, les émissions américaines et chinoises provenant de leur utilisation d’énergies fossiles étaient presque similaires, à 6 milliards équivalent CO2.

Mais les émissions chinoises sont passées depuis à plus de 10 milliards, alors que celles des États-Unis ont légèrement fléchi. Ce n’est pas que la Chine soit entièrement fautive ou négligente. Ce pays a pris l’an dernier un engagement de carboneutralité pour 2060, et mis en place un système d’échanges de droits d’émission pour limiter et réduire les gaz à effet de serre (GES).

La Chine est aussi devenue depuis une décennie le leader mondial dans la pénétration des véhicules électriques et des énergies renouvelables sur son territoire. Ainsi, seulement en 2020, 1,3 million de voitures électriques ont été vendues en Chine, avec des prévisions de presque 2 millions en 2021.

En matière de production d’électricité, la Chine a installé l’an dernier pour pas moins de 72 000 mégawatts (MW) d’énergie éolienne, un record annuel et le double de l’année précédente ; plus de 40 000 MW d’énergie solaire ; et 12 000 MW d’énergie hydroélectrique. Des chiffres franchement impressionnants, quand on les compare avec ceux auxquels on est habitués ici (le réseau d’Hydro-Québec s’appuie en gros sur 41 000 MW d’énergie hydroélectrique et éolienne).

Malheureusement, la Chine entend encore exploiter son charbon, la ressource fossile qui émet le plus de GES, car elle en dispose en abondance sur son territoire, ce qui contrebalance en partie sa forte dépendance en approvisionnement pétrolier et gazier. Plus de 38 000 MW de centrales au charbon ont été ajoutés au réseau en 2020, soit trois fois la capacité installée ailleurs dans le monde. Bref, le compromis entre la soif de développement économique et d’influence et les impacts climatiques et écologiques est en équilibre instable dans ce pays.

Mais aux États-Unis aussi, comme on l’a vu avec la politisation du débat sur les enjeux climatiques et les revirements que cela suscite d’une administration à l’autre. Si l’administration Trump a imprimé un ralentissement majeur dans les efforts du gouvernement fédéral américain pour faire face à l’urgence climatique, l’arrivée du président Biden a complètement changé la donne : l’enjeu du climat est dorénavant placé au cœur des priorités américaines.

Les États-Unis sont donc retournés dans l’Accord de Paris signé en 2015. Concrètement, cela veut dire que Washington va préparer ses cibles de réduction des émissions de GES, connues comme les contributions déterminées au niveau national, que tous les pays signataires doivent produire.

Mais pour que des progrès encore plus significatifs voient le jour, qu’un momentum s’établisse en faveur du climat, il faut espérer que les Américains et les Chinois collaborent, même minimalement.

Malgré l’absence de confiance qui caractérise la relation actuelle entre ces deux puissances, l’enjeu du climat en est un où elles peuvent joindre leurs efforts, pressées par un intérêt commun. On pense par exemple à une coopération technologique et en recherche et développement dans des secteurs difficiles à décarboner, comme le transport aérien et maritime, et le secteur industriel (cimenterie, sidérurgie).

Par leur influence économique et politique considérable à l’échelle mondial, tout progrès dans cette collaboration bilatérale sur le front du climat ne manquera pas d’avoir une portée considérable, de produire un élan favorable auprès de toute la communauté internationale.

Une esquisse de feuille de route commune à l’issue du sommet du 22-23 avril ou, plus réalistement, dans le cadre de la prochaine Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP 26), en novembre à Glasgow, serait un pas encourageant.

On espère ardemment que Pékin et Washington seront à la hauteur de cette noble ambition.

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