Opinion : Réforme de la Loi sur les langues officielles

Une occasion d’enrichir tout le Canada

Le dépôt du récent énoncé de vision en matière de langues officielles de la ministre Mélanie Joly est un moment à marquer d’une pierre blanche. Pour la première fois depuis la création du régime fédéral des langues officielles, l’importance d’appréhender les rapports entre l’anglais et le français à travers le prisme de l’égalité réelle est reconnue.

Cela signifie qu'au lieu de présumer que de l’égalité juridique des deux langues officielles découle une égalité de fait, on reconnaît enfin que tel n’est pas le cas et que le français, autant dans son foyer principal, le Québec, qu’ailleurs au pays, connaît un certain déclin. Le français mérite, non seulement en tant que langue officielle, mais aussi en tant que grande langue mondiale, d’être promu plus vigoureusement partout au Canada.

Un nombre considérable de francophones ont vécu dans leur quotidien – de manière expérientielle, pourrait-on dire – ce que signifie l’asymétrie des rapports de pouvoir entre les langues officielles du Canada. Il faut donc saluer ce courageux changement de la philosophie politique fédérale à cet égard.

Si l’on peut certes espérer que les propositions principales de cet énoncé de vision se concrétisent rapidement dans des modifications législatives et réglementaires, cette reconnaissance formelle de l’asymétrie des rapports de pouvoir entre le français et l’anglais au Canada envoie indubitablement un message fort à tous les francophones du pays et à leurs institutions ainsi qu’à leurs compatriotes anglophones. Elle envoie également un signal important quant à de possibles et fructueuses collaborations entre le gouvernement fédéral, celui du Québec et les grandes organisations francophones québécoises, comme l’Université de Montréal. Ceux-ci doivent promouvoir le français en tant que grande langue canadienne et internationale, en toute égalité avec des partenaires institutionnels francophones hors Québec.

Faciliter les collaborations

L’énoncé de vision fédéral, en ce qu’il admet le principe de la primauté du français au Québec dans le respect des droits de la minorité anglophone, devrait en effet rendre plus aisées de telles collaborations. On doit le reconnaître, depuis un demi-siècle, les relations entre le Québec francophone et les communautés acadiennes et francophones en dehors du Québec n’ont pas toujours été simples.

En revanche, le nouvel alignement des intérêts auquel l’énoncé de vision fédéral ouvre la porte pourrait permettre de resserrer encore davantage les liens entre les francophones du pays.

L’Université de Montréal peut jouer un rôle important à cet égard. Elle est la plus grande université francophone des Amériques et une université de recherche de renommée mondiale. Nous incitons par conséquent les gouvernements du Canada et du Québec à appuyer tangiblement les universités québécoises en vue de favoriser l’accès au savoir en français à travers le Canada et le monde, en soutenant des partages d’expertises en recherche et en enseignement avec des partenaires francophones hors Québec et en appuyant l’accès à la science en français.

Il faut aussi favoriser un plus grand rayonnement du français en aidant à la traduction vers l’anglais d’œuvres-phares des sciences sociales et humaines francophones qui demeurent, vu la langue de leur publication, souvent inconnues dans les cercles anglophones. La langue est vectrice de culture, et la richesse des cultures francophones au Canada et dans le monde doit aussi se transmettre partout au pays.

L’Université de Montréal fait depuis longtemps rayonner la culture francophone sur toute la planète au profit autant du Québec que du Canada. Elle le fait en français, mais aussi dans bien d’autres langues. Pour elle, la langue française est à la fois un ancrage et un tremplin. Aidons-nous à participer, par des mesures ciblées, à cet effort de redressement et de promotion du statut du français au Québec, au Canada et à l’international.

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