Gare aux fournitures scolaires !

Des produits toxiques et cancérigènes détectés dans de nombreux produits

Crayons, stylos, surligneurs, tubes de colle : des substances chimiques toxiques et cancérigènes ont été trouvées dans de nombreuses fournitures scolaires en Europe. Certains de ces produits se trouvent même sur les rayons des magasins québécois.

À la fin d’août, l’association de défense des consommateurs en France a publié un rapport alarmant : 40 % des fournitures scolaires testées sont fabriquées avec des composants potentiellement dangereux.

« Les fabricants – y compris les grandes marques – exposent ainsi très largement les enfants à des doses parfois considérables de composés toxiques, cancérigènes, allergisants ou à des perturbateurs endocriniens », peut-on lire sur le site de l’Union fédérale des consommateurs Que choisir.

En juillet, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), l’équivalent de Santé Canada en France, avait aussi révélé la présence de plusieurs familles de substances chimiques dangereuses dans les fournitures scolaires, telles que des métaux lourds, comme le nickel et le plomb, du benzène et des perfluorés.

« S’il n’y a pas de réglementations ou de consignes entourant leur vente, il y a de bonnes chances que l’on retrouve aussi ces substances dans les fournitures scolaires [du Québec] », soutient Maximilien Debia, professeur au département de santé environnementale et santé au travail de l’École de santé publique de l’Université de Montréal.

Gare aux stylos !

Les résultats de l’enquête se sont révélés particulièrement préoccupants pour les stylos billes, qui s’avèrent « remplis de cancérigènes ». Certains produits des marques Bic et Paper Mate, que l’on retrouve également au Québec, contenaient des impuretés classées « cancérigènes probables ».

« Si on est exposé dès notre jeune âge à des substances potentiellement cancérigènes et que l’on continue tout au long de notre scolarité à être exposé aux mêmes fournitures de bureau, le risque d’avoir un cancer est multiplié », explique la directrice du Centre Eau Terre Environnement et professeure associée à l’Institut national de la recherche scientifique, Louise Hénault-Ethier.

Les enfants, en se tachant les doigts avec les encres ou en mâchant le bout de leurs stylos et de leurs crayons, peuvent être exposés à un grand nombre de ces composés nocifs. Tant qu’il n’y aura pas de réglementation plus stricte, l’association de défense des consommateurs déconseille aux parents d’acheter à leurs enfants des stylos billes.

De nombreux allergènes

Les surligneurs s’en tirent plutôt bien dans leur composition. L’Association déconseille toutefois « vivement » le Stabilo Boss original, que l’on trouve dans de nombreux magasins québécois.

« Son encre est bien trop remplie d’allergènes », dénonce l’Association sur son site internet. En effet, des isothiazolinones, un produit qui augmente le risque de déclenchement d’allergies, ont été trouvés en grand nombre dans le produit.

L’Association recommande aussi d’éviter le stylo FRIXION en gel effaçable bleu de la marque Pilot, qui contient également une forte teneur en allergènes.

Bonne nouvelle, les feutres à dessiner ultralavables de Crayola se trouvent sur le tableau des honneurs, sans le moindre composé cancérigène ou allergisant.

Éviter les paillettes

Fluorescentes, brillantes, parfumées. Bien qu’attirantes, ces fournitures scolaires devraient être évitées, soutiennent les experts.

« Je conseillerais aux consommateurs de privilégier les fournitures ne contenant ni substances parfumantes ni paillettes ou autre artifice pouvant induire des comportements détournés par les enfants, tels que le “machouillage”, voire l’ingestion », a indiqué par voie de communiqué Céline Dubois, chef de projet à l’ANSES.

Mme Hénault-Ethier est du même avis. « Il faut s’éloigner le plus possible des crayons et des effaces qui sentent les arômes, parce que dans ces parfums-là se cachent de nombreux composés chimiques qui peuvent être toxiques », indique-t-elle.

Pour limiter l’exposition aux produits chimiques néfastes, la spécialiste suggère d’opter, dans la mesure du possible, pour des produits faits à base de papier ou de carton et le moins possible de produits plastiques. « J’aimerais aussi beaucoup que les écoles encouragent à réduire l’acquisition de matériel neuf, pour réduire le gaspillage et l’exposition aux produits chimiques », dit-elle.

S’inspirer de la Californie

Mme Hénault-Ethier se désole qu’il n’y ait pas d’encadrement réglementaire ou d’étiquettes permettant aux consommateurs de faire des choix éclairés, comme c’est fait ailleurs dans le monde.

Depuis janvier 2019, la Californie interdit aux écoles de commander ou d’acheter tout produit contenant des substances toxiques ou cancérigènes pour les élèves de la maternelle à la 6année. Au secondaire, leur utilisation est autorisée uniquement si le produit porte une étiquette informant l’utilisateur de la présence d’ingrédients dangereux, des effets potentiels sur la santé et des instructions pour une utilisation sûre.

Afin d’éclairer les parents et de préserver la santé des enfants, la Californie fournit une liste des fournitures à ne pas acheter. Une seconde liste répertoriant le matériel répondant aux exigences est aussi diffusée sur le site internet de l’Institut des arts et des matériaux créatifs (en anglais).

Certains de ces produits « contenant des substances toxiques ou cancérigènes » sont pourtant vendus au Québec. « Ce serait bien si le ministère de l’Éducation ou d’autres organismes du Québec pouvaient aussi faire des bases de données de produits recommandés ou à éviter », dit Mme Hénault-Ethier.

Les marques Bic, Paper Mate et Pilot n’ont pas répondu aux demandes de La Presse. De son côté, l’entreprise Stabilo a indiqué « garantir la sécurité et la qualité de ses produits ». « STABILO BOSS répond à toutes les exigences légales et est sûr, qu’il soit utilisé comme prévu sur le papier ou même en cas d’utilisation involontaire, par exemple en marquant accidentellement la peau », a déclaré l’entreprise.

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