Lutte contre le VIH

Une avancée montréalaise prometteuse

Chez les patients atteints du VIH bien traités, la charge virale peut être indétectable, mais le virus reste tapi, prêt à reprendre l’offensive. Un chercheur montréalais pense avoir trouvé une importante pièce de ce casse-tête : deux molécules du virus sont responsables de sa capacité à échapper au système immunitaire humain.

« Il faut ces deux protéines du VIH pour que les cellules infectées du VIH soient inaccessibles au système immunitaire », explique Andrés Finzi, virologue à l’Université de Montréal. Il est l’auteur principal d’une étude publiée mardi dans la revue Cell Reports. « Si on cible ces deux molécules, on a beaucoup plus de chances qu’un vaccin ou un traitement fonctionne. »

La découverte de M. Finzi explique aussi pourquoi certaines molécules (des anticorps), prometteuses en essais précliniques, ont finalement des résultats décevants.

« Dans certaines souches du VIH, une mutation empêche le bon fonctionnement de ces deux molécules. C’est probablement ce qui explique l’efficacité plus grande des anticorps testés in vitro avec de telles souches. »

– Andrés Finzi, virologue à l’Université de Montréal

Ces deux protéines cruciales, appelées Nef et Vpu, empêchent l’apparition d’une porte d’entrée appelée CD4 à la surface des lymphocytes T. On présume que ces lymphocytes sont l’un des principaux endroits où se cache le VIH chez les patients sous trithérapie. Sans les « portes d’entrée » CD4 à leur surface, les lymphocytes T infectés ne peuvent être ciblés par le système immunitaire.

Quand le VIH est indétectable chez un patient bien traité, le virus se réfugie dans des réservoirs. « Il est à l’état latent, donc impossible à reconnaître par le système immunitaire et impossible à cibler par les médicaments, dit M. Finzi. Mais quand la trithérapie arrête, il se réveille et recommence à infecter les cellules du patient. »

« L’une des avenues possibles pour guérir durablement les patients est d’éliminer le virus des réservoirs en le réveillant de sa latence, pour que les médicaments ou le système immunitaire puissent le trouver, dit M. Finzi. Si on le réveille en entravant le fonctionnement de Nef ou Vpu, ça pourrait être possible. »

Ouvre-boîte

L’étude de Cell Reports démontre le rôle crucial de Nef et Vpu pour empêcher les lymphocytes T d’afficher des « portes d’entrée » CD4, leur lien avec le système immunitaire, sur leur surface. Des résultats précliniques pour traiter le VIH avec des anticorps s’étaient révélés faussement encourageants, puisque la protéine Vpu de cette souche de VIH était défectueuse, illustre le chercheur montréalais.

Dans Cell Reports, M. Finzi montre également qu’avec un « ouvre-boîte » (ou « signaleur ») qui reproduit la capacité de CD4 à signaler une cellule infectée au système immunitaire, le VIH ne peut plus se cacher et est attaqué de front. « Nous avons testé chez la souris et les résultats sont clairs. »

Il s’agit de souris « humanisées », génétiquement modifiées pour reproduire l’infection au VIH chez l’humain. Les protéines Nef et Vpu n’entravent pas l’activité du signaleur cellulaire.

Quelle est la prochaine étape ? « On pourrait reproduire l’ouvre-boîte pour une stratégie d’éradication du VIH dans les réservoirs, ou alors trouver un inhibiteur des protéines Nef ou Vpu. »


EN SAVOIR PLUS

562 milliards US
Somme consacrée à la recherche mondiale sur le VIH entre 2000 et 2015

Source: SOURCE : UNIVERSITÉ DE WASHINGTON

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