Passeport vaccinal

Un facteur de motivation « indéniable »

L’imposition du passeport vaccinal a contribué à limiter l’impact de la quatrième vague au Québec en augmentant la proportion de la population vaccinée, particulièrement chez les jeunes, estiment des experts. Et la vaccination prochaine des 5 à 11 ans permet même d’envisager à un moment donné la fin du port du masque.

Patricia Marcotte-Soto, 23 ans, n’avait pas l’intention de se faire vacciner. « Je voyais les effets secondaires et j’ai eu peur, car le vaccin était nouveau », se remémore-t-elle. La jeune adulte qui s’entraîne beaucoup devait cependant avoir ses deux doses de vaccin contre la COVID-19 pour pouvoir accéder aux salles d’entraînement. Elle a donc surmonté ses craintes et est allée recevoir ses deux doses de vaccin.

Scénario similaire pour David Binette et sa famille, qui ont également décidé de se faire vacciner en septembre après avoir longtemps refusé.

« Je me suis fait vacciner pour avoir le passeport vaccinal, pour continuer à aller au restaurant et pour voyager. »

— David Binette

Quelques mois plus tôt, M. Binette avait contracté le virus et n’avait eu que des symptômes légers. Bien que les personnes ayant eu la COVID-19 puissent attraper le virus à nouveau et souffrir de symptômes plus sévères, le père de trois enfants ne voyait pas l’intérêt de se faire vacciner.

« J’ai eu la COVID-19 en décembre et j’avais seulement des maux de tête et une perte d’odorat. À partir de ce moment-là, j’ai su ce que le virus avait fait sur moi, donc je n’avais pas peur de le rattraper. » L’implantation du passeport a toutefois changé la donne.

Ses deux enfants aînés, âgés de 13 et de 14 ans, se sont également fait vacciner pour ne pas être restreints dans leurs activités. « Au début, mes deux plus vieux ne voulaient pas se faire vacciner, mais ils ont décidé de le faire pour pouvoir participer aux activités scolaires, pour pouvoir faire partie des équipes sportives et faire du sport », dit M. Binette.

Prise de rendez-vous

Après un départ canon, la vaccination avait considérablement ralenti à l’été, particulièrement chez les jeunes adultes de 18 à 29 ans. À la mi-juillet, un peu moins de 71 % d’entre eux avaient reçu une première dose, en deçà de l’objectif de 75 % à l’époque. Et à peine 17 % avaient leurs deux doses.

L’annonce à l’été qu’un passeport vaccinal serait imposé à l’automne a toutefois accéléré la prise de rendez-vous. Deux mois plus tard, plus de 83 % ont désormais obtenu au moins une dose et 74,5 % ont reçu deux doses.

« Le passeport, c’est indéniable, a fait en sorte que les gens ont recouru en plus grand nombre à la vaccination. C’était un facteur de motivation pour les gens qui tardaient ou qui hésitaient à se faire vacciner. »

— La Dre Maryse Guay, professeur à la faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke

Rappelons que la quatrième vague s’est d’abord fait sentir chez les gens dans la vingtaine, qui étaient les moins vaccinés – en faisant abstraction des moins de 12 ans, non admissibles. Alors que dans cette tranche d’âge, on rapportait une vingtaine de cas par jour en moyenne à la mi-juillet, on en signalait 165 à la mi-septembre.

Les données sur les nouveaux cas démontrent qu’après la forte hausse, les jeunes adultes ont été les premiers à voir la hausse des cas freiner puis faire place à une tendance à la baisse. Depuis le sommet d’il y a deux semaines, on observe chez ceux-ci moitié moins de nouveaux cas.

« [Le passeport vaccinal] a certainement contribué parce que c’est un groupe qui a beaucoup de contacts sociaux, et donc, en limitant le nombre d’individus vulnérables parmi les gens de 18 à 29 ans, évidemment, on vient limiter la transmission dans ce groupe d’âge là », a expliqué le DGaston De Serres, épidémiologiste à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) et membre du Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ).

Jusqu’à présent, 12 893 615 doses administrées au Québec. Seuls les moins de 12 ans ne sont pas encore admissibles à la vaccination.

La vaccination chez les enfants approche

Le ministère de la Santé et des Services sociaux a recensé jeudi 655 nouveaux cas de COVID-19. La moyenne quotidienne est actuellement de 636, en diminution de 13 % sur une semaine. Jusqu’à récemment, seuls les moins de 10 ans, qui font partie du groupe non vacciné, affichaient toujours une légère tendance à la hausse. Le vent a tourné au cours des derniers jours, alors qu’ils enregistrent maintenant une baisse de 4 % sur une semaine. Reste que 150 enfants par jour contractent la COVID-19.

La situation est toutefois moins aiguë que ce qu’anticipait la Santé publique, a dit jeudi le directeur national de santé publique, le DHoracio Arruda. Ce dernier s’attendait à plus de cas cet automne.

Et maintenant que la vaccination des 5 à 11 ans approche, le Québec pourrait alléger encore les mesures sanitaires.

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a avancé que la mesure du port du masque obligatoire dans les lieux publics « pourrait être révisée à un certain moment » quand « on en saura plus sur la vaccination des plus jeunes, notamment de 5 à 11 ans ».

« On n’associe pas une couverture vaccinale à : “On enlève le masque.” Ce n’est pas comme ça que ça va fonctionner. Il faut regarder l’effet épidémiologique, c’est beaucoup plus complexe comme analyse. », a nuancé le DArruda.

Toujours en attente de l’homologation d’un vaccin pour enfants, le DArruda a affirmé cette semaine qu’il s’attendait à vacciner le groupe des 5 à 11 ans à la fin octobre, début novembre. Selon les sondages de l’Institut national de santé publique du Québec, 86 % des parents disent avoir l’intention de faire vacciner leurs enfants.

Par ailleurs, le Québec a enregistré jeudi deux nouveaux décès. Ce nombre porte à trois la moyenne quotidienne sur sept jours, ce qui est inférieur à la moyenne observée la semaine dernière. Le nombre d’hospitalisations a augmenté : 311 personnes sont hospitalisées, ce qui représente une hausse de 10 % sur une semaine. On compte 91 patients aux soins intensifs.

Le passeport vaccinal à l’Assemblée nationale

Le passeport vaccinal sera désormais exigé à l’Assemblée nationale. La décision a été prise jeudi par le Bureau de l’Assemblée nationale, le conseil d’administration du Parlement auquel siègent des élus de tous les partis. Majoritaires, la Coalition avenir Québec et le Parti libéral ont appuyé la mesure, alors que le Parti québécois et Québec solidaire étaient contre. La mesure s’appliquera aux élus, aux employés et aux visiteurs. « Je ne comprends pas que les parlementaires ne veuillent pas donner l’exemple aux Québécois, je pense que c’est beaucoup plus une décision politique qu’une décision de santé publique », a déclaré le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, au sujet de l’opposition de deux partis, quelques heures avant le vote du Bureau. Le Dr Horacio Arruda, directeur national de santé publique, a dit « ne pas avoir d’indice » sur le plan épidémiologique qu’une telle mesure serait nécessaire. La totalité des 125 députés est doublement vaccinée. Le Parti québécois s’inquiète de l’imposition du passeport vaccinal dans la « maison de la démocratie » et Québec solidaire craint que cela envoie un message aux entreprises privées les invitant à l’imposer à leurs employés.

— Fanny Lévesque et Tommy Chouinard, La Presse

Dernier ultimatum pour les travailleurs de la santé non vaccinés

Le gouvernement Legault donne un dernier ultimatum aux travailleurs de la santé et des services sociaux qui ne sont toujours pas pleinement vaccinés. Une lettre leur sera envoyée vendredi pour les aviser qu’ils seront retirés de l’horaire de travail à compter du 15 octobre – date de l’entrée en vigueur de la vaccination obligatoire – et qu’ils ne recevront aucune rémunération jusqu’à ce qu’ils soient « adéquatement protégés ». Les employés non vaccinés sont invités à « prendre arrangement » avec leur gestionnaire pour la remise de leur équipement de travail – téléphone, clés et matériel informatique, par exemple –, apprend-on dans une lettre modèle que La Presse a pu consulter. Par ailleurs, les travailleurs doivent aviser leur employeur s’ils prévoient se faire vacciner afin de planifier leur retour au travail, le cas échéant. Le ministre Christian Dubé estime que 6500 employés en contact avec les patients ne sont pas encore adéquatement vaccinés.

— Fanny Lévesque, La Presse

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