Des vidéos à 12 000 images par seconde

Le génie québécois vient de réaliser une avancée dans le monde de l’imagerie à pixel unique et ultrarapide. En effet, le professeur Jinyang Liang et son équipe ont breveté un dispositif pouvant diffuser des vidéos à 12 000 images par seconde en utilisant la modulation de la lumière.

Afin de comprendre l’intérêt de cette innovation réalisée à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), le professeur Liang commence l’entrevue avec une mise en contexte. « La plupart des téléphones intelligents et des caméras utilisent des capteurs 2D, qui sont utiles seulement avec les fréquences de la lumière que nos yeux peuvent voir, explique-t-il. Pour avoir accès à un spectre de lumière plus large, comme l’ultraviolet et différents degrés d’infrarouge, les capteurs 2D n’y arrivent pas. À moins d’avoir une caméra très chère, qui offre des performances très basses. »

Un prototype prometteur

La technologie à un pixel s’avère une option attirante. Malheureusement, les caméras de ce type qui existent déjà sont contraignantes. « Si je veux utiliser une caméra monopixel existante pour capter quelque chose qui bouge assez vite, il n’y a aucun espoir », dit le professeur.

Des chercheurs ont trouvé des méthodes pour régler ce problème : faire des trous dans une pièce de métal et la bouger rapidement. « Ça fonctionne et c’est mieux, mais le filtre de métal doit être fixe. Si je veux changer quelque chose, je dois concevoir un autre filtre pour reconfigurer le tout. Ça manque de flexibilité. »

C’est ici que le prototype flexible et ultrarapide du professeur Liang et de son équipe vient changer la donne.

« Notre dispositif conserve les avantages des appareils existants, en se débarrassant des désavantages. »

– Jinyang Liang, professeur à l'Institut national de la recherche scientifique

C’est une petite révolution en photonique, soit la branche de la physique qui se concentre sur l’étude et la fabrication de composants permettant la génération, la transmission, le traitement ou la conversion de signaux optiques.

Des années de développement

Il a fallu deux ans de travail, de multiples séances de remue-méninges et des mois de travail pour aboutir à un prototype fonctionnel. Un processus que Jinyang Liang qualifie d’aussi organique que difficile. Surtout quand il pense à la chaîne d’approvisionnement durant la pandémie. « Lorsque certains produits n’étaient plus disponibles, ça nous rendait parfois fous de constater que les fournisseurs ne savaient pas quand ils le seraient de nouveau. On devait sans cesse développer des solutions de rechange et des plans C à nos plans B. »

Piloté par l’étudiant Patrick Kilcullen, le projet a mené à la création d’une caméra qui pourra être utilisée pour capturer en images les propriétés optiques de certaines nanoparticules et pour étudier la combustion.

« Si on utilise une caméra normale pour analyser le feu, on va s’aveugler, car la flamme est trop lumineuse. Notre caméra peut filtrer une grande partie de cette lumière et analyser ce qui se passe. »

– Jinyang Liang, professeur à l'Institut national de la recherche scientifique

Il souhaite également intégrer le dispositif au système de détection térahertz des appareils de surveillance dans les aéroports. « On va explorer ça dans l’avenir. »

Très excités par le potentiel commercial de l’innovation, les chercheurs veulent attirer des entreprises et pousser la recherche encore plus loin. « Ça va prendre plusieurs années avant de commercialiser la nouvelle version de notre caméra. »

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