Emballages

Mettre les choses au vert et au clair

« Il n’y a pas de solution miracle », laisse tomber Marie-Hélène Gravel, au bout du fil. « Pas de panacée. Rien de blanc ou noir. »

Ou de vert et pas vert.

Ingénieure et chargée de projet chez Solinov, grande spécialiste du contenu de nos poubelles, ou plus précisément de ce qu’on peut y mettre pour que ce soit composté ou recyclé, elle n’a pas de réponse courte et simple quand on lui demande ce qui est bon ou pas côté emballages.

On aime juste le carton ? Le papier ?

Et on pense quoi, au fait, des plastiques dits compostables ?

Aucune des réponses n’est courte.

Le plastique compostable, on lui dit oui si c’est pour nous aider à balancer nos contenants de nourriture sales dans le compost.

Mais pour une douzaine de rouleaux de papier de toilette ? Là, c’est non. Parce qu’on va avoir tendance à le mettre au recyclage. Et ça, ça n’aide pas les systèmes de récupération qui veulent du vrai plastique.

Mais après les pailles, les sacs d’épicerie, ne devrions-nous pas tous continuer notre chasse aux plastiques pour les sortir de notre quotidien ?

Ne devrions-nous pas être choqués de voir tous ces sachets, pots, tubes bien plastifiés… ?

Pas nécessairement…

Avec des spécialistes d’Éco Entreprises Québec (EEQ), Mme Gravel vient de cosigner un rapport, intitulé Emballages biodégradables et compostables : aussi verts qu’on le pense ?, pour lequel elle s’est plongée dans ces univers de la boîte, du sac, du contenant dans le but d’aider EEQ à mieux accompagner les entreprises qui veulent faire des choix écologiques pour leurs emballages. Pour consolider leurs choix personnels, pour répondre aux demandes des consommateurs.

Parce qu’on est arrivé à un point dans l’Histoire où pas mal tout le monde veut savoir quoi faire pour être plus vert. Et pas mal tout le monde est choqué par la quantité de boîtes, de papier, de plastique, de bouteilles, de carton qui se retrouvent dans nos bacs de recyclage.

Sauf que la réponse trouvée par les chercheurs est typique, la même que lorsqu’on demande ce qui est mieux, le bio ou le local, ou quel est le meilleur moyen de manger des produits de la mer. Et cette réponse, c’est : « Ça dépend. »

Ça dépend de ce qu’on veut emballer. De quels types d’emballages dits compostables ou biodégradables on parle. De la destination des emballages en question. De dizaines d’autres facteurs.

Pour le papier et le carton, tout pourrait être simple. Dans leur forme la plus épurée, le papier et le carton sont compostables, récupérables et recyclables.

Mais ça, c’est s’il n’y a pas de plastique, bien sûr. Parce que certains emballages, comme les enveloppes à bulles ou les tasses à café en carton, ont un élément de plastique ajouté. Même chose pour ces bols et autres contenants cartonnés dont on se sert beaucoup en ce moment, pour tous les plats à emporter. On se dit que c’est mieux que le gros polystyrène, mais il y a du plastique ajouté lors de leur fabrication pour les rendre imperméables.

Donc, bon ou pas bon ?

Ça dépend. Quel est ce plastique ? Celui qui se dégrade facilement ? Le compostable ? Le traditionnel ? À base de pétrole, d’amidon, de maïs, de cellulose ? Et comment est-ce que le centre de tri de matières résiduelles sera censé savoir quand ledit contenant arrivera chez lui ?

Cet univers très vaste du détritus est d’une complexité infinie.

« C’est compliqué même pour ceux qui connaissent ça », admet Mme Gravel.

***

Mais on peut essayer de s’y retrouver un peu, pour comprendre que certains mots clés vastement utilisés par les commerçants ne veulent pas dire grand-chose.

« Biodégradable, c’est un mot qui ne veut pas dire grand-chose. »

— Geneviève Dionne, directrice de l’écoconception et de l’économie circulaire à Éco Entreprises Québec

« En fait, tout est biodégradable. La question, c’est combien de temps ça prend pour se dégrader. »

Même chose pour la « compostabilité ». Et il y a du « laxisme », dit Mme Dionne, sur l’utilisation du terme.

Le gouvernement devrait nettement mieux réglementer ça. Mettre les choses au vert et au clair.

Pour aider aussi bien les entreprises qui cherchent des emballages écolos que les consommateurs qui veulent faire des choix verts à prendre de bonnes décisions.

Car dans un univers aussi complexe, ça n’a pas de sens que ce soit aux individus, tant les consommateurs que les personnes en entreprise qui cherchent à emballer, de tout apprendre pour être en mesure de faire des choix cohérents avec leurs valeurs environnementales.

C’est au gouvernement de légiférer pour s’assurer que certains produits ne soient pas sur le marché, carrément, ou que certaines appellations ne soient pas permises.

Mme Dionne croit qu’il est important de rappeler que « du plastique, c’est du plastique. Ça ne nourrit pas les écureuils et les marmottes », par exemple. Et ce, même si on affirme qu’il est compostable. Des particules pourront se retrouver dans l’environnement. Il faut que les enjeux soient limpides.

Et certains produits dits biodégradables contiennent aussi des dérivés du pétrole. Ils n’ont pas tous poussé dans la terre.

Dans certains cas, ils réagissent et se dégradent à la lumière, donc il est inutile de les envoyer dans des poubelles où ils ne verront pas un rayon de soleil.

Bref. Tout ça est compliqué.

Et si on veut que nos systèmes de récupération et de recyclage produisent de la matière résiduelle de qualité, et on sait que ça peut valoir cher, il va falloir commencer à faire le ménage.

Nos poubelles méritent bien ça.

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