Un parc nature ou de l’asphalte ?

Plaidoyer pour une meilleure santé environnementale dans Mercier–Hochelaga-Maisonneuve

À Montréal, le fardeau des problèmes de santé environnementale est inégalement réparti sur le territoire. Depuis trop longtemps, les quartiers avec un plus haut degré de défavorisation socioéconomique, comme c’est le cas pour Hochelaga-Maisonneuve, enregistrent un plus grand déficit de verdure et un taux plus élevé d’îlots de chaleur.

Qu’on le dise clairement : cette combinaison est mortelle.

La Direction régionale de santé publique de Montréal en a d’ailleurs fait la preuve dans son analyse des vagues de chaleur de l’été 20181, et a conclu que le lieu de résidence pouvait doubler le risque de décès en lien avec la chaleur.

Réduire les îlots de chaleur et protéger les espaces verts devraient donc s’imposer comme priorité pour tous les ordres de gouvernement.

Un récent rapport d’experts2 affilié à la prestigieuse revue médicale The Lancet recommande, entre autres, de reconnaître que ces mesures d’adaptation climatique peuvent non seulement diminuer les dépenses publiques, mais également sauver des vies et améliorer la santé humaine.

C’est dans cette perspective que nous, médecins, infirmières et professionnels de la santé œuvrant dans le quartier de Hochelaga-Maisonneuve, souhaitons exprimer notre appui à la Mobilisation 6600 Parc-Nature MHM dans sa lutte contre l’installation de l’une des plus grandes plateformes de transbordement de marchandises en Amérique du Nord et à sa volonté d’utiliser cet espace pour créer un parc-nature dont tous pourront profiter.

Quotidiennement, dans notre pratique, nous sommes placés devant les impacts négatifs du manque de verdure dans le quartier et du fardeau lié à la pollution atmosphérique. Nous sommes grandement préoccupés par les conséquences négatives attendues du projet, d’autant plus qu’il sera situé à proximité de citoyens en situation de vulnérabilité et de personnes âgées. Nous souhaitons que le secteur puisse se doter d’une véritable stratégie de développement qui englobera l’ensemble des activités économiques prévues ou envisagées et qui placera les citoyens en son centre.

Nous savons qu’avoir accès à des espaces verts de qualité, à proximité de chez soi, est porteur de bonne santé physique et psychologique : réduction du stress, de la dépression et de l’anxiété ; diminution de la tension artérielle ; plus grand sentiment de cohésion sociale et de bien-être, et plus encore. Un parc-nature dans le quartier, doublé d’un site d’agriculture urbaine, est un projet à échelle humaine, porteur, qui peut contribuer à vitaliser le quartier, tout en étant à la hauteur des défis environnementaux et sociaux auxquels la communauté – mais aussi, la planète en entier – doit faire face.

Le projet industriel porté par Ray-Mont Logistiques requiert une étude d’impact environnementale globale, et non morcelée, avant qu’il ne soit trop tard et que l’entreprise ne mette les acteurs gouvernementaux devant les faits accomplis. Déjà, d’importants (et bruyants !) travaux d’asphaltage ont commencé et des espaces de verdure disparaissent trop rapidement. Une implication concertée de tous les ordres gouvernementaux s’impose.

Enfin, nous souhaitons rappeler que tout projet industriel devrait passer le test de l’acceptabilité sociale, sans quoi il pourrait y avoir des impacts dévastateurs sur le tissu social. La mobilisation croissante dans le quartier nous laisse croire que celle-ci n’est simplement pas au rendez-vous.

1. Consultez le rapport de la Direction régionale de santé publique de Montréal

2. Consultez le rapport du Lancet Countdown pour le Canada

*Cosignataires : Iskra Pirija, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve et service de médecine des toxicomanies du CHUM ; Alexandra Salazar-Fournier, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve ; Caroline Gaudreau-Ménard, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve ; Benoît Fournier, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve ; Lysiane Dallé, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve et médecin accoucheur au CHUM ; Christine Ouellette, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve ; Marie-Christine Laramée, infirmière praticienne spécialisée en soins de première ligne au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve ; Pier-Luc Turcotte, ergothérapeute en soutien à domicile et candidat au doctorat en santé communautaire ; Julie Bélanger, médecin de famille et co-cheffe médicale au GMF du CLSC Hochelaga-Maisonneuve ; Bruno Ollivry, ergothérapeute, chef de services professionnels au GMF du CLSC Hochelaga-Maisonneuve ; Marie-Hélène Marchand, médecin de famille à domicile au GMF du CLSC Hochelaga-Maisonneuve et soins palliatifs à l’hôpital Maisonneuve Rosemont, CCMF-soins palliatifs (SP), candidate à la maîtrise en sciences biomédicales, volet éthique ; Joannie Groulx, médecin de famille au GMF du CLSC Hochelaga-Maisonneuve et médecin accoucheur à HMR ; Rachèle Fournier-Noël, médecin de famille et co-cheffe médicale au GMF du CLSC Hochelaga-Maisonneuve et médecin de famille en VIH au CHUM ; Chloé Labelle, médecin de famille au GMF-U Maisonneuve-Rosemont et à la clinique communautaire Dopamed ; Pascale Breault, médecin de famille au GMF du CLSC Hochelaga-Maisonneuve et médecin hospitaliste à l’Hôpital Santa Cabrini Ospedale ; Laurence Tanguay Beaudoin, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve et médecin hospitaliste à l’Unité de soins en toxicomanie et médecine urbaine de l’hôpital Notre-Dame ; Patrick Foucault, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve ; Stéphanie Olière, médecin de famille au GMF du CLSC de Hochelaga-Maisonneuve ; Louis-Christophe Juteau, médecin de famille à la clinique communautaire Dopamed dans Hochelaga-Maisonneuve ; Catherine Laurin-Bérard, médecin de famille au GMF du CLSC Hochelaga-Maisonneuve et au CRID de l’hôpital Maisonneuve-Rosemont ; Fannie Chau, médecin de famille à la clinique Angus, au CLSC de Hochelaga-Maisonneuve et à l’hôpital Notre-Dame

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