Calepin de campagne

Pourquoi la CAQ a besoin du PCQ

Si François Legault voulait vraiment faire progresser le Québec, il reconnaîtrait dans le Parti conservateur du Québec (PCQ) un précieux allié. Je le sais. Je vous surprends. Mais je ne parle pas ici de sa gestion de la pandémie, qui est nettement contestable, mais de l’offre politique du PCQ, qui mérite d’être représentée dans l’enceinte du Parlement.

Tenons pour acquis que François Legault a véritablement à cœur de « refonder » le système de santé, par exemple. Il a déjà été ministre de la Santé. Il sait très bien que le système est encrassé et que les professionnels partent ou fuient vers des milieux de travail plus épanouissants. Clouée sous le poids des corporatismes et de dogmes idéologiques dépassés, la Coalition avenir Québec (CAQ) est figée.

Et puis, curieusement, avec l’avènement du PCQ, la CAQ propose maintenant l’ajout d’une contribution plus importante de mini-hôpitaux privés où seraient dispensés des soins payés à même la carte d’assurance maladie (ce qui est dans la plateforme conservatrice).

Au micro de Paul Arcand mercredi matin, François Legault va plus loin. Voilà qu’il n’exclut pas la mixité de la pratique médicale, ce qui autoriserait les médecins à pratiquer à la fois dans le secteur public et dans le secteur privé.

Doit-on le croire ? Bien sûr que non. Nous sommes en campagne électorale. Rien de ça ne se fera… à moins d’avoir des voix conservatrices à l’Assemblée nationale.

Des voix qui encourageraient une véritable décentralisation du système de santé telle que prônée par le Réseau québécois des médecins pour la décentralisation du système de santé québécois.

Autre exemple. Québec solidaire voudrait convertir les écoles privées en écoles publiques. Pourquoi ? Est-ce qu’elles ne vont pas bien, nos écoles privées ? Mais pourquoi pas faire l’inverse, alors ? Marcel Boyer1, fervent défenseur d’une social-démocratie concurrentielle, reconnaît que « la gouvernance de notre système éducatif, basée sur une cogestion centralisée État-syndicats, est minée par les conflits d’intérêts endémiques » au détriment des élèves, des enseignants et j’ajouterais même de la prospérité économique du Québec.

François Legault a déjà été ministre de l’Éducation. Il sait tout ça… Boyer propose d’abolir la gestion publique de l’école. Pourquoi pas ? Faisons le test ! Osons ! Et comment se fait-il, bon sang, que le thème de l’éducation ait été autant négligé durant cette campagne électorale ? Pas d’espoir là… à moins d’avoir des voix conservatrices au Parlement.

On dit que François Legault a une obsession, soit celle d’augmenter la prospérité du Québec. Or, malgré tous les défis devant nous, on est loin des années où le Québec bâtissait, où il n’était pas tabou de parler de développement économique et de prospérité. Où on reconnaissait que la création de la richesse était essentielle pour augmenter la qualité de vie de tous. La liberté économique n’est-elle pas ce qui nous assure d’un environnement créateur d’opportunités ? La concurrence n’est-elle pas garante d’une plus grande efficacité ?

La prospérité n’est pas la priorité de Québec solidaire, qui prône la décroissance en imposant une lutte radicale contre les gaz à effet de serre (GES). Et elle n’est pas non plus la priorité du Parti québécois, pour qui toute solution passe par l’indépendance du Québec. François Legault aura beau peser sur tous les leviers étatiques pour accroître le développement économique, le rôle de l’État est d’assurer des taux d’imposition raisonnables qui incitent au travail, une fiscalité avenante aux entrepreneurs, d’encourager les entreprises à viser une plus grande productivité, et de leur assurer une main-d’œuvre qualifiée.

Sur le thème du développement économique, encore ici, aucun autre parti que le PCQ ne peut servir d’allié à la CAQ et elle en aura bien besoin. Car au Québec, maintenant, de puissants lobbies décident de ce qui est acceptable ou pas.

Le choc démographique a frappé. La pénurie de main-d’œuvre est criante. Nos systèmes publics échouent et les déficits d’entretien de nos infrastructures sont honteux. L’incurie, quoi. La santé, l’éducation, la justice, les infrastructures, pourtant missions essentielles de l’État, sont devenus des sujets « plates ». Désormais, on détourne le regard des véritables problèmes qui touchent des milliers de citoyens pour choisir l’utopie : des cibles complètement loufoques de diminution des GES pour les uns, et un pays souverain pour les autres.

Le vote du 3 octobre prochain déterminera le poids qu’occuperont les différents partis de l’opposition à l’Assemblée nationale. Selon les sondages, la CAQ frôle une centaine de candidats sur 125. Une catastrophe sur le plan de la démocratie représentative. Assurons-nous d’une véritable opposition.

Assurons-nous d’une représentation diversifiée au Parlement. Les citoyens ne méritent pas l’arrogance d’un premier ministre et un style de leadership qui divise et confronte les citoyens. Dans le contexte d’une fragmentation aussi importante des partis de l’opposition, un chef d’État doit reconnaître qu’il doit faire preuve de hauteur.

Car si ce mode de scrutin lui donne près de 100 députés sur 125, il serait malaisant de gouverner en souverain. Après tout, il ne les aura qu’avec tout juste un peu plus du tiers des électeurs. Mince exploit.

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