Un changement de cap s’impose dans les services en santé mentale

La pandémie de COVID-19 a mis en lumière les déficiences de notre système de services en santé mentale. Grandement négligé, ce système subit aujourd’hui le ressac d’années d’indifférence et de laisser-faire.

La pandémie a démontré qu’il est plus que jamais nécessaire de développer le soutien et les services de santé mentale dans la communauté. La santé mentale est une responsabilité qui nécessite un financement adéquat de l’État québécois, mais celle-ci est trop peu prise en compte, ne totalisant que 6,7 % des dépenses en santé et services sociaux.

La santé mentale de la population a été mise à rude épreuve durant les 18 derniers mois, surtout celle des personnes vulnérables. Ces derniers mois ont permis de constater, entre autres, que les jeunes sont aux prises avec une montée inquiétante de l’anxiété et de la dépression, que l’on observe une hausse généralisée des besoins en santé mentale tandis qu’il faut attendre des mois avant d’obtenir des services psychosociaux.

Devant ce constat d’échec, la question demeure : à quand le changement dans notre système de services en santé mentale ? Le prochain Plan d’action interministériel en santé mentale annoncé par le ministre Lionel Carmant pour la fin de 2021 sera-t-il la réponse attendue ?

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) vient de publier un document d’orientations relatives aux services de santé mentale communautaire. Le document propose des solutions pour s’aligner avec les standards internationaux en matière de droits de la personne et il remet en question l’hégémonie du modèle biomédical en santé mentale.

L’OMS démontre que les services de soutien communautaire favorisent l’inclusion sociale des personnes, soutiennent leur participation citoyenne, en plus de sortir la santé mentale de la dépendance aux institutions psychiatriques.

L’OMS soutient qu’il est essentiel d’agir sur les déterminants sociaux de la santé mentale. Au Québec, le manque d’accès au logement, à l’éducation, à l’emploi et à la sécurité du revenu auquel font face les personnes qui ont un problème de santé mentale bafoue leurs droits fondamentaux et nuit à leur rétablissement.

Les hôpitaux accaparent plus de 78 % des dépenses en santé mentale du ministère de la Santé et des Services sociaux alors que les ressources communautaires et de première ligne peinent à répondre aux besoins des Québécoises et des Québécois. Pour leur part, les organismes communautaires en santé mentale ne reçoivent que 8,2 % du budget de la santé mentale, et ce pourcentage stagne depuis plus d’une décennie.

Au Québec, il existe plus de 450 organismes communautaires en santé mentale. Par leurs interventions, ces organismes valorisent une approche globale fondée sur le rétablissement, le soutien dans la communauté et la primauté de la personne. Le Réseau communautaire en santé mentale a tenu des consultations en 2019 qui ont mené à l’adoption de 25 propositions pour un virage communautaire en santé mentale, qui rejoignent en tout point les orientations proposées par l’OMS.

Pour réussir le changement au Québec, il est essentiel de rallier le secteur de la santé, des services sociaux et le milieu communautaire afin de promouvoir une approche globale axée sur le rétablissement qui favorise l’inclusion dans la communauté et la protection des droits fondamentaux des personnes.

Avec le prochain Plan d’action interministériel en santé mentale, nous espérons que l’État proposera des orientations innovantes, inspirées des pratiques promues par l’OMS. Rappelons que des initiatives riches et inspirantes, issues du mouvement communautaire québécois en santé mentale, existent déjà depuis longtemps, et qu’il n’est pas nécessaire de réinventer la roue pour tout repenser le système.

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