Rencontres virtuelles pour futures mères

L’accouchement, l’allaitement, la sortie de l’hôpital. Nombreuses sont les causes de stress pour les femmes enceintes ou celles qui viennent d’accoucher. Des inquiétudes amplifiées par la crise de la COVID-19. Heureusement, des organismes offrent des rencontres prénatales et des haltes d’allaitement virtuelles.

En temps normal, il y a de grandes sources de stress reliées à une maternité éminente comme l’allaitement et l’accouchement. Et il y a de plus petites inquiétudes comme la première sortie au restaurant, le premier cours de cardiopoussette ou le retour dans ses jeans d’antan.

Avec la crise de la COVID-19, les femmes enceintes ont des interrogations et des dilemmes incommensurablement plus grands.

Comme toute mère qui donnera naissance à son deuxième enfant, Ariane Poitras doit pouvoir compter sur quelqu’un qui s’occupera de sa fille de 3 ans lorsqu’elle accouchera. Or, le confinement complique grandement les choses.

Ariane ne veut pas accoucher seule à l’hôpital Sainte-Justine. Son médecin lui a aussi laissé comprendre que le personnel avait besoin des « bras » de son conjoint.

« Je prends la décision que mon chum sera avec moi pendant l’accouchement, donc ma mère va s’occuper de ma fille, indique Ariane. Mais disons que mon chum et moi attrapons la COVID-19, il faut éviter de voir ma mère… Je trouve que c’est une situation déchirante. Ma mère a plus de 60 ans. Elle est en super bonne santé, elle veut vraiment m’aider, mais il reste que c’est jouer avec le feu. »

L’accouchement d’Ariane est prévu dans trois semaines. Elle ne peut pas se reposer comme elle l’aurait fait normalement car sa fille ne va pas à la garderie. Disons qu’elle est loin du plan initial qui consistait à « aller bruncher avec [ses] amis et relaxer », dit-elle avec ironie.

Il n’y a aucun article sur le site Naître et grandir – la bible des nouveaux parents – sur le fait d’accueillir un deuxième enfant en confinement. « Même si la garderie de ma fille rouvre, je fais quoi : je l’envoie et je prends le risque d’attraper la COVID-19 avec un nourrisson ? »

« L’accouchement ne me stresse pas, mais l’après me stresse beaucoup, dit-elle. À l’hôpital ou en maison de naissance, tu es 100 % encadrée. Mais après, tu es laissée seule à toi-même. »

C’est sans compter sa belle-famille américaine qui vit en Nouvelle-Angleterre et qui ne pourra pas voir le nouveau-né avant des mois. « Ma belle-sœur a accouché et ses parents qui habitent à cinq minutes en auto n’ont pas encore vu le bébé. »

Des rencontres virtuelles

Beaucoup de futures et nouvelles mères fréquentent les différents Centres de ressources périnatales (CRP) du Québec. Si leurs bureaux sont fermés, les activités de beaucoup de centres (dont Espace Famille Villeray et Le Berceau) se poursuivent de façon virtuelle.

Dès mardi, des femmes enceintes pourront assister à une série de rencontres prénatales virtuelles données par Les relevailles de Montréal. L’organisme offre aussi sur Zoom des ateliers de remise en forme, d’allaitement et même de massage pour bébé.

« Nous avons réorganisé nos services pour continuer notre mission. Nous faisons beaucoup de soutien téléphonique. »

— Josée Lapratte

Le confinement imposé par la crise du coronavirus accentue la solitude – voire la détresse psychologique – qui habite de nombreuses mères qui viennent d’accoucher, souligne-t-elle. Cela chamboule aussi les plans de naissance des femmes enceintes.

« Rien n’est plus comme avant, et rien n’est plus comme elles l’avaient envisagé et souhaité, dit Mme Lapratte. Elles ne peuvent pas avoir de soutien à domicile de leurs proches ou d’une ressource comme la nôtre pour leur prêter main-forte, les soutenir dans leur nouveau rôle et briser leur isolement. »

Le matin de notre entrevue, Mme Lapratte a reçu deux appels de femmes enceintes inquiètes. « Une mère était angoissée car elle ne se sentait pas prête pour son accouchement. Les magasins sont fermés et il lui manque beaucoup d’objets et de meubles dans la chambre du bébé. »

Les visites à domicile d’infirmières demeurent

Heureusement, Mme Lapratte a eu la confirmation du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Est-de-l’Île-de-Montréal (CIUSSS-EMTL) que des infirmières continuent de rendre visite aux nouveaux parents après leur retour de l’hôpital ou de la maison de naissance. La même directive est mise en place partout au Québec, a confirmé le ministère de la Santé et des Services sociaux avec La Presse. « Toutes les visites à domicile pour nouveau-nés sont maintenues, et ce, dans les mêmes délais. Il y a également de la collecte de données par téléphone, mais l’infirmière se déplace toujours », indique-t-elle.

Emmanuelle Gilbert a accouché le 4 mars dernier avant le début du confinement. « C’est mon premier bébé, donc il y avait des incertitudes, mais tout se passe bien », dit-elle.

Mais elle aimerait pouvoir aller faire peser son bébé toutes les semaines au CLSC comme en temps normal. Elle aurait aussi voulu voir un médecin comme prévu – et non lui parler au téléphone – quand sa fille avait des sécrétions dans la gorge. « Nous nous sommes parfois sentis dans le néant. Je n’ose pas imaginer le stress pour les parents dont le bébé a des problèmes plus graves », dit-elle.

On dit beaucoup aux mères de se préparer du mieux qu’elles le peuvent à la naissance de leur bébé. Or, c’était impossible de se préparer à la crise du coronavirus.

Avant le confinement, Emmanuelle voulait vivre son retour à l’hôpital de façon intime à trois avec son conjoint. Mais elle n’en demandait pas tant…

« Mes parents n’ont pas encore vu le bébé. Ils habitent à plusieurs heures de route de chez moi. On se parle sur FaceTime. Hier, ma mère était triste. Elle me disait qu’elle avait vu une vidéo de grands-parents qui regardaient leur petit-fils à travers une fenêtre », raconte-t-elle.

« Quand c’est rendu que tu envies ça… » 

Emmanuelle retire tout de même du positif du confinement. Elle profite pleinement de la « bulle » des premières semaines. « Moi qui ai une vie sociale bien active, tout cela m’enlève de la pression. C’est le côté positif que j’en retire… Le slow living à fond. »

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