Opinion : Maisons des aînés

La solution n’est pas dans le béton

Bien que les intentions soient louables, j’ai la conviction intime, l’enfer étant d’ailleurs pavé de bonnes intentions, que notre gouvernement du Québec fait encore inexorablement fausse route avec sa politique de création de maisons des aînés, nouvelle mouture, à la sauce explosion de couleurs, plantes vertes à volonté et milieux de vie architecturés. Vous me passerez, j’espère, ce dernier qualificatif essentiellement de mon cru.

Faut-il préciser que je cultive un énorme respect pour la façon avec laquelle notre premier ministre, François Legault, assume un leadership et une transparence éloquents ! Il faut reconnaître que l’héritage dont il a écopé est bigrement lourd ! Ce ne sont pas de nouvelles installations à la mode qui vont changer quoi que ce soit au laxisme, à l’indifférence et à l’aveuglement volontaire dont a fait montre la société québécoise envers ses vieux… oui, ses vieux : cela dit sans faire aucun procès d’intentions. Bref, va-t-on enfin comprendre qu’il faut cesser d’investir essentiellement dans le béton et les infrastructures, au détriment de l’infrastructure humaine ! Et tenez-vous bien, cette assertion émane d’un promoteur immobilier, constructeur et développeur toujours actif, bien que septuagénaire ! On ne pourra pas me taxer d’être en conflit d’intérêts !

La crise non encore résorbée dans nos CHSLD, centres de personnes âgées autonomes, ressources intermédiaires et autres est le simple reflet de cette criante et hurlante décrépitude de ce concept de multiplication de milieux de vie, comme on dit au ministère de la Santé, alors que le constat nous démontre que l’on tente de redresser des milieux de déchéance où la dignité élémentaire de la personne est devenue une réalité dépassée par l’ampleur et la lourdeur de la machine bureaucratique ; et ce, nonobstant les efforts et le travail souvent héroïques de celles et ceux qui y œuvrent à longueur d‘année.

On y attend résolument la mort, la délivrance, plutôt que d’y célébrer des parcours de vie réussis. Quelle douloureuse contradiction de notre système dont on dit pourtant qu’il est l’un des meilleurs au monde. À bas les mouroirs !

La réponse au problème fondamental et structurel ainsi qu’aux besoins de ces générations de bâtisseurs, d’ancêtres, d’anciens, d’aïeux ou d’autres prédécesseurs de tous les horizons est et demeure l’option de l’investissement massif et récurrent dans les soins de maintien à domicile. Viendront bien assez vite les soins palliatifs qui auront toujours cependant leur raison d’être, en partie, tout au moins, en institutions.

Mon propos rejoint essentiellement le clair constat que faisait, le 29 avril dernier, dans une lettre d’opinion, Claude Castonguay, le père de notre système de soins de santé universel. *

Dans ma tête de développeur et d’hommes d’affaires à la sensibilité sociale, cependant, il m’apparaît incontournable de devoir s’attacher à réformer de fond en comble notre système de santé, une fois la pandémie classée au chapitre des mauvais rêves.

Et cela passe nécessairement, à l’humble avis qui est le mien, par une décentralisation des pouvoirs, puis par une révision exhaustive des missions de nos CHSLD, RPA, RI, CLSC et autres. Mais avant toute chose, faisons en sorte que chacun des dirigeants de chacune des composantes de ce système soit enfin imputable : fini les hiérarchies multipliées à la verticale dans les recoins desquelles plusieurs gestionnaires se mettent à l’abri des coups de semonce et des remontrances justifiées.

J’ose enfin espérer que le bon sens, le pragmatisme, le goût sincère du changement et la transparence finiront par triompher de tous ces diktats qui ont meublé le paysage politique, économique et gouvernemental des récentes décennies en matière de santé ; dans lequel tout un chacun voulait laisser sa marque avec des réformes qui, visiblement, ont presque toutes lamentablement échoué, à ce chapitre. Retour à la simplicité : pourra-t-on vraiment apprendre de nos erreurs passées ?

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