Chronique

Laissez Caroline Néron tranquille !

C’est du jamais vu en quatre saisons et demie de District 31. Cette déferlante de commentaires vils et vicieux, tous dirigés envers une de ses actrices, Caroline Néron, alias Pascale Lanier, une escorte de luxe qui a gravité dans l’orbite de la proxénète Paule Lefebvre.

Dès que la comédienne est apparue dans le populaire feuilleton de Radio-Canada, lundi soir, elle a été insultée, injuriée et ridiculisée, autant sur sa vie privée et sa faillite que sur son apparence physique.

Ce fut tellement violent que les modérateurs de la page Facebook officielle de District 31 ont dû tout effacer et placarder une mise au point comme quoi ces remarques n’avaient vraiment pas leur place sur un forum public. Insérez ici un long soupir de découragement.

Oui, il y a encore des gens frustrés qui vomissent leur haine sur une personnalité publique comme Caroline Néron. C’est décourageant et tellement petit. Critiquer son jeu, oui. La planter à propos de son visage, non.

« Les gens font rarement ça dans la rue. Les réseaux sociaux donnent une fausse impression d’impunité. Plusieurs personnes pensent qu’ils sont protégés par une sorte de cinquième mur », m’explique le producteur Michel Trudeau de chez Aetios, qui fabrique District 31.

Heureusement, Caroline Néron a la couenne dure. Je lui ai parlé mercredi et elle relativisait la « crise » déclenchée par son arrivée dans District 31.

« Je m’attendais un peu à ça. Je l’avais mentionné à mon agente, qui ne me croyait pas. Ça montre à quel point certaines personnes sont malheureuses si elles sentent le besoin de cracher leur venin sur Facebook. Je trouve ça triste. Il y a une certaine lourdeur, qui ne me touche pas vraiment, je dirais. »

— Caroline Néron

Selon le producteur Michel Trudeau, psychologue de formation, « les gens vivent de l’isolement en pandémie, ce qui exacerbe des problèmes de santé mentale. Comme producteur, c’est notre responsabilité de publier ce message d’avertissement qui dit : non, c’est assez », tranche-t-il.

Figure controversée du showbiz québécois, Caroline ne lit presque jamais ce que les internautes publient sur elle. « J’ai choisi ce métier-là, en toute connaissance de cause. C’est sûr que je trouve ça plate, mais je suis habituée. Moi, je tourne dans District 31, je tripe, j’adore ça. Je veux juste ne pas gâcher leur succès. La pandémie m’a apporté beaucoup de zénitude. Je suis célibataire, je fais ce que je veux et je le fais avec passion et bonheur », note Caroline Néron en entrevue.

Le personnage de prostituée campé par Caroline Néron n’a pourtant pas commis de geste immonde, ce qui déclenche parfois la furie des téléspectateurs. Sa Pascale Lanier, élégante dans son long manteau crème, a été la maîtresse de Louis Bourgoin (Stéphane Demers), sous-ministre et ex-patron du Service de police du Grand Montréal (SPGM). C’est tout. Rien pour la traiter de tous les noms sur Facebook.

La période actuelle est déjà difficile à vivre pour tout le monde. Un peu plus de cordialité, de bienveillance et de douceur ne nuirait pas sur les réseaux sociaux. Peut-on demander ça au père Noël ?

Véro, entre L’ombre et la lumière

Pour faire un lien boiteux avec la première portion de cette chronique, vous souvenez-vous de la comédienne qui incarnait la sœur de la fameuse tenancière Paule Lefebvre dans District 31 ?

Il s’agit de Véronique Bannon, qui apparaît dans l’excellente série documentaire L’ombre et la lumière animée par Véronique Cloutier. Le premier épisode est offert sur le volet gratuit d’ICI Tou.tv et les quatre autres vous attendent dans la section payante Véro.tv de l’Extra.

La célébrité, la reconnaissance des pairs, la peur de perdre l’amour du public et de devenir un « has been » : ça paraît que le sujet passionne Véronique Cloutier, encore ébranlée par l’échec de Votre beau programme. Elle y mène des entrevues franches, parfois confrontantes, mais remplies d’empathie.

Le premier épisode contient une rencontre étonnante avec Michèle-Barbara Pelletier, qui a pris sa retraite du milieu artistique après la fin de La promesse, en 2012, au sommet de sa popularité. Merci, bonsoir, vous ne me reverrez plus à la télé, a-t-elle dit à son équipe. Jamais elle n’a regretté sa décision de se consacrer à sa famille. Elle est fascinante à entendre.

Michel Goyette, qui a été Vincent Gauthier dans Watatatow pendant 13 saisons, travaille aujourd’hui dans la démolition et la décontamination. Le téléphone a arrêté de sonner. Et il faut payer les factures. Ça prend beaucoup d’humilité pour l’admettre à la caméra.

Véronique Bannon, vue dans Virginie et Watatatow, a un rapport plus complexe avec le besoin de vivre dans l’œil de ses fans. Elle le transpose maintenant sur Instagram, en espérant décrocher de nouveaux rôles à la télé. Sa transparence est désarmante.

Il y a parfois des longueurs dans les épisodes, dont la portion avec Manuel Hurtubise. Reste que L’ombre et la lumière n’a pas été assemblé pour que le téléspectateur prenne en pitié la « pauvre » vedette qui vend aujourd’hui du linge dans un centre commercial. Pas du tout. Il s’agit d’une incursion honnête et non complaisante dans la vie de ceux et celles qui se font toujours demander : « Pourquoi on ne vous voit plus à la télévision, hein ? »

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