Question de propriété

Les prêteurs privés font de bonnes affaires

Certains emprunteurs se tournent désormais vers des prêteurs privés, au prix d’un risque plus élevé. La raison ? Le resserrement des règles d’octroi de prêts, mis en place par Ottawa.

« La demande de prêts auprès des prêteurs privés a augmenté », confirme Denis Doucet, directeur chez Multi-Prêts, un réseau de courtiers en prêts hypothécaires. 

Car, explique-t-il, « le prêt privé n’est pas réglementé. Vous et moi pouvons décider de devenir prêteurs privés aujourd’hui ». Ces prêts sont plus risqués et donc à intérêts plus élevés. « Quand un emprunteur prend ces genres de prêts là, il y a plus de risques de se trouver dans une situation difficile s’il perd son emploi, affirme M. Doucet. Si votre paiement mensuel coûte 200 $ de plus [qu’une hypothèque contractée avec une banque], un événement malheureux sera plus problématique pour vous. »

Des règles plus sévères pour tous

Pour protéger les consommateurs contre une éventuelle hausse des taux d’intérêt, Ottawa a introduit en 2016 des tests de résistance pour les personnes qui souhaitent contracter un prêt hypothécaire, mais qui ne disposent pas d’au moins 20 % de mise de fonds. En fonction de ces règles, la capacité d’emprunt des clients est mesurée en regard du plus élevé des taux officiels de la Banque du Canada ou du taux conventionnel des banques à charte majoré de 2 %. 

De nouvelles règles entrées en vigueur le 1er janvier 2018 étendent cette mesure à tous ceux qui désirent faire un prêt hypothécaire.

Or, ces mesures ne sont imposées qu’aux institutions financières soumises aux lois fédérales, dont les banques à charte. Ceux à qui les banques refusent un prêt risquent donc d’être plus nombreux, et un certain nombre d’entre eux pourraient se tourner vers les prêteurs hors banques.

Desjardins s’ajuste aux règles fédérales

Même s’il n’est pas tenu de le faire par la loi parce qu’il n’est pas une banque à charte, le Mouvement Desjardins a choisi d’appliquer volontairement les règles fédérales du Bureau de la surintendance des institutions financières (BSFI) et de faire passer les mêmes tests de résistance à ses emprunteurs hypothécaires. 

« C’est un bon moyen de protéger les gens contre les variations de taux et aussi, de contribuer à créer un encadrement uniforme », a indiqué une porte-parole de Desjardins, Diane Lamarre. Mme Lamarre a ajouté qu’il est encore trop tôt pour savoir si la mise en place de ces règles aura un impact sur les affaires de Desjardins.

L’Autorité des marchés financiers (AMF) prépare pour sa part une mise à jour de sa Ligne directrice sur les prêts hypothécaires dans le but d’harmoniser les règles d’octroi de prêts entre les institutions financières fédérales et provinciales. Cette mise à jour devrait entrer en vigueur le mois prochain, selon un porte-parole de l’AMF, Sylvain Théberge. « Elle s’appliquera à toutes les institutions financières faisant des affaires au Québec, sauf les banques », a-t-il précisé.

Qui sont les prêteurs privés ?

Les prêteurs privés sont majoritairement des particuliers ou des groupes de particuliers qui détiennent du capital et qui sont prêts à l’investir pour générer des intérêts tout en acceptant un certain niveau de risque. Les annonces des prêteurs privés sont souvent repérables dans les journaux ou sur le web grâce à des indices indiquant qu’un bon dossier de crédit n’est pas nécessaire. Actuellement, un prêt immobilier venant d’un prêteur privé est offert à un taux qui varie entre 10 et 12 % pour une hypothèque de premier rang. Pour une hypothèque de second rang, le taux varie entre 12 et 14 %. Dans le jargon immobilier, un prêt hypothécaire est dit de premier rang quand le prêteur a une priorité de remboursement en cas de défaut de paiement et de la vente de la propriété. Quant au détenteur d’un prêt hypothécaire de second rang, il est remboursé après le détenteur du prêt hypothécaire de premier rang.

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