Une visite papale sous le signe de l’écoute

Alors que le pape François se prépare à visiter les Premiers Peuples du Canada après avoir reçu trois délégations autochtones au Vatican plus tôt au printemps, une chose est claire : ce moment historique appartient en tout premier lieu aux Autochtones du Canada.

Bien sûr, pour plusieurs Canadiennes et Canadiens, l’arrivée du pape en sol canadien sera vécue comme une célébration, alors que de nombreuses personnes gardent un souvenir indélébile et festif du premier voyage de Jean-Paul II au Canada, effectué en 1984. Il faut toutefois garder en tête que l’objectif principal du voyage que fera le pape François du 24 au 29 juillet est de répondre aux besoins exprimés par des membres des communautés autochtones. Ces derniers ont souligné qu’il était nécessaire de voir le pape, et surtout, de percevoir son émotion au moment de réitérer ses excuses, de sentir comment les histoires entendues l’ont transformé, l’ont bousculé intérieurement.

Les excuses présentées le 1er avril dernier à Rome doivent être réitérées le plus près possible des survivantes, des survivants et de leurs familles. Cela illustre l’importance, en milieu autochtone, de la relation, de l’authenticité, de la présence, des éléments incontournables au développement d’une amitié sincère et durable.

Durant ces journées de juillet, les non-Autochtones devront s’effacer par moments, et surtout, porter attention aux récits partagés, dont ceux des personnes ayant vécu des abus de toutes sortes dans les pensionnats.

Contribuer au rayonnement de ces prises de parole courageuses et transformatrices pourrait d’ailleurs constituer une façon de s’impliquer dans cette démarche d’écoute et de rencontre qui sera au cœur de la visite papale.

Le germe de quelque chose de plus grand

Une fois le séjour du pape François en sol canadien terminé, il faudra s’assurer que ce voyage et ces excuses ne soient pas un point d’arrivée, mais bien le début, le germe de quelque chose de plus grand. Le thème de cette visite papale est « marcher ensemble », et cette marche vers la guérison ne fait que commencer. Marchons ensemble, certes, mais veillons, du côté des non-Autochtones, à ne pas dicter la marche. J’ajouterais : au besoin, restons un pas en arrière, surtout si l’envie est trop grande de marcher devant. Cette relation d’amitié espérée ne se développera pas à notre rythme. Trop souvent, nous parlons de réconciliation, sans trop réfléchir à ce qu’implique ce terme.

Bien des personnes autochtones nous rappellent qu’il est difficile de se réconcilier avec une personne — ou des nations, dans ce cas-ci — que nous ne connaissons pas… Et il est vrai que nous ne connaissons que très mal les 11 nations autochtones présentes sur le territoire aujourd’hui appelé Québec.

Pourquoi ne pas saisir cette occasion offerte par la visite du pape pour apprendre à mieux connaître nos frères et nos sœurs autochtones, écouter leur vérité et nous laisser transformer intérieurement ? Les communautés autochtones désirent — avec raison — que ces excuses ne soient pas que symboliques.

L’amitié est aussi une question de cohérence. Et rares sont les amitiés dénuées de blessures. Mais celles qui s’inscrivent dans la durée sont celles où les actions ayant engendré souffrances et injustices ont été réparées.

* Mission chez nous est un organisme catholique qui œuvre avec les communautés autochtones.

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