Le dernier manège

Casse-tête équestre

Dans Le dernier manège, le romancier trifluvien Guillaume Morrissette a construit une énigme policière en plein cœur d’une écurie – sorte de huis clos informel parmi les chevaux.

Nous avons parlé à l’auteur de ce 10e roman dont les morceaux s’emboîtent comme un casse-tête où l’on s’amuse à chercher le coupable.

Un ancien champion de compétition équestre est retrouvé mort dans l’un des box d’une écurie de Varennes. Qui l’a tué ? Voici le point de départ du Dernier manège, un roman à énigme classique (un « whodunit »), construit avec un fichier Excel à l’appui.

« C’est le côté cartésien du gars artiste », souligne avec humour celui qui enseigne les mathématiques financières à l’Université du Québec à Trois-Rivières depuis 19 ans – tout en écrivant des polars depuis les 10 dernières années.

« J’aime les énigmes, mais je n’avais jamais osé en faire. Puis quand j’ai commencé à écrire Le dernier manège, je me suis rendu compte que c’était la formule qui allait être adaptée à ce roman-là. »

Le milieu équestre, Guillaume Morrissette l’a découvert au côté de sa conjointe, qui est propriétaire d’un cheval. « Un soir, en revenant de l’écurie, je me suis dit : OK, je tue quelqu’un dans l’écurie et je pars une enquête. Et puis je me suis dit qu’il fallait que l’enquêteur soit un citadin qui n’aime pas les animaux du tout. C’est devenu par définition Antoine Déry. » Ce même sergent de la Sûreté du Québec qui a fait sa première apparition dans ses romans en 2020, avec Quand je parle aux morts. Qui « ne retrouve son bonheur nulle part et qui dit tout ce qu’il pense pas mal tout le temps »…

Il forme avec sa collègue Emma Teasdale un duo d’enquêteurs efficace qui s’échange les répliques comme un ballon entre deux athlètes. Au cours des deux jours que dure l’enquête – et le roman –, ils tentent de reconstituer la dernière journée de la victime en interrogeant toutes les personnes qui pourraient avoir croisé son chemin.

Dans les arcanes d’une microsociété

Au fil des interrogatoires qui se déroulent tous à l’écurie, les enquêteurs découvrent un milieu singulier et plutôt fermé. « C’est une secte, ici », fait même dire l’auteur à la conjointe de la victime, dans le roman.

Guillaume Morrissette a lui-même eu beaucoup de temps pour observer cet écosystème composé de gens de tous les milieux et de tous les âges – dont il n’a pas hésité à s’inspirer pour créer ses personnages… ou leur emprunter quelques noms de chevaux.

« C’est une microsociété. Ce sont vraiment des gens qui sont passionnés par leurs chevaux ; ils dépensent des milliers de dollars pour leur animal qu’ils vont traiter aux petits oignons. Et ils seraient prêts à défendre la vie de leur cheval », dit-il.

Le romancier s’est d’ailleurs donné un malin plaisir à faire plusieurs clins d’œil humoristiques, notamment en repensant à des scènes de dressage dont il a été témoin.

« J’ai eu bien du fun à l’écrire. Je n’ai jamais arrêté de me faire du fun en écrivant tous mes romans, ajoute-t-il. J’ai fait exploser la maison de mes amis, la résidence pour personnes âgées de ma mère… J’ai blasté un ancien bully du secondaire en changeant son nom et en le faisant crever. »

« Le polar est une belle pépinière à fous pour justifier une enquête, un crime. C’est facile de créer un fou dans un polar et ensuite de lui faire faire à peu près tout ce que tu veux. Et si le lecteur trippe en même temps que toi, on a atteint un but », ajoute-t-il. »

– Guillaume Morrissette

Lui-même grand lecteur de littérature policière – d’Henning Mankell à Marie-Ève Bourassa, dont il a adoré la trilogie Red Light –, il insiste sur l’importance du facteur « entertainment » dans le polar. « Ça m’arrive d’arrêter des livres parce que je ne suis pas entertainé », admet-il avec franchise.

Et s’il avoue avoir plus de difficulté à écrire des romans policiers très sombres, c’est parce qu’il est « un gars joyeux de nature ».

« Quand j’écris dark, ça me rend dark. J’aime l’humour léger, j’aime les gens qui ont du plaisir dans la vie. »

– Guillaume Morrissette

Ce plaisir, Guillaume Morrissette s’apprêtait d’ailleurs à le partager avec d’autres auteurs à bord de la caravane littéraire, qui fait la tournée de 45 villes au Québec, jusqu’au 30 octobre, pour aller à la rencontre des lecteurs.

Et vu qu’il est en congé sabbatique de sa charge de cours, il peut se consacrer pleinement à ses projets liés à l’écriture ces temps-ci – ce qui fait tout à fait son bonheur. Il aurait déjà un polar en cours d’écriture, nous apprend-il, même s’il ne peut pas encore nous en dire beaucoup plus… Rendez-vous l’an prochain.


Le dernier manège

Guillaume Morrissette

Saint-Jean Éditeur

416 pages


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