Société

Dur d’inscrire les jeunes aux activités à l’automne

Il faudra être rapide – et chanceux – pour inscrire ses enfants à des activités sportives, à l’automne. En raison de la pandémie, Sports Montréal offre 50 % moins de places dans les cours de natation pour jeunes. « À l’automne 2019, nous avions 985 places et cette année, nous offrons 475 places », indique Barbara Poinsaut, directrice aux programmes jeunesse et aux communications chez Sports Montréal.

Cet organisme à but non lucratif propose une large gamme de sports – golf, hip-hop, water-polo, kickboxing, basketball, etc. – aux enfants et aux adultes. « En général, nous avons diminué de 40 % le nombre de places », précise Barbara Poinsaut. Les inscriptions en ligne pour la session d’automne auront lieu le 1er septembre à midi, et plusieurs risquent de se retrouver le bec à l’eau (à défaut du maillot de bain…).

Bouger est « plus important que jamais »

Bouger est pourtant « plus important que jamais », selon Emmanuel Poirel, professeur à la faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal. « On constate que les effets de la COVID-19 sur la santé psychologique vont perdurer, dit-il. Il y a beaucoup de jeunes qui ont souffert et qui souffrent encore. L’activité physique a un effet sur la santé psychologique, c’est important de le souligner. On a aussi démontré son importance sur le développement des compétences sociales, sans oublier ses effets sur le système immunitaire. »

Or, en cette rentrée particulière, « les élèves sont assis à leur place plus que jamais », observe Emmanuel Poirel. À l’école, ce sont les enseignants qui se déplacent d’une classe à l’autre. Même dans les cours de récréation, les enfants doivent rester dans un espace limité au lieu de galoper librement.

20 minutes pour s’inscrire au tennis

À Tennis Montréal, les inscriptions aux cours récréatifs pour jeunes ont eu lieu le 18 août. En 20 minutes, c’était complet. « Ç’a été un peu plus vite que d’habitude, mais honnêtement, ça se remplit toujours en 20 minutes », dit Gabriel Trottier-Hardy, président de Tennis Montréal.

À l’automne, Tennis Montréal ne propose des leçons qu’au stade IGA du parc Jarry. Les cours donnés au complexe Claude-Robillard et dans des écoles primaires de quartiers défavorisés sont suspendus. Pour limiter les risques, le nombre de participants par séance a été réduit. Les balles ne sont utilisées qu’une fois toutes les 24 heures et les parents des joueurs doivent rester hors du stade, sauf s’ils accompagnent des tout-petits.

Parents à l’eau dans les cours de natation

Dans les cours de natation, c’est le contraire : la Croix-Rouge demande maintenant qu’un parent accompagne les enfants dans l’eau jusqu’au niveau Junior 4. L’objectif ? Permettre aux moniteurs de rester à deux mètres des nageurs, sans mettre leur sécurité en péril.

À Sports Montréal, des locaux qui accueillaient 20 personnes n’en recevront que 14. « On a aussi ajouté du temps entre chaque activité, de 20 à 30 minutes, pour désinfecter les salles et permettre aux gens d’entrer et de sortir sans se rencontrer », explique Barbara Poinsaut. L’organisme demande aux participants d’arriver en tenue sportive pour éviter de fréquenter les vestiaires. Une exception est prévue pour les nageurs, qui ont évidemment le droit d’enlever leur maillot mouillé (on y revient…).

Des jeunes déjà sédentaires

Imposées par la Santé publique partout au Québec, ces restrictions risquent d’accroître le nombre d’enfants et d’adolescents sédentaires. « Déjà, avant la pandémie, les jeunes ne bougeaient pas assez », rappelle Jean-Philippe Chaput, professeur agrégé à la faculté de médecine de l’Université d’Ottawa.

À peine 19 % des jeunes de 6 à 17 ans étaient considérés comme « actifs » au Québec en 2018-2019, selon l’Institut de la statistique du Québec. Les enfants sont moins actifs lorsqu’ils « manquent d’amis avec qui faire de l’activité physique » et que « le coût de l’activité est élevé », d’après l’Enquête québécoise sur l’activité physique et le sport.

Selon un sondage effectué auprès de 1500 parents canadiens, la situation était plus critique pendant le confinement. Publiés dans l’International Journal of Behavioral Nutrition and Physical Activity, les résultats démontrent que seulement 4,8 % des enfants et 0,6 % des adolescents étaient alors suffisamment actifs. L’encouragement des parents, la participation de ces derniers à des activités physiques et la présence d’un chien à la maison étaient associés à un mode de vie plus sain.

Repenser le modèle

« C’est sûr que les parents ont un rôle très important à jouer, mais ils ne sont pas les seuls, observe Jean-Philippe Chaput. Sinon, l’écart va grandir entre les jeunes qui sont actifs et qui vont continuer de l’être, parce qu’ils ont des parents actifs, plus nantis et plus éduqués, et les autres. »

Même si l’été est presque fini, pourquoi ne pas offrir plus d’activités sportives à l’extérieur, où les risques de transmission sont réduits ? « Il faut repenser notre modèle, confirme Jean-Philippe Chaput. Parce que si la pandémie dure longtemps, il y aura des effets à long terme sur la santé. »

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