Villes et biodiversité

Ambitions globales, solutions locales

En marge de la COP15, dimanche et lundi derniers, les maires et mairesses des villes partout dans le monde se sont rassemblés, signalant du même coup que les gouvernements locaux devaient disposer des pouvoirs d’agir pour mieux protéger la biodiversité.

Les villes ont montré du leadership en matière de lutte et d’adaptation aux changements climatiques, ainsi qu’en ce qui concerne la protection de la biodiversité, deux enjeux intimement liés. L’Engagement de Montréal, que la mairesse Valérie Plante a invité ses homologues à signer, en est un bon exemple. L’Engagement de Montréal vise notamment à augmenter la superficie des espaces bleus et verts, améliorer leur accessibilité pour le public et restaurer les écosystèmes et leur connectivité perdus. Des grandes villes partout dans le monde ont, par ailleurs, répondu à l’appel, notamment Barcelone, Buenos Aires et Paris.

Les gouvernements municipaux sont typiquement à l’avant-garde. Ce n’est pas uniquement circonstanciel au Québec actuellement. Pourquoi ? Cela s’explique par leur proximité avec les citoyennes et citoyens.

Les gouvernements locaux sont les premiers confrontés aux enjeux et même aux crises liées aux bouleversements que vit actuellement la planète, ainsi qu’à la misère humaine qu’elles entraînent. Les villes sont en mesure de prendre des décisions les plus adaptées à leur réalité parce qu’elles ont une grande capacité d’action et qu’elles prennent des décisions basées sur une connaissance fine du territoire et de ses ressources.

Dans le cadre du septième sommet du Conseil international pour les initiatives écologiques locales (mieux connu sous l’acronyme ICLEIL, en anglais), la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Martine Biron, a fait la déclaration suivante : « Notre ambition doit être globale, mais nos actions doivent être locales. » Cette déclaration est parfaitement juste et encourageante de la part du nouveau gouvernement.

Les outils pour agir

En effet, il est de la responsabilité des gouvernements nationaux, notamment ceux réunis dans le cadre de la COP15, de se doter d’objectifs et de cibles qui seront donc partagés par la communauté internationale (idéalement basés sur des données probantes). Or, les solutions, elles, seront les plus porteuses et concrètes à l’échelle des territoires, des municipalités. En matière de protection de la biodiversité, ce sont les gouvernements municipaux qui ont un grand pouvoir d’agir. Mais encore faut-il leur donner tous les outils pour qu’ils arrivent à le faire.

Au Québec, le cadre législatif qui encadre l’activité des villes favorise l’étalement urbain, c’est bien connu, et donc la destruction des milieux naturels et espèces animales. Envers et contre tous (presque), plusieurs gouvernements municipaux, notamment les villes membres de la Communauté métropolitaine de Montréal, se donnent l’objectif de protéger 30 % des milieux naturels, ce qui correspond à l’objectif recherché par la communauté internationale dans le cadre de la COP15.

Bien que ce leadership soit exemplaire, il faudra réformer la fiscalité municipale et plusieurs lois touchant l’aménagement du territoire pour permettre aux villes d’y arriver. Si les dispositions législatives ne sont pas alignées avec l’ambition des villes, celle-ci risque d’être compromise.

Les outils financiers des municipalités devront être revus. Leur trop grande dépendance à la taxe foncière est une barrière énorme à un aménagement du territoire qui soit plus respectueux des ressources que nous offre la planète. Aussi, par le passé, malgré les investissements pour la protection des espaces naturels, l’argent n’a que très peu atterri dans les milieux urbains, alors que c’est là que la biodiversité est plus importante, et que les services écosystémiques que nous rendent les espaces naturels sont plus importants. Le plan Nature du gouvernement du Québec ainsi que les sommes supplémentaires annoncées par le gouvernement fédéral ont comme défi de surpasser ce problème. Une révision de la Loi sur les milieux humides et hydriques peut aussi être un levier supplémentaire pour permettre aux gouvernements locaux de mieux protéger la biodiversité.

La protection de la biodiversité implique tous les ordres de gouvernement. À cet égard, le gouvernement du Québec pourrait mieux soutenir les efforts des municipalités et accompagner celles qui ne sont pas encore tout à fait rendues là. Pour arriver à des politiques publiques qui soient aussi efficaces que possible, Québec doit transformer sa relation avec les municipalités, accroître sa collaboration avec celles-ci et leur donner des outils pour que les gouvernements aient les moyens de leurs ambitions.

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