Une équipe à Québec ?

« C’est un dossier actif »

Le commissaire de la Première ligue canadienne de soccer (PLC) en parle. Les partisans le souhaitent. Le sujet est dans l’air depuis cinq ans. Mais où en est réellement le projet d’une équipe d’expansion de la PLC à Québec ?

« C’est un dossier actif », assure Julie Dionne, directrice du service des activités sportives de l’Université Laval, lors d’un entretien téléphonique avec La Presse.

Pourquoi impliquons-nous ce grand établissement de Québec dans cette discussion ? C’est que la venue d’une équipe dans la région de la Capitale-Nationale devra fort probablement passer par la location du stade Telus du Rouge et Or pour quelques années… d’ici à ce qu’une enceinte consacrée au soccer, d’environ 5000 à 6000 places, soit construite.

Julie Dionne, donc, dit avoir été en contact avec « plusieurs groupes » d’investisseurs voulant se porter acquéreur d’une équipe professionnelle. « Et quand je dis plusieurs, c’est plus que deux », ajoute-t-elle.

« Ça fait quand même plusieurs années que je me fais contacter par des groupes potentiels qui ont le goût d’avoir une franchise de la PLC. »

Elle précise que « rien ne s’est concrétisé » encore, mais elle sait qu’« il y a des groupes actifs qui souhaitent venir s’installer à Québec ».

Mark Noonan, commissaire de la PLC, a dit en septembre que sa ligue avait « du momentum à Québec en ce moment », selon des propos recueillis par le quotidien Le Droit. À noter que Noonan avait aussi mentionné Laval et Trois-Rivières à titre de villes potentielles pour une expansion éventuelle dans la province.

« Mais un club de la PLC ne pourrait pas évoluer en permanence à l’Université Laval, a précisé le commissaire. Il faudrait que ce soit une solution à court terme. Nous n’allons pas approuver un club à Québec si un projet de stade n’y est pas rattaché. »

Et qu’en pense la Ville de Québec ?

« On est ouverts, explique à La Presse l’élu responsable des sports à la Ville de Québec, Jean-François Gosselin. On est en mode collaboration. On espère que ça va se concrétiser. »

Il souligne qu’il y avait auparavant quatre groupes intéressés. Aujourd’hui, « un groupe, peut-être deux », est toujours dans la course. Il ne peut les nommer, n’y étant « pas autorisé ». Il indique en revanche qu’un des groupes aurait « des investisseurs européens », sans avoir plus de précision à offrir à ce sujet.

« On voit que c’est vraiment sérieux, dit néanmoins Jean-François Gosselin. On voit que ça avance. On voit qu’il y a une crédibilité auprès de la Ligue. »

« Nous, on est convaincus qu’une équipe de la PLC, ça fonctionnerait à Québec. »

Le stade Telus pour commencer ?

Prenons un pas de recul.

En 2021, un comité a été mis sur pied afin d’évaluer la faisabilité du projet et mesurer le niveau d’intérêt du marché de Québec. Il était composé de plusieurs acteurs du milieu du soccer québécois, dont les anciens président et directeur général de Soccer Québec, Pierre Marchand et Mathieu Chamberland, le directeur général de l’Association régionale de soccer à Québec (ARS Québec), Philippe Bernard, ainsi que l’ancien vice-président exécutif de l’Impact de Montréal Richard Legendre.

Les conclusions de leur étude de marché, dévoilées en octobre 2022, étaient toutes très favorables à la venue d’une équipe professionnelle de la PLC.

Depuis, le mandat de Richard Legendre avec le comité s’est conclu, Marchand et Chamberland ont tour à tour accepté des postes chez Canada Soccer en 2023, et les avancées dans le projet ont semblé ralentir, du moins publiquement.

Mais pour Philippe Bernard, les résultats du rapport et les démarches entreprises peuvent encore servir.

« On a eu des rencontres avec le maire de la ville de Québec » à propos de la potentielle construction d’un stade destiné au soccer, explique le DG de l’ARS Québec. Ce que Jean-François Gosselin nous a aussi confirmé.

« On a eu des discussions pour différents sites potentiels, continue Bernard. On en est venus à une certaine conclusion. Il y a des sites que, malheureusement, la Ville ne pouvait pas débloquer pour diverses raisons. »

Au fil de ses entretiens, il est devenu assez clair qu’un site se démarquait des autres : « le secteur de l’Université Laval ».

« Après avoir regardé les terrains disponibles, ce qu’il était possible de faire au niveau de la Ville, des transports en commun, de l’accessibilité, de la clientèle, je vous dirais que l’endroit numéro un, pour tout le monde à qui on a parlé, c’est pas mal l’Université Laval. »

Mais avec le stade Telus, « la viabilité, elle n’est pas là » à moyen et long terme, dit-il.

L’enceinte du Rouge et Or actuelle, avec ses pistes d’athlétisme, « est beaucoup trop vaste pour créer une atmosphère soccer », croit Bernard. Il en sait quelque chose : l’ARS Québec s’entraîne et joue sur les terrains de l’Université Laval.

Mais Julie Dionne nuance.

« Les pistes d’athlétisme posent un problème en matière d’ambiance et de distance, convient-elle. Mais ça reste un super beau stade quand même. […] Au football, on vit la même chose, on est moins proche du jeu. Mais nous, on a besoin d’une piste d’athlétisme. Donc ça fait partie de la game. »

Elle note aussi que trois équipes actuelles de la PLC jouent dans des stades de football, soit à Winnipeg, Hamilton et Ottawa.

Ce dont Julie Dionne discute avec les groupes intéressés – groupes qu’elle ne nomme pas non plus –, c’est de savoir si le stade Telus peut effectivement devenir la première maison d’une nouvelle équipe de la PLC.

« Ça demeure que nous, il faut faire une étude de marché. Nos installations sont déjà utilisées. Il faut voir si ce sont des choses qui peuvent cohabiter. La Ville, si je ne me trompe pas, fait le même portrait de la situation. »

Une équipe à Québec ?

« Le ballon est dans le camp des promoteurs »

Il y a, derrière le stade Telus, des terrains synthétiques « désuets » qui ont besoin d’être « refaits ».

Pour Philippe Bernard, directeur de l’Association régionale de soccer de Québec (ARS Québec), ce secteur serait un endroit de choix pour y construire une nouvelle enceinte consacrée au soccer.

« Il n’y a pas de secret, estime quant à elle Julie Dionne, directrice du service des activités sportives de l’Université Laval. Les gens du soccer qui viennent pratiquer chez nous savent très bien que nos terrains de soccer actuels devront faire l’objet de rénovations éventuellement. »

Par exemple, dès que tombe une averse, les terrains « ne sont pas capables de se drainer correctement », ce qui les rend « impraticables ».

La construction d’un nouveau stade dans cette zone-là « pourrait être gagnant-gagnant », estime Bernard.

Avec une synergie entre l’ARS Québec, le cégep de Sainte-Foy, le collège Champlain–St. Lawrence, le Rouge et Or, qui en sont déjà des utilisateurs, ainsi qu’une équipe de la Première ligue canadienne (PLC), « il y aurait une belle continuité à faire impliquant toutes les tranches d’âge ».

« Il n’y aurait ça nulle part ailleurs au Canada », avance-t-il.

Québec « n’est pas propriétaire des terrains », rappelle toutefois Jean-François Gosselin, élu responsable des sports à la Ville de Québec.

« Ça appartient à l’Université Laval. » Et si construction il y a, « ça ne fait pas du tout partie » des plans de l’Université de contribuer au financement de la nouvelle infrastructure, souligne Julie Dionne.

« L’Université Laval pourrait peut-être être un endroit de location, évoque-t-elle. Construire un stade, c’est une autre paire de manches. Je pense qu’il y a plusieurs autres terrains [à Québec] qui peuvent se faire aussi. »

La Ville serait-elle prête à participer au financement d’une telle infrastructure sportive ?

« On est ouverts », indique de nouveau Jean-François Gosselin. L’élu ajoute dans la foulée que « rien de concret » n’a été déposé « sur la table ».

« Le ballon est dans le camp des promoteurs. La Ville ne sera pas un promoteur. »

Jean-François Gosselin souligne que la Ville est prête à « collaborer ». Mais « ça dépend toujours du montage financier, des subventions disponibles pour différents programmes, autant provinciaux que fédéraux ».

Il ne s’avance pas non plus sur les coûts potentiels d’un tel projet. « J’ai posé la même question, mais on m’a répondu qu’on n’en était pas là », dit-il.

« De toute façon […] ça se peut qu’il n’y ait même pas de demande à nous faire. Le promoteur pourrait s’organiser avec l’Université Laval et nous, on n’a pas besoin d’intervenir. Ça se peut aussi. »

« Terreau fertile »

Il n’y a pas que le soccer professionnel masculin qui se cherche de nouveaux marchés au pays. Il y a aussi une ligue féminine, surnommée pour l’instant « Project 8 », qui prévoit voir le jour en 2025. La Ville de Québec veut être « tenue au courant » des développements à ce chapitre.

En premier lieu, parce que la région de Québec, identifiée comme une « région par excellence » par Soccer Québec, « est un terreau qui est très, très fertile pour le soccer masculin et féminin », souligne Jean-François Gosselin.

Mais aussi parce que si nouveau stade il y a, l’enceinte pourrait éventuellement être partagée entre des équipes masculine et féminine.

En tant que responsable des sports, Jean-François Gosselin dit être celui « qui est toujours en train de pousser pour qu’on ait plus d’infrastructures de proximité ». Et il rappelle qu’avec une administration et un maire reconnus pour leur amour du sport, « les gens voient [que la Ville] a une ouverture ».

Et surtout, il sent une « effervescence » pour le soccer à Québec, lui qui est impliqué dans ce sport à Beauport.

« La communauté des affaires veut participer. Je le sens beaucoup sur le terrain, principalement parce qu’il y a tellement de gens qui ont touché au ballon rond [dans leur vie]. »

— Jean-François Gosselin

L’intérêt est là de part et d’autre, donc. Mais l’idée de construire une telle enceinte est-elle réaliste dans un avenir rapproché ?

« J’ai envie de dire oui, lance Philippe Bernard. […] J’ai l’impression que dans le cadre de la Coupe du monde qui s’en vient, ça peut susciter l’intérêt de gens de l’extérieur, qui ont leurs propres capitaux, et qui pourraient être intéressés pour construire, si l’occasion se présentait. »

À propos de l’idée générale d’une équipe de soccer professionnelle à Québec, Jean-François Gosselin dit que la Ville « aimerait que ça se fasse ».

« On espère que ça va se faire. »

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