PSYCHOLOGIE

Événement anormal, réactions normales

Les victimes et les témoins de tueries ou d’attentats sont à risque de souffrir de stress post-traumatique. On en parle avec une psychologue spécialisée dans ce domaine, Pascale Brillon, fondatrice-directrice de l’Institut Alpha et auteure de trois livres sur ces questions.

LES QUATRE SYMPTÔMES DU STRESS POST-TRAUMATIQUE

Reviviscence flash-back, cauchemars

Évitement des stimuli associés à l’événement traumatique objets, lieux, conversations, souvenirs

État d’alerte constant hypervigilance, difficultés de sommeil et de concentration.

Altérations des émotions et des cognitions remise en question de la nature humaine, de la conception du monde.

« RÉACTIONS NORMALES À UN ÉVÉNEMENT ANORMAL »

« Les symptômes post-traumatiques constituent des tentatives pour digérer le pire événement de notre vie, explique Pascale Brillon. Un flash-back, ça sert à nous indiquer que quelque chose n’est pas digéré et qu’il faut s’en occuper. L’évitement, ça sert à nous protéger. L’hypervigilance nous donne l’impression de protection. »

UN MOIS

« Dans la majorité des cas, les symptômes vont s’estomper dans les jours qui suivent l’événement traumatisant, mais pour beaucoup, les symptômes vont se cristalliser », souligne Mme Brillon. Le diagnostic de stress post-traumatique peut être posé si les symptômes perdurent plus d’un mois.

FACTEURS DE RISQUE

Proximité plus on sent sa vie menacée, plus la scène à laquelle on assiste est horrible, plus on est à risque d’avoir des symptômes

Présence de dissociation  plus on déconnecte de la réalité au moment de l’événement, plus on est à risque

Deuil ajouté si on perd quelqu’un dans le drame, l’impact est augmenté

Pensées négatives ou catastrophisantes.

LE SOUTIEN SOCIAL

« Un des facteurs qui jouent positivement pour Paris, c’est la présence de solidarité. Le fait que ce soit un traumatisme collectif maximise la résilience des victimes : le tissu social se resserre, on reconnaît les victimes, on leur donne de l’aide professionnelle, ce qui est différent de victimes d’un traumatisme individuel. »

TREMPLIN VERS LA DÉPRESSION…

La moitié des victimes qui ont un trouble de stress post-traumatique vont sombrer dans une dépression majeure, ce qui est énorme, souligne Pascale Brillon. On perd l’intérêt pour la vie, on pleure sans cesse, on a des idées suicidaires…

… ET VERS L’ALCOOL

La moitié des hommes et 30 % des femmes qui souffrent de stress post-traumatique vont avoir tendance à consommer de l’alcool pour s’apaiser, et ce, au point d’en abuser. « L’alcool est facilement accessible, et malheureusement encore moins tabou que d’aller consulter ou que de prendre un médicament, note Pascale Brillon. Non seulement l’alcool ne règle aucunement l’anxiété, mais il a aussi un effet dépressogène important. »

DE NOUVELLES STRATÉGIES

Lorsque Pascale Brillon a terminé son doctorat sur le stress post-traumatique, en 1998, on en était aux balbutiements du sujet. La situation a bien changé depuis : « On sait beaucoup mieux comment aider ceux qui souffrent », souligne Mme Brillon. La psychothérapie qui permet de maximiser les ressources adaptatives et de minimiser les séquelles douloureuses s’avère « très efficace », indique-t-elle.

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