Courrier

Décentraliser la santé pour la sauver

L’opinion collective signée par des membres du conseil d’administration du Regroupement québécois de médecins pour la décentralisation du système de santé, publiée le 18 juillet, « Décentraliser la santé pour la sauver », a suscité de nombreux commentaires de nos lecteurs. Voici un aperçu des courriels reçus. (Re)lisez « Décentraliser la santé pour la sauver »

Améliorons le système

J’approuvais tout ce que lisais dans le texte jusqu’à ce que je vois les solutions proposées : ajouter des gestionnaires, des comités et des tables de concertation ; encore. Quand les acteurs du système pourront trouver d’autres pistes de solution que mettre plus d’argent, de personnel et de structures administratives, peut-être qu’on pourra parler d’améliorer le système.

— Patrice Element

Le silo de la proximité

L’informatisation et l’intelligence artificielle nécessitent des systèmes de conception et d’uniformisation des données des dossiers et des pratiques médicales. Le retour au travail dans le silo de la proximité ne nous ferait pas nécessairement progresser…

— Gilles Perreault

Inverser la pyramide

Le nerf de la guerre pour adapter les services aux besoins des bénéficiaires demeure l’argent. Pour que ces nouvelles instances décentralisées jouent un rôle efficace, ne faudrait-il pas un nouvel apport de financement pour répondre à leurs demandes ?

Pour dégager une marge de manœuvre financière, n’y aurait-il pas lieu d’inverser la pyramide et d’envisager un système de santé centrée sur le bénéficiaire, dont la base serait le coût par habitant ?

Comment récupérer les sommes astronomiques englouties par l’avidité des ordres professionnels du modèle québécois sans changer le paradigme actuel centré sur les professionnels et non centré sur les besoins des bénéficiaires ?

— Robert Lapointe, ex-directeur des ressources informationnelles, Hôpital général juif

Des infirmières aux conseils

Ajoutez des représentantes des infirmières aux conseils des médecins, des dentistes et des pharmaciens. Vous les oubliez fréquemment par pur esprit corporatiste. Ce sont les infirmières qui sont le plus près des patients, leur contribution dans la gestion de proximité est incontournable. Ne pas les inclure au sein de votre conseil envoie un message contradictoire à votre intention fort louable de vous rapprocher du terrain.

— Luce Goerlach

Une autonomie régionale

J’ai pratiqué comme interniste à l’Hôtel-Dieu d’Arthabaska depuis 1982 et on a vu la démotivation s’installer, l’esprit de corps et le sentiment d’appartenance, la fierté de faire partie d’une équipe s’affaisser à mesure que la création des CIUSSS démantelait nos laboratoires et congédiait notre administration pour la remplacer par des structures au personnel bien intentionné, mais souvent sans pouvoir décisionnel local et tellement moins accessible qu’auparavant. Je souhaite vivement qu’on retrouve une part d’autonomie bien régionale à l’échelle de notre équipe et de la distribution de nos populations !

— Georges W. Desrochers

Écoutons les gens qui côtoient les patients

L’échec du système de santé pendant la pandémie et maintenant tient à une gestion trop globale, lointaine des patients. Comment un gestionnaire peut-il gérer 14 institutions dans un CIUSSS ayant des buts si différents (CLSC, CHSLD, Clinique GMF, hôpitaux, etc.) ? C’est trop gros à gérer. Autant d’institutions qui se battent pour offrir des soins aux patients, mais qui fonctionnent si différemment. Ça prend des gens près de la population et des besoins spécifiques pour être efficace… Rien de ce qui se passe actuellement. Sur le plancher, nous avons des milliers de solutions efficaces que nos gestionnaires ignorent. Le top-down management est un échec cuisant, il faut écouter les gens qui côtoient les patients. « Donnez-moi 300 000 $, je vais vous faire économiser 2 millions, ça n’existe pas dans notre système. Trop étroit d’esprit. Toujours des coupes, jamais la rentabilité. Ça fait des siècles que l’on connaît les solutions. Dépolitiser la santé et créer un « Hydro-Santé » indépendant, etc. C’est simple mais aucun pouvoir politique ne désire perdre du pouvoir. On ne verra jamais le bout sans ça.

— Yves Tremblay, médecin

Redorer le blason de la santé

Ancien DG du CSSS du Granit, je déplore depuis le tout début, cette centralisation qui est venue affaiblir grandement les soins et services et démotiver le personnel et les médecins du réseau. Au CSSS du Granit, nous avions agi sur la pénurie du personnel en prenant des actions, en nous rapprochant du personnel et des professionnels, en les écoutant, en les impliquant et en réalisant des projets qui collaient à leur réalité. Nous étions passés d’une situation où il y avait des départs d’employés à une situation où nous avions des CV en mains de personnes désirant se joindre à nous. La fierté et la reconnaissance du personnel et des professionnels faisaient partie du quotidien. Je déteste lorsque j’entends les leaders du réseau actuel mentionner que le réseau est en pénurie de personnel tout comme les autres secteurs d’activités de l’économie. Désolé, mais il faut redorer le blason du travail dans nos établissements de santé afin d’attirer les jeunes vers ces professions de choix et devenir attractifs. Une analyse sérieuse du modèle actuel qui comporte aussi des aspects positifs à conserver ainsi qu’une décentralisation de fonctions et de rôles clés, notamment en gestion des ressources humaines, sont, selon moi, la clé du succès.

En passant, le CSSS du Granit était en 2015 l’établissement de santé au Québec qui détenait le plus faible taux d’encadrement sur les 182 établissements du réseau de la santé et des services sociaux et détenait l’un de ses plus faibles taux d’absentéisme au travail.

— Pierre Latulippe, retraité depuis 2015

Des soins à hauteur humaine

Je suis tellement d’accord avec le retour aux établissements de proximité qui rassemblent les valeurs et les réalités d’un même milieu social. Et que l’administration/direction/budgets des soins aigus soient dissociés de ceux des soins communautaires et CHSLD. Il faut revenir au temps où il y avait une gestion des établissements urbains et ruraux, des hôpitaux et CLSC/CHSLD, chacun regroupés avec leurs propres équipes de directions et leurs budgets. Les services offerts étaient à hauteur humaine, le personnel avait un sentiment d’appartenance… Je m’en souviens !

— Johanne Tremblay, infirmière

La seule voie possible

En tant qu’ancien chef du département de médecine spécialisée à l’hôpital Le Gardeur, j’ai pu constater les effets néfastes de la centralisation excessive issue de la réforme Barrette. Nous avons dû subir une fusion forcée avec un autre centre hospitalier à plus de 40 km de notre milieu avec une histoire et une philosophie très différentes.

Cela a amené un arrêt du développement de toute nouvelle activité clinique dans notre centre. L’administration est devenue distante, voire absente. Le personnel médical et infirmier est démotivé, sans implication réelle.

La complexité administrative de notre milieu a terrassé notre ancien PDG, M. Castonguay, qui a été démis de ses fonctions.

J’appuie entièrement le point de vue du regroupement qui suggère une direction générale locale, une direction des services professionnels locale, un conseil des médecins, des dentistes et des pharmaciens local et une table des chefs efficace.

Cela demeure la seule voie possible pour sauver nos centres hospitaliers et Le Gardeur.

— Gilbert Gosselin, Terrebonne

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