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Les mesures du CHUM pour affronter la pandémie, les ratés de la nouvelle ligne d’Info-Santé, les restrictions des visites dans les résidences pour aînés : survol des nouvelles du jour sur la réponse du réseau de la santé à la propagation de la COVID-19

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Le CHUM est prêt à faire face à la pandémie

Cent lits pourront être utilisés à l’ancien Hôtel-Dieu si le réseau de la santé est débordé

Le président-directeur général du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), Fabrice Brunet, assure que son établissement est prêt à faire face à la pandémie de la COVID-19. Si le réseau de la santé était submergé de cas, une centaine de lits de l’ancien Hôtel-Dieu pourraient être utilisés, a expliqué M. Brunet en entrevue avec La Presse.

Des patients traités au CHUM, mais qui n’auraient pas la COVID-19, seraient alors transférés dans les locaux de l’ancien hôpital. Ceux atteints de la COVID-19 seraient quant à eux soignés dans le nouvel établissement de la rue Saint-Denis.

Les leçons du SRAS

Fabrice Brunet était chef du département des soins intensifs à l’hôpital St. Michael’s, hôpital universitaire de Toronto, en 2003 quand est survenue l’éclosion de SRAS.

« J’ai beaucoup appris de cette expérience », dit le Dr Brunet, maintenant PDG du CHUM.

Tout comme dans le cas de la COVID-19, le SRAS est arrivé au Canada par des voyageurs. Ils ont d’abord été soignés dans d’autres hôpitaux universitaires de Toronto.

Mais le Dr Brunet et son équipe de l’hôpital St. Michael’s ont dû augmenter leurs activités pour traiter plus de patients complexes, non atteints du SRAS.

« St. Michael’s avait été mis un peu en réserve surtout parce que les autres hôpitaux universitaires ne pouvaient plus assurer très rapidement les soins tertiaires et quaternaires aux malades », raconte-t-il.

Le Dr Brunet et son équipe ont dû augmenter leurs activités pour absorber les cas de traumatologie, de neurochirurgie, de chirurgie cardiaque et de maladies liées au cancer que les autres hôpitaux ne pouvaient plus accueillir. Le même rôle attend le CHUM avec la COVID-19 tant que le nombre de cas restera soutenable.

La mission est importante, selon le Dr Brunet. Car après le SRAS, un rapport a démontré que les patients non infectés par le virus, mais atteints d’autres maladies graves, avaient été moins bien traités pendant l’épidémie.

L’expérience du SRAS fait dire au Dr Brunet qu’il peut être périlleux de « centrer notre attention sur un seul problème ». « Si les gens meurent d’infarctus ou de tumeurs cérébrales ou d’AVC parce qu’on s’est tous concentrés sur le virus […], on aura mal répondu », dit-il.

Éviter la pénurie de personnel

Le Dr Brunet salue la décision des autorités de santé publique de fermer les écoles et d’adopter des mesures de confinement. Mais il reconnaît que le tout aura des répercussions sur le personnel. De nombreuses infirmières et de nombreux médecins n’entreront pas au boulot. « Il va arriver un moment où on va avoir un problème de personnel, oui », dit-il.

Mais en prévision de cette éventualité, le Dr Brunet dit avoir mis en place un service efficace de télémédecine et de téléconsultation.

Maints patients, avant de se rendre à l’hôpital, pourront en bénéficier. Il s’agirait d’une sorte de « prétriage ».

« Nos ressources en quarantaine ou à la maison pourront prêter main-forte pour ces consultations. »

— Fabrice Brunet, président-directeur général du CHUM 

Par exemple, un patient de retour à la maison après avoir subi une opération cardiaque qui éprouverait des palpitations ou des problèmes avec sa cicatrice sera d’abord interrogé par télémédecine. On le dirigera ensuite vers le bon service.

« Quand nos ressources sont en quarantaine et ont un état de santé suffisamment bon, elles peuvent prêter main-forte », dit le Dr Brunet. Il explique d’ailleurs que le pneumologue du CHUM dont le test à la COVID-19 s’est révélé positif jeudi fait actuellement de la télémédecine. 

« Il donne des consultations par télémédecine de son domicile, où il est en quarantaine. Il continue à servir ses patients. Il nous aide dans la prise en charge et n’expose pas les patients à un risque quelconque », dit le Dr Brunet.

Grand stress

En 2003, à Toronto, le nombre de cas de SRAS a augmenté rapidement, et l’hôpital St. Michael’s a finalement dû soigner des cas. Le Dr Brunet, qui est formé dans les spécialités de cardiologie, de soins intensifs et d’urgence, l’a lui-même fait. Il se souvient que le tout était « très fatigant et très stressant ». Mais il se souvient que le personnel était prêt à affronter la situation. « On n’a eu aucun cas de contamination au sein du personnel », dit-il.

Si le nombre de cas de COVID-19 se multipliait au Québec, le CHUM pourrait devoir prendre en charge des patients. L’Hôtel-Dieu pourrait être mis à contribution. « On est bien préparés. Maintenant, si l’ampleur de la crise est telle qu’on arrive dans des situations catastrophiques, bien là, on fera au mieux. […] Mais on est prêts », assure-t-il.

Faux départ pour la nouvelle ligne d’Info-Santé

« C’est la maison des fous »

Le premier ministre du Québec, François Legault, a demandé vendredi aux Québécois de ne plus appeler la ligne 811, point de chute des citoyens depuis l’éclosion des premiers cas de COVID-19.

Ils devront désormais composer 1 877 644-4545 s’ils souhaitent joindre une infirmière d’Info-Santé, qui les dirigera vers la bonne porte du système de santé. Malheureusement, cette ligne a été dysfonctionnelle tout au long de la journée, vendredi.

Informée du problème par les médias dès 11 h 30 le matin, la ministre de la Santé et des Services sociaux, Danielle McCann, s’est engagée à résoudre le problème avant la fin de la journée. « Je vais suivre ça personnellement », a-t-elle assuré lors du point de presse quotidien du gouvernement provincial.

En raison d’un volume d’appels trop élevé, le numéro 811 du service Info-Santé éprouvait des pépins techniques depuis quelques jours. Depuis le début de l’épidémie de la COVID-19, les autorités de santé publique demandent aux gens qui éprouvent des symptômes ou qui pensent avoir contracté la maladie de ne pas se présenter aux urgences ou dans une clinique pour éviter de contaminer d’autres patients. 

Le mot d’ordre : d’abord parler à une infirmière d’Info-Santé. Il faut aussi passer par cette ligne téléphonique pour prendre un rendez-vous dans l’une des cliniques destinées au dépistage du coronavirus.

Le nouveau numéro de téléphone largement diffusé vendredi est notamment censé servir de point de bascule vers le service d’Info-Santé. Des citoyens qui cherchent des informations plus générales au sujet de la COVID-19 peuvent aussi téléphoner à ce numéro.

« C’est la maison des fous d’Astérix »

Après avoir passé toute la nuit de jeudi à tenter de joindre le 811, la Montréalaise Natalie d’Anjou Bélanger a téléphoné vendredi au 1 877 644-4545. Lorsqu’elle a finalement pu parler à une téléphoniste, cette dernière lui a répondu d’appeler… le 811.

Pourtant, le menu téléphonique offre explicitement l’option de joindre Info-Santé

« Je ne sais plus quoi faire. C’est la maison des fous d’Astérix », a-t-elle affirmé. Cette enseignante d’art dramatique dans une école primaire, qui est revenue de Paris dimanche, a de forts symptômes grippaux depuis mercredi soir. Elle a enseigné durant deux jours alors qu’elle était asymptomatique, mais s’inquiète d’avoir propagé la maladie à ses élèves.

« C’est vraiment aberrant, ça fait depuis [jeudi] après-midi que j’essaie d’appeler et déjà, pour avoir le 811, il faut appeler plein, plein, plein de fois sans arrêt. »

— La Montréalaise Natalie d’Anjou Bélanger

« Après, on finit par avoir à rappeler plus tard parce que les lignes sont engorgées, sinon on est mis en attente. Et quand on est mis en attente, au bout d’une heure, ça raccroche tout seul », a-t-elle expliqué en toussant vigoureusement.

La Presse a composé le numéro à une dizaine de reprises vendredi tout au long de la journée. Plusieurs fois, la ligne s’est tout simplement déconnectée.

Après de nombreux essais infructueux, nous avons finalement pu parler à une téléphoniste à deux reprises en fin de journée. Même si nous avons sélectionné l’option Info-Santé dans le menu numérique, ce n’était pas des infirmières qui étaient au bout du fil. Les téléphonistes nous ont aussi donné l’instruction de composer le 811.

« Oui, nous sommes conscients de la difficulté d’obtenir la ligne depuis que le premier ministre l’a annoncé ce matin », a indiqué Robert Maranda, de la direction des communications du ministère de la Santé, à 18 h, vendredi soir.

Ce dernier a réitéré que c’était bel et bien le 1 877 644-4545 que les citoyens devaient maintenant composer et non le 811.

Plus d’infirmières

Vendredi, la ministre McCann a promis que le nouveau service téléphonique serait plus « robuste ». Elle a indiqué que 88 infirmières de plus seront déployées à compter de maintenant pour prendre les appels de la population à Info-Santé. 

« Toute personne qui a des symptômes devrait appeler dorénavant ce numéro. Ça va faciliter les choses, d’abord pour les personnes et aussi pour le réseau », a-t-elle dit.

La ministre de la Santé a aussi indiqué qu’à compter de la semaine prochaine, un service de téléconsultation sera graduellement déployé dans les hôpitaux et les cliniques. Il sera ainsi possible de parler à des médecins au téléphone. Le détail sera annoncé dans les prochains jours.

Par ailleurs, Québec compte mettre sur pied une douzaine de cliniques de dépistage de plus pour couvrir l’ensemble du territoire du Québec. Au total, le Québec comptera donc 15 lieux destinés uniquement au dépistage du coronavirus.

Québec compte aussi augmenter sa capacité à mener des tests de dépistage. « Les tests sont effectués au Laboratoire de santé publique du Québec. Le Laboratoire a la capacité d’effectuer environ 400 tests par jour. Une stratégie d’optimisation de l’efficience est en cours et permettrait d’effectuer 800 analyses par jour », a expliqué Robert Maranda. 

« Des travaux sont en cours pour que les centres hospitaliers universitaires puissent également effectuer ces tests dans leurs laboratoires. Cela permettra d’augmenter la capacité maximale à environ 6400 échantillons par jour », a-t-il ajouté.

Pas de transmission communautaire, mais…

Le Québec ne recensait vendredi aucun nouveau cas de la COVID-19. À l’heure actuelle, 17 cas ont été officiellement confirmés. Québec soutient qu’il n’y a pas de transmission communautaire de la COVID-19 ici. Seuls des Québécois ayant voyagé à l’étranger ont été infectés, et aucune personne n’a contracté le nouveau coronavirus au Québec, selon lui. Or, des médecins ont joint La Presse pour apporter un important bémol : seules les personnes qui ont voyagé au cours des 14 derniers jours et qui ont des symptômes de grippe peuvent subir le test de dépistage, selon les directives actuelles. Comment le gouvernement peut-il garantir l’absence de transmission communautaire au Québec si les personnes qui n’ont pas séjourné hors du Canada ne peuvent être testées ? se demandent-ils. Vérifications faites, le ministère de la Santé et des Services sociaux confirme que les tests sont faits auprès des personnes revenant de l’étranger seulement. À une nuance près : les proches des Québécois qui ont eu un résultat positif sont aussi testés. Le Ministère explique que les tests ne sont pas étendus davantage jusqu’ici « parce que ce n’est pas prouvé qu’il y a de transmission communautaire au Québec ».

— Tommy Chouinard, La Presse

Un employé de l’Hôpital juif de réadaptation de Laval est infecté

Un travailleur de l’Hôpital juif de réadaptation de Laval a été déclaré positif à la COVID-19, ce qui force l’isolement d’une unité et une opération de désinfection minutieuse dans l’établissement. L’employé a travaillé une journée, le 10 mars, alors qu’il était contagieux, mais ne présentait pas encore de symptômes. Selon la direction du Centre intégré de santé et de service sociaux (CISSS) de Laval, il a averti son gestionnaire dès son arrivée au travail le lendemain, parce qu’il avait commencé à se sentir mal. Un test a révélé qu’il était infecté par le virus. « Tout en ce moment est désinfecté de façon très minutieuse », assure Pierre-Yves Séguin, porte-parole du CISSS. « Nos experts microbiologistes à l’interne disent que le risque de contagion demeure faible », ajoute-t-il. L’employé a été envoyé en isolement volontaire à la maison, et une unité de l’hôpital est isolée.

— Vincent Larouche, La Presse

COVID-19

Les 17 cas confirmés au Québec

Le Québec ne recensait vendredi aucun nouveau cas de COVID-19. À l’heure actuelle, 17 cas ont été officiellement confirmés. Le nombre de personnes « sous investigation » a cependant bondi de 266 à 646. Au Canada, le dernier bilan fait état de 153 cas confirmés. Pour l’instant, tous les cas québécois ont été contractés à l’étranger. 

27 février

Le premier cas confirmé concerne une Montréalaise de retour d’un séjour en Iran après une escale à Doha, au Qatar. Elle est placée en isolement chez elle après avoir consulté un médecin de l’hôpital de Verdun.

5 mars

Deux cas sont rendus publics. Un homme de retour d’Inde se présente à l’hôpital de Mont-Laurier avant d’être transféré à l’Hôpital général juif de Montréal, désigné par Québec pour accueillir les cas graves. Une personne revenue de France le 3 mars apprend une fois de retour au pays qu’elle a été en contact avec une personne infectée. Elle s’est présentée dans un centre hospitalier de la Montérégie en suivant les consignes d’isolement.

8 mars

Québec confirme le cas d’une femme de Longueuil infectée sur une croisière. Avant son diagnostic, elle a emprunté les transports en commun le 24 février et le 6 mars. La santé publique a d’ailleurs lancé un appel à la vigilance pour ceux qui auraient pris l’autobus 88 et le métro du terminus Longueuil jusqu’à la station Champ-de-Mars à ces deux dates.

10 mars

Trois cas s’ajoutent au tableau. Le cinquième cas concerne une personne qui a visité l’Europe du Nord, possiblement l’Irlande. À cause de la gravité de ses symptômes, elle a été hospitalisée à l’Hôpital général juif à Montréal. Le sixième cas est celui d’une personne originaire de Montréal qui a visité les Caraïbes et Miami. Le septième cas concerne une personne de Montréal qui a voyagé en République-Dominicaine.

11 mars

Le huitième cas frappe une personne originaire de la Mauricie qui a visité la France. Selon le maire de Trois-Rivières, il s’agit d’un employé d’Innovation et développement économique Trois-Rivières. Une trentaine de ses collègues font du télétravail depuis.

12 mars

Une personne de Montréal est infectée à son retour de France.

13 mars

Huit cas supplémentaires viennent gonfler le bilan provincial à 17 personnes atteintes. On en sait peu sur leur identité ; l’une d’entre elles est un pneumologue du CHUM qui a voyagé en Europe. Le ministère de la Santé et des Services sociaux a confirmé hier la région de résidence des huit patients ainsi que l’endroit où ils ont été infectés.

En Estrie, deux personnes ont été contaminées lors d’un voyage en Italie. La Montérégie recense deux cas contractés à l’étranger : l’un en France, l’autre dans les Caraïbes. Une personne de la région de Chaudière-Appalaches a aussi contracté la maladie lors d’un voyage dans les Caraïbes. Deux Québécois ont contracté la maladie lors d’un voyage à Miami : une personne qui vit dans les Laurentides et une autre qui vit à Montréal. Le dernier cas a été contracté aux États-Unis par une personne originaire de Montréal.

COVID-19

Guide pratique pour la vie en quarantaine

Quand doit-on se mettre en quarantaine ? Quand est-on certain d’être guéri ? La Dre Anne Gatignol, microbiologiste et spécialiste des virus émergents, répond à toutes nos questions existentielles et pratico-pratiques.

Si l’on a un petit mal de gorge typique de cette fin d’hiver, faut-il se mettre d’emblée en quarantaine ?

Si on a mal à la gorge, il y a de fortes chances que la COVID-19 ne soit pas en cause… mais elle pourrait l’être aussi. Il n’est peut-être pas nécessaire d’y aller d’une quarantaine stricte dans ce cas-là, mais si on doit aller à l’épicerie, mieux vaut avoir un masque.

Mais il n’y en a plus vraiment, de masques…

J’ai croisé une femme qui s’en était fait un sur mesure, en coton. Avec un peu de talent en couture, en le lavant chaque soir, ça fait l’affaire. Et une écharpe, c’est très utile aussi.

Et si l’on revient de voyage, que fait-on ?

Il n’y a pas de vérité absolue. En gros, si vous n’avez pas de symptômes, multipliez les lavages de main. Au moindre symptôme, placez-vous immédiatement en isolement.

Si mon conjoint est en quarantaine préventive, dois-je l’être aussi ?

Si les enfants et vous évitez les contacts rapprochés avec lui, vous n’avez pas besoin d’être en quarantaine. Mais si vous maintenez des contacts avec lui et dormez dans le même lit, c’est mieux de l’être aussi.

Si on est effectivement atteint, se couvrir le visage dans la maison et se tenir à distance des autres suffit-il ?

En ne touchant à rien, vous pouvez aller marcher dehors, mais dans la maison, il faut qu’on vous apporte les repas, que vous restiez dans votre pièce à vous et que vous ayez une salle de bain à vous, idéalement.

Si on a été infecté, quand n’est-on plus contagieux ?

Pour être certain qu’il n’y a plus de problèmes, il faut avoir deux tests négatifs parce qu’on peut avoir de faux négatifs et de faux positifs.

On dit de faire particulièrement attention aux personnes âgées. Si j’ai pris le métro ces derniers jours, je les évite dès maintenant ?

Si vous n’avez pas de symptômes, vous pouvez aller à l’épicerie pour eux et les voir, en vous lavant les mains et en restant à deux mètres d’eux.

Y a-t-il un risque particulier pour les femmes enceintes ?

En Chine, les femmes qui ont été infectées ont donné naissance à des bébés normaux, selon ce que l’on sait. Bien sûr, il vaut mieux d’éviter d’être malade, mais leur état ne pose pas de risque particulier.

A-t-on bien fait de fermer les écoles ?

En France, Emmanuel Macron a demandé aux dirigeants de l’Italie ce qu’ils auraient fait différemment. Ils lui ont répondu qu’il aurait dû fermer les écoles plus tôt. Les enfants n’ont habituellement pas de symptômes, mais peuvent transmettre le virus.

Peut-on arrêter le virus au Québec ?

On a fermé les écoles et encouragé le télétravail au bon moment. Au Québec, si chacun se mobilise, si l’on est très vigilant, on peut l’arrêter. J’ai cependant peur des États-Unis. Les Américains n’ont pas tous des assurances et ne se feront pas tous tester.

Vous travaillez sur les virus émergents. Qu’a ce virus de particulier ? Comment le comparer à ceux que l’on connaît ?

On ne sait pas combien de cas il y a vraiment dans le monde, mais a priori, le taux de mortalité de la COVID-19 est 10 fois plus élevé que celui de la grippe. Par contre, le taux de mortalité du SRAS était autrement plus élevé, mais il était moins contagieux.

Beaucoup de rumeurs circuleront, les chefs d’État sont nombreux à dire n’importe quoi. Qui croire ?

François Legault est en mode écoute, il écoute bien les chercheurs. Par contre, Doug Ford et Donald Trump, qui ont longtemps été dans le déni, n’ont manifestement pas les compétences nécessaires pour évaluer la situation. Heureusement qu’il y a Anthony Fauci [directeur de l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses], qui n’hésite pas à contredire le président. M. Fauci est compétent et digne de confiance.

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Les résidences pour aînés sur un pied de guerre

De grandes chaînes de résidences pour aînés sont prêtes à fermer les portes de leurs installations aux visiteurs, en cas de besoin, alors que le réseau public commence à bannir le public de certains de ses centres hospitaliers de soins de longue durée (CHSLD).

Les installations du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal (2 hôpitaux et 15 CHSLD) sont devenues les premières hier à suspendre toutes les visites aux résidents et aux patients. Seuls les patients de moins de 18 ans peuvent être accompagnés d’un de leurs parents.

La veille, jeudi, la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Marguerite Blais, a annoncé que toute personne qui arrive de l’étranger ou présente des symptômes grippaux devait s’abstenir de visiter une résidence pour aînés.

Les autres devraient tout de même y penser à deux fois avant de s’y rendre. « Si on n’est pas obligés d’aller visiter nos personnes vulnérables dans les CHSLD, qu’on s’abstienne, a-t-elle dit. Normalement, je vous dis le contraire ! » 

C’est que les personnes âgées et celles dont le système immunitaire est faible sont particulièrement à risque de développer des problèmes de santé graves, voire de mourir, si elles contractent la COVID-19.

« Dans ce contexte, seul le personnel sera admis dans les sites concernés, et ce, jusqu’à nouvel ordre », indique le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal dans un communiqué. 

« Je comprends les contraintes reliées à cette demande, mais c’est en multipliant de tels gestes que nous arriverons à limiter la propagation de la COVID-19 et ainsi assurer, dans la mesure du possible, la sécurité des populations vulnérables », a ajouté le grand patron de l’organisation, Sylvain Lemieux, qui comprend notamment l’hôpital Maisonneuve-Rosemont et l’hôpital Santa Cabrini.

En après-midi, les autorités sanitaires américaines ont annoncé qu’elles suspendaient les visites dans toutes les résidences pour aînés sous leur autorité, sauf situations exceptionnelles, comme une mort imminente.

Soupeser les effets

Du côté du réseau privé, les gestionnaires de résidences fourbissent leurs armes et promettent de redoubler leurs mesures de précaution.

Au Groupe Excellence, propriétaire de cinq complexes, Giovanni Migliara a indiqué que les visites n’étaient pas suspendues, mais « modérées ». « On demande aux gens de venir seulement au besoin », a-t-il indiqué en entrevue téléphonique.

Chartwell, le Groupe Maurice et les Résidences Soleil ont indiqué qu’elles se tenaient prêtes à obéir à toute instruction de la Santé publique.

Le professeur Philippe Voyer, spécialiste des milieux de vie pour aînés à la faculté des sciences infirmières de l’Université Laval, a souligné que les milieux de vie qui accueillent des aînés avaient l’habitude de devoir faire face à des restrictions d’accès en lien avec des maladies contagieuses et qu’il fallait faire confiance aux autorités de la Santé publique.

M. Voyer a souligné que, du côté des résidences qui accueillent des aînés très vulnérables, la volonté de ralentir la propagation du virus devait être soupesée et mise en parallèle avec les effets d’un isolement.

« Il faut trouver un juste équilibre, a-t-il dit, parce qu’une personne qui a un problème cognitif, la maladie d’Alzheimer, par exemple, et qui reçoit sa conjointe chaque jour y trouve du réconfort et du soutien psychologique. […] L’isolement peut entraîner des effets négatifs sur le plan de l’anxiété, du sommeil, des comportements. »

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