Fonds fédéraux pour les infrastructures

Québec presse Ottawa de revoir l’échéancier de mars 2023

Ottawa — Le gouvernement du Québec presse le gouvernement Trudeau de revenir sur sa décision « unilatérale » de devancer de deux ans la date limite pour utiliser les fonds provenant d’un programme fédéral pour des projets d’infrastructures.

Au départ, le Programme d’infrastructure Investir dans le Canada (PIIC), doté d’un budget de 33,5 milliards de dollars, devait prendre fin le 31 mars 2025. Mais Ottawa a avisé l’ensemble des provinces dans son plus récent budget, déposé en avril, qu’il devançait l’échéancier au 31 mars 2023.

Cette intention a été réaffirmée dans l’énoncé économique présenté par la ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, il y a deux semaines. Toutefois, ce nouvel échéancier ne s’applique pas aux territoires, qui auront donc droit à deux années supplémentaires.

Le Québec pourrait perdre 2,7 milliards qui se trouvent encore dans l’enveloppe qui lui revient, soit l’équivalent de 37 % des sommes promises par le gouvernement fédéral. Car les sommes qui n’auront pas été utilisées pour financer des projets après le 31 mars resteront dans les coffres d’Ottawa.

Le ministre québécois des Infrastructures, Jonatan Julien, a profité d’une rencontre fédérale-provinciale des ministres responsables des Infrastructures, la semaine dernière à Moncton, afin d’exhorter le ministre des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, à faire marche arrière.

Québec prévoyait utiliser 1,7 milliard de cette somme pour financer des projets de transports et l’autre milliard pour des projets en environnement.

C’est en puisant dans les fonds fédéraux du PIIC que Québec veut notamment financer le prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal, la construction du tramway de Québec et le prolongement de l’autoroute 19, entre les autoroutes 440 à Laval et 640 à Bois-des-Filion.

Le Québec n’est pas la seule province qui risque de perdre ainsi des fonds fédéraux. La Colombie-Britannique, qui pourrait laisser sur la table 661 millions de dollars (17 % de son enveloppe totale), a également demandé au ministre LeBlanc d’accorder un autre échéancier aux provinces, selon des informations obtenues par La Presse.

Dans le cas de l’Ontario, la province a encore droit à 457 millions de dollars (environ 4 % seulement de son enveloppe totale) d’ici le 31 mars 2023. La province a utilisé la part du lion (8,3 milliards) des fonds fédéraux afin d’améliorer le réseau de transports en commun Metrolinx, qui dessert plusieurs municipalités dans la grande région de Toronto et de Hamilton.

« Quand on a signé l’entente au départ, on avait jusqu’en 2025 pour présenter nos projets. On était à environ 66 % de l’enveloppe utilisée. Donc, nous avions encore deux ans pour utiliser le reste de la somme pour d’autres projets. On était correct avec l’échéancier initial. Mais cet été, le gouvernement fédéral a décidé de mettre cela en 2023 d’une façon unilatérale. »

– Une source bien au fait du dossier au gouvernement du Québec

« Il y a tellement de critères imposés par le gouvernement fédéral que ça devient presque impossible d’aller chercher l’argent dans un si court laps de temps, surtout pour des projets qui se trouvent dans les petites municipalités. C’est pour cette raison qu’on tient à ce que l’échéancier soit revu », a ajouté cette source, qui a requis l’anonymat parce qu’elle n’était pas autorisée à discuter de ce dossier publiquement.

En plus de trouver cette décision arbitraire, le gouvernement Legault déplore qu’elle soit survenue quelques mois seulement avant la tenue d’élections provinciales au Québec. En période électorale, une bonne partie de la machine gouvernementale fonctionne au ralenti.

Aucune annonce de financement n’est approuvée par la machine gouvernementale durant cette période qui peut se poursuivre quelques semaines après le jour du scrutin.

« La tenue d’élections est aussi un facteur dont il faut tenir compte. Nous avons été informés en mai ou en juin. Il est évident qu’on ne pouvait pas se précipiter à annoncer une liste de projets à la dernière minute avant les élections provinciales. C’est un peu particulier », a ajouté la source.

Au bureau du ministre LeBlanc, on a indiqué que la date limite du 31 mars est ferme. « Les besoins sont énormes en infrastructures au Québec. Des municipalités attendent du financement pour construire des infrastructures telles que des égouts et des usines de traitement d’eau. Cela retarde aussi la construction de nouveaux logements. Nous sommes prêts à travailler avec Québec pour accélérer les projets d’ici au 31 mars », a indiqué une source gouvernementale.

Selon nos informations, Ottawa entend annoncer une nouvelle mouture d’un programme d’infrastructures au cours des prochains mois. Mais les fonds qui n’auront pas été utilisés d’ici le 31 mars resteront dans les coffres du gouvernement fédéral.

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