Irak

Le Québécois « Wali » au cœur d’une violente offensive contre l’EI

Wali, cet ancien tireur d’élite québécois parti combattre le groupe armé État islamique en Irak, a participé ce week-end à une violente offensive dirigée par les Kurdes au sud de Kirkouk. Les balles lui ont sifflé autour de la tête. « Ç’a explosé même pas à 100 mètres de moi, dit-il. Je suis surpris de m’en être tiré sans une égratignure. »

L’attaque, lancée vendredi matin, a permis aux Kurdes de reprendre une dizaine de villages détenus par les djihadistes de l’EI depuis l’été 2014. « Au début de l’offensive, les soldats kurdes avaient le visage long. Je n’avais jamais vu autant de bombes exploser. Les ambulances se promenaient partout. Il y avait des pièges dans les maisons, des tirs de mortier. Ça explosait de partout. On a quand même subi beaucoup de pertes. C’était le chaos total », raconte le tireur d’élite, joint hier par téléphone.

Après que quelques soldats peshmergas (le nom donné aux soldats kurdes irakiens) et lui eurent pris d’assaut un petit village avec un bulldozer, ils ont vu un véhicule s’approcher au loin. Le camion était surmonté d’un drapeau blanc, en signe de reddition. « Mais tout à coup, les tirs ont commencé à venir du véhicule. Puis le camion a explosé. J’ai senti le souffle de l’explosion. J’ai vu le champignon au-dessus de ma tête », raconte celui qui se bat sans équipement de protection.

« C’était clairement des kamikazes qui se sont fait exploser près de nous. »

— Wali, tireur d’élite québécois

Parmi les blessés de l’explosion se trouvaient plusieurs civils, dont une fillette. « J’ai essayé de la soigner, mais il n’y avait plus rien à faire pour elle. Ça m’a beaucoup secoué. C’est affreux de se servir des civils comme ça », lance-t-il.

Jay, un combattant volontaire américain qui a aussi participé à l’attaque, dit avoir vu une explosion semblable très près de lui. « C’est une voiture piégée qui a explosé à 20 mètres de moi. Quelques instants auparavant, je me trouvais debout juste dessus. J’ai été chanceux. » Les rapports officiels font état de huit soldats tués parmi les Kurdes, et d’une trentaine de morts parmi les djihadistes.

DJIHADISTES ET RÉFUGIÉS

Plusieurs maisons ont été incendiées par les Kurdes pour forcer l’ennemi à abandonner ses positions défensives. Wali dit avoir filmé une bonne partie de l’opération militaire. Il alimente régulièrement la communauté Facebook « La torche et l’épée » de ses récits et photos, et compte réaliser un documentaire à son retour au Canada pour « convaincre la population qu’il faut envoyer des armes lourdes, des soldats et de l’expertise militaire là-bas pour défaire l’État islamique ».

Selon Wali, les combattants du groupe armé État islamique qui tiennent les villages au sud de Kirkouk sont de plus en plus démoralisés par les frappes aériennes de la Coalition. Plusieurs djihadistes tentent de se faufiler parmi les centaines de réfugiés qui fuient la région. « Ils se rasent la barbe, mais beaucoup se font prendre aux checkpoints. Les Asayish [les services de renseignements kurdes] leur mettent un sac sur la tête et les emmènent dans une base je ne sais pas où. »

Ce sont souvent les photos que ces faux réfugiés transportent dans leurs téléphones intelligents et ordinateurs portables qui les trahissent.

DES OCCIDENTAUX AUX CÔTÉS DES PESHMERGAS

C’est le deuxième affrontement majeur auquel l’ex-militaire canadien participe depuis son arrivée en Irak, en juillet dernier. Il a d’abord rallié les rangs des Lions de Rojava, une organisation de combattants kurdes qui recrute beaucoup d’Occidentaux pour aller se battre en Syrie.

« Les recruteurs ont saisi mon passeport et mon équipement de communication à mon arrivée. Je n’ai pas trop aimé ça », explique Wali. Les Lions exigeaient au surplus que Wali s’engage par contrat à combattre à leurs côtés pour une période de six mois.

Le tireur d’élite québécois a donc quitté les Lions pour aller se battre aux côtés des peshmergas dans la région de Kirkouk. Beaucoup de volontaires occidentaux qui se battent bénévolement contre l’EI se trouvent à ses côtés. Lui-même fait équipe avec un ex-soldat américain.

« Je dirais qu’il y a environ 80 volontaires occidentaux comme moi dans la région. La moitié sont des Américains, et le reste sont des Britanniques et des Européens. »

— Wali, tireur d’élite québécois

« Au début, les peshmergas me surprotégeaient. Je n’avais même pas d’arme et je commençais à regretter de ne pas être parti avec les Lions. Je me demandais si mon voyage n’allait pas se résumer à passer mes journées à boire du thé », explique-t-il en riant.

Mais peu à peu, les soldats kurdes l’ont accepté comme un des leurs. Wali a même pu leur transmettre certaines de ses connaissances militaires, mais de façon limitée. « C’est une milice citoyenne, vraiment. Ce n’est pas une armée qui s’entraîne beaucoup. Ils n’ont pas assez de munitions pour se pratiquer à tirer comme on pouvait le faire dans l’armée [canadienne], constate l’ex-soldat. Mais malgré tout, ils sont tellement nombreux à vouloir combattre l’EI qu’ils finissent par les écraser par le nombre. »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.