À la suite du dépôt de 34 chefs d’accusation contre Donald Trump par la justice new-yorkaise au début du mois d’avril, la mobilisation de la base républicaine derrière l’ancien président des États-Unis a été bien visible. Cette mobilisation donne l’impression que le Parti républicain est uni et qu’il se prépare efficacement en vue de l’élection présidentielle de 2024.

Or, depuis les élections de mi-mandat de novembre 2022, des tensions grandissantes apparaissent au sein du parti. La contre-performance des républicains lors de ces élections, la dominance actuelle de Trump sur le parti et les difficultés marquantes de Kevin McCarthy à se faire élire à la présidence de la Chambre des représentants démontrent que la formation politique est loin d’être unie en vue du prochain scrutin présidentiel.

Depuis plus d’une décennie, et particulièrement depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche en 2016, le Parti républicain est devenu plus idéologique, plus rigide et plus populiste. Depuis, plusieurs personnalités notables ont quitté la formation et son aile modérée a perdu beaucoup d’influence.

Cela dit, il est clair que ce parti demeure fidèle à sa philosophie conservatrice sur plusieurs sujets, comme le rôle limité de l’État et une fiscalité de réduction des dépenses gouvernementales et des impôts. S’ajoute à ces éléments économiques un conservatisme social qui touche directement le choix des individus. On pense à l’opposition à toute forme de contrôle des armes à feu ou encore à la volonté pleinement assumée de réduire l’accès à l’avortement.

La direction du parti

Après 15 tours de scrutin, la prise de contrôle de la Chambre des représentants par les républicains fut laborieuse et cette victoire très mince a bénéficié aux alliés les plus fidèles de Trump. Cette saga sans précédent contemporain a donc laissé des séquelles.

Aujourd’hui, McCarthy n’a pas le choix de composer avec l’aile trumpiste du parti, ce qui limite considérablement sa marge de manœuvre sur le plan législatif. Des représentants, dits de la faction « MAGA » (pro-Trump), comme la représentante de la Géorgie, Marjorie Taylor Greene, et le représentant de la Floride, Matt Gaetz, empêchent souvent McCarthy de trouver des compromis pour faire avancer l’agenda plus modéré du parti. Ils réussissent à imposer des actions qui polarisent davantage les travaux du Congrès.

Lors de la mise en accusation de Donald Trump, l’expression de fidélité de sa base militante fut particulièrement observable au sein du caucus républicain à la Chambre des représentants. Au Sénat, la réaction fut mitigée et tous les observateurs ont remarqué le silence de l’influent leader Mitch McConnell.

Déjà, la course pour choisir le candidat à la présidence indique que des divisions entre Trump et les autres candidatures déclarées vont créer des scissions additionnelles dans le parti.

Pour les républicains qui misent sur l’avènement d’un renouveau, il apparaît que le candidat considéré comme le plus sérieux et le plus menaçant pour l’ancien président Trump, le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, semble perdre de l’initiative, alors qu’il n’a même pas encore déclaré sa candidature officiellement.

Le débat politique

Cela étant dit, les tensions républicaines ne se limitent pas seulement à la question des personnalités. La récente fuite de documents attribuée à un jeune militaire au sujet de secrets reliés à la sécurité nationale et à diverses questions internationales a levé le voile sur une autre scission dans le camp républicain.

Dans un premier temps, le leadership républicain de la Chambre et du Sénat a condamné d’une même voix le geste posé en saluant l’arrestation du principal suspect. Peu après, la représentante trumpiste Marjorie Taylor Greene a plutôt présenté celui-ci comme une victime dans cette affaire. Bien qu’isolée, cette prise de position pour le moins surprenante fut exprimée sans aucune réprimande de la part du leader McCarthy.

Par ailleurs, sur des questions comme l’avortement et le contrôle des armes à feu, le Parti républicain semble plus que jamais inflexible et donc prisonnier de son passé.

Pourtant, le renversement du jugement Roe c. Wade concernant l’accès à l’avortement ainsi que la multiplication des tueries de masse mobilisent les électeurs de façon marquée. Les sondages indiquent que des tranches de l’électorat incluant les jeunes, les femmes et les électeurs indépendants sont davantage portées à s’exprimer et à aller aux urnes. Les élections de novembre dernier ont démontré que cette mobilisation ne favorise pas le Parti républicain.

En outre, l’enquête du Congrès concernant les évènements violents du 6 janvier 2021 laisse des traces. Ceux qui nient la légitimé des résultats de la dernière élection en faveur du président Joe Biden s’affichent de moins en moins. Trump reste toujours fidèle à sa thèse de l’élection volée, mais ce n’est visiblement pas une position qui portera des fruits en 2024, et les principaux stratèges républicains le savent.

Bref, on peut s’attendre à ce que les tensions chez les républicains ne disparaissent pas de sitôt. Si d’autres accusations étaient portées contre Donald Trump, cette fois-ci au sujet de l’élection présidentielle de 2020 ou des évènements du 6 janvier 2021, on pourrait les voir prendre davantage d’ampleur.

Erratum: dans une version précédente du texte, il était indiqué que Marjorie Taylor Green était la représentante de la Caroline du Sud. Or, elle est plutôt la représentante de la Géorgie. Nos excuses.

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