Grande entrevue David Cape, PDG de Groupe Marcelle

Prendre sa place parmi les multinationales

Son grand-père Victor exploitait une pharmacie à Montréal, rue Sainte-Catherine, et a décidé, en 1949, d’acheter la licence des produits cosmétiques Marcelle pour le Canada. En 1973, son père Michael a racheté tous les droits de l’entreprise américaine pour donner naissance au Groupe Marcelle. Il y a trois semaines, David Cape a réalisé l’acquisition de Lise Watier Cosmétiques qui permet au groupe montréalais de doubler de taille.

Je ne connaissais pas Groupe Marcelle, et c’est donc avec une certaine surprise que j’ai appris que cette entreprise montréalaise venait de ramener sous contrôle québécois la société Lise Watier Cosmétiques, qui avait été vendue en 2007 à un fonds d’investissement ontarien.

Pour leur part, les consommatrices québécoises et canadiennes connaissent très bien Groupe Marcelle puisque ses produits sont distribués dans nos pharmacies depuis les années 50 et sont fabriqués à Montréal depuis les années 70.

« C’est mon père qui a bâti la marque durant les années 60 en faisant entrer les produits Marcelle dans les pharmacies, une à la fois, puisqu’elles étaient toutes indépendantes à l’époque. L’entreprise basée à Chicago n’allait nulle part aux États-Unis, et il l’a rachetée du groupe laitier Borden en 1973 », rappelle David Cape.

Groupe Marcelle est devenu aujourd’hui une entreprise qui offre quelque 500 produits cosmétiques pour les yeux, le visage, les lèvres et les soins de la peau, déclinés sous trois marques : Marcelle, Anabelle et, depuis un an, les produits cosmétiques pour hommes CW Beggs and Sons.

Les produits de Groupe Marcelle sont distribués dans pas moins de 3000 points de vente au Canada. Trente-cinq pour cent de ses ventes se font au Québec et 65 %, dans le reste du Canada. Depuis bientôt trois ans, l’entreprise est maintenant présente sur le marché américain via le site de commerce en ligne Birchbox.

« On a fait une belle percée aux États-Unis qui représentent de 2 à 3 % de nos ventes. On fait connaître nos produits via Birchbox qui envoie de nos échantillons à sa clientèle.

« En trois ans, on a livré près de 1 million d’échantillons et cette année on prévoit en livrer pas moins de 2,6 millions via Birchbox. C’est un concept qui fonctionne vraiment bien. Les consommatrices nous découvrent et placent leurs commandes en ligne », souligne David Cape.

Les produits Marcelle sont destinés au marché de masse des femmes de 25 ans à plus de 55 ans et leur porte-parole est la comédienne Karine Vanasse. Les produits Anabelle visent pour leur part le marché de masse des jeunes femmes de 18 à 30 ans, et c’est la chanteuse Marie Mai qui en est le visage publicitaire.

ÉLARGIR LE PORTEFEUILLE

Il y a trois semaines donc, Groupe Marcelle a annoncé l’acquisition de Lise Watier Cosmétiques, la marque emblématique québécoise de produits de beauté, dont la fondatrice Lise Watier avait vendu la majorité des actions au groupe Imperial Capital Corporation, en 2007.

« À l’époque, en 2007, on était en plein développement de nos marques. On n’avait pas la tête à réaliser une acquisition. Mais depuis deux-trois ans, on s’intéressait à Lise Watier. Dans le courant de l’automne, on a approché la Caisse de dépôt en vue de conclure une transaction », explique David Cape.

La Caisse a injecté 18 millions dans le capital de Groupe Marcelle pour lui permettre de conclure la transaction annoncée le 18 février dernier. Mais au-delà des considérations financières, l’entrepreneur David Cape a dit avoir aussi beaucoup apprécié le soutien technique et logistique de l’institution québécoise.

« La Caisse a été un précieux conseiller. Ils en ont réalisé, des transactions comme celle que nous venons de faire,  et ils nous ont bien épaulés. On est bien heureux de cette association. »

— David Cape, PDG de Groupe Marcelle

Avec cette acquisition, Groupe Marcelle double sa taille à 350 employés et double le nombre de produits qu’il va distribuer puisque le groupe Lise Watier Cosmétiques a lui aussi quelque 500 produits dans son portefeuille.

« Lise Watier nous permet d’ajouter la gamme des produits de soins du corps et des parfums, où on était absents. Pour le reste, ses produits [...] complètent admirablement [les] nôtres puisqu’ils visent davantage le marché haut de gamme.

« Là, on va être dans le marché de masse pour les jeunes femmes et les femmes mûres, les hommes et dans les produits de prestige pour les femmes », analyse le PDG.

Au chapitre des revenus, Groupe Marcelle va réaliser des ventes annuelles de l’ordre de 150 millions, mais le nouveau groupe compte capitaliser sur la convergence de ses équipes de recherche et développement.

« On est dans une industrie de l’innovation. On se bat contre des multinationales. Il faut arriver constamment avec des nouveaux produits pour séduire de nouvelles clientèles », observe David Cape.

Le PDG donne l’exemple d’une crème pour bébé que le Groupe Marcelle a été le premier à lancer il y a quatre ans, au même moment que Garnier (de la multinationale L’Oréal). La crème de Marcelle est bonne première au Québec et au Canada et obtient un succès grandissant aux États-Unis via Birchbox.

Le Groupe Marcelle compte aussi conserver les équipes de marketing de chacune des deux entreprises, pour qu’elles restent autonomes et dédiées à leur marque, ainsi que ses trois édifices du chemin de la Côte-de-Liesse, soit ceux d’Anabelle, de Marcelle et de Lise Watier, situés à Lachine et Mont-Royal.

« On ne parle plus d’un siège social, mais d’un campus, comme Microsoft à Seattle qui a une multitude d’édifices. Quand tu travailles pour Microsoft à San Francisco, tu ne travailles pas au siège social, mais quand tu es à Seattle, peu importe l’édifice, tu es au siège social », tranche le PDG.

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