Comment ils sont passés de la parole aux actes
Un premier « café réparation » à Montréal
Réparer un appareil, raccommoder un vêtement : les citoyens de Villeray auront désormais un endroit où faire tout cela eux-mêmes, avec l’ouverture cette semaine du premier « café réparation » (repair café) de la métropole.
Retrouver le plaisir de faire les choses par soi-même. Au coin de sa rue.
C’est ce que voulaient rendre accessible aux gens de Villeray les instigateurs du projet Mon Atelier de quartier, qui ouvrira ses portes vendredi, à l’angle des rues Jean-Talon et de La Roche, à Montréal.
« C’est le garage que tu n’as pas », illustrent Annick Girard et Jean-Philippe Roy pour décrire ce projet atypique.
Car les « cafés réparation » et autres « répar-o-thons », où les participants s’entraident pour donner une seconde vie à divers objets défectueux ou abîmés, sont généralement des événements ponctuels.
« Nous, c’est permanent, c’est ouvert et accessible en tout temps », explique Annick Girard.
Mais ils ne se voient pas comme des concurrents, bien au contraire. Leur établissement pourrait justement accueillir ce type d’événement.
« C’est un entrepôt d’outils disponibles pour qu’on soit capable de réparer à peu près n’importe quoi », enchaîne Jean-Philippe Roy.
Le projet qu’ils ont mis sur pied avec trois autres partenaires s’articule autour de trois axes : une « matériothèque », une salle consacrée aux ateliers de formation et un café zéro déchet, ce dernier volet se voulant une vitrine pour les deux autres.
« C’est une manière d’aller rejoindre monsieur et madame Tout-le-Monde, qu’on n’aurait peut-être pas rejoints en faisant juste un projet de réparation », explique Annick Girard.
Un « service public » hyperlocal
Mon Atelier de quartier offrira ainsi à ses membres une banque d’heures d’utilisation de ses équipements.
Des « spécialistes » ayant différentes expertises assureront également une présence régulière pour aider les gens venus réparer quelque chose.
« Juste ici, dans le quadrilatère, il y a beaucoup de personnes avec beaucoup de compétences », constate Jean-Philippe Roy, évoquant l’ébénisterie et la couture.
Ce constat conforte les instigateurs dans leur volonté de créer une plaque tournante hyperlocale, à l’échelle du quartier.
« Tu pars avec ta paire de jeans, c’est le fun de pouvoir la réparer au coin de la rue », illustre Jean-Philippe Roy.
Mon Atelier de quartier aimerait d’ailleurs essaimer dans d’autres quartiers, ses idéateurs envisageant autant d’ouvrir eux-mêmes de nouveaux ateliers ou d’aider d’autres personnes à le faire, une fois que le leur sera bien sur les rails.
« Il y a de la place pour ça dans tous les quartiers, dans toutes les villes. C’est presque un service public ! »
— Annick Girard
L’intérêt pour leur commerce est palpable dans le quartier : les gens s’arrêtent et s’enquièrent avec enthousiasme de l’avancée des préparatifs, raconte l’équipe.
Cet intérêt est rassurant, puisque Mon Atelier de quartier est un « laboratoire », explique Annick Girard.
« Le modèle d’affaires qu’on est en train de monter n’existe pas », ajoute Jean-Philippe Roy.
Les cinq partenaires ont d’ailleurs acheté l’immeuble commercial qui abrite leur projet, estimant que c’est ce qui rendrait leur aventure possible.
Et parmi les locataires des autres locaux, il y a notamment des entreprises ou organismes ayant eux aussi une vocation écoresponsable.
Induire le changement sans le forcer
Mon Atelier de quartier se veut aussi une façon d’amener les gens à adopter naturellement des comportements écologiques, sans les imposer.
« Quand tu as fabriqué ou réparé toi-même quelque chose, tu comprends plus ton appareil, sa complexité, et après ça, tu en prends soin et tu veux qu’il dure longtemps ; c’est là que se fait le changement de comportement », estime Annick Girard.
« Moi, je ne sais pas quoi faire pour les changements climatiques, à part m’inquiéter. Mais là, en réparant mes affaires, ça me permet de consommer moins puis j’ai l’impression de faire quelque chose qui compte », ajoute Jean-Philippe Roy.
Et l’exercice est hautement gratifiant, dit-il, évoquant la jubilation de son fils de 11 ans qu’il avait amené à un atelier pour démonter et réparer son téléphone intelligent.