COVID-19

Le corridor Québec- Montréal passe au rouge

Québec — La majorité des municipalités de la vallée du Saint-Laurent entre Québec et Montréal passent en alerte rouge, ce qui inclut Trois-Rivières et les MRC de Bécancour, Nicolet-Yamaska, Drummond et Portneuf.

À la veille du congé de l’Action de grâce, le gouvernement Legault voit d’un bon œil la « certaine stabilité » des bilans des derniers jours, mais prévient qu’« il est encore trop tôt » pour crier victoire.

Pour les nouvelles MRC et municipalités qui passent au rouge, les mesures concernant les bars et les salles à manger des restaurants entreront en vigueur dès samedi soir, alors que celles visant le milieu scolaire seront actives à compte de mercredi prochain.

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a rappelé jeudi que « les gestes qu’on va poser ce week-end vont faire une grosse différence dans les 10 à 15 prochains jours », alors que le Québec enregistrait pour la journée 1078 nouveaux cas positifs de citoyens infectés par la COVID-19 et 9 morts supplémentaires. Le nombre de personnes hospitalisées a aussi augmenté de 16.

Si le nombre de nouveaux cas s’est stabilisé depuis quelques jours à l’échelle nationale, le bilan s’est particulièrement alourdi dans la région de Québec. La Capitale-Nationale a rapporté jeudi 199 nouveaux cas de COVID-19, franchissant ainsi le cap des 25 cas par 100 000 habitants, le plus haut taux dans la province.

« Je pense que ça vient, en tout cas, me conforter qu’on a pris la bonne décision de fermer les restaurants, les bars, les salles de spectacles, réduire les sports en équipe, mettre les masques pour les jeunes au secondaire. Je pense qu’il faut continuer à réduire les contacts sociaux », a dit plus tôt en journée le premier ministre François Legault.

Sur le plan du bilan général, un écart important entre le chiffre rapporté quotidiennement et le nombre de cas réellement confirmés à cette date s’est creusé dernièrement.

Le gouvernement avait par exemple évoqué un record de 1364 nouveaux cas pour le 5 octobre. Or, une fois ceux-ci répartis selon la date réelle où les tests ont été déclarés positifs en laboratoire, le bilan pour cette journée était plutôt de 832.

À quand l’atteinte d’un plateau ?

En point de presse, jeudi, le ministre Christian Dubé a laissé entendre que le Québec pourrait être en voie d’atteindre un certain plateau, alors que l’augmentation du nombre de cas recensés dans les derniers jours s’est stabilisée. « Quand on voit qu’on a une certaine stabilité […], on se dit : peut-être qu’on est en train de réussir », a-t-il dit, avouant toutefois qu’il est encore « trop tôt pour le dire ».

Le DHoracio Arruda, directeur national de santé publique, a toutefois apporté des nuances. « Là, on est en train d’essayer de revenir vers un plateau. On veut rester sur le plateau, on ne veut pas monter », a-t-il dit, avant d’ajouter : « On a appliqué un traitement. Il faut laisser le traitement faire son effet pour être capable de voir. » La durée du plateau peut également être difficile à déterminer. Après une rapide croissance au printemps à partir de la mi-mars, le nombre de cas s’était stabilisé autour de 800 par jour au début avril. Le bilan quotidien a oscillé autour de ce nombre jusqu’à la mi-mai, soit pendant 50 jours, avant de diminuer graduellement.

Pour la plupart des spécialistes, le Québec est encore loin d’avoir atteint le pic de progression de sa deuxième vague de contamination à la COVID-19. « Pour le moment, la réalité, c’est qu’il y a une hausse des infections chez les personnes âgées. Les hôpitaux se remplissent, lentement mais sûrement, chaque jour », a expliqué à La Presse le DMatthew Oughton, spécialiste en maladies infectieuses à l’Hôpital général juif (HGJ) et à l’Université McGill.

Le médecin rappelle qu’il faut d’abord voir la tendance générale de la multiplication des cas depuis le début septembre sans isoler les derniers jours.

« On est encore en hausse, et je pense que nous devrions continuer d’avancer dans nos mesures, en présumant que ça continuera d’augmenter. »

— Le Dr Matthew Oughton

À l’Université de Montréal, l’experte des politiques publiques en santé Marie-Pascale Pomey émet un son de cloche similaire. « Il faudra attendre les fameux 14 jours, soit le premier cycle du défi 28 jours, avant d’analyser vraiment les choses en profondeur. Autrement, ce serait un peu prématuré de le faire », a-t-elle dit à La Presse.

Pour éviter que le long week-end de l’Action de grâce fasse voyager le virus encore plus à travers le Québec, le ministre Christian Dubé a annoncé jeudi la mise en place de points de contrôle assurés par la Sûreté du Québec (SQ), notamment pour informer les gens qui se rendent au Saguenay–Lac-Saint-Jean.

Arruda défend son travail

Après avoir affirmé à la fin septembre qu’il « n’a rien à cacher », ouvrant la porte à une plus grande transparence quant à la publication des avis qu’il donne au gouvernement sur les mesures sanitaires à prendre, le DArruda a réitéré jeudi que ses recommandations étaient pour la plupart faites de façon verbale. « Ça va tellement vite qu’on n’a pas le temps de s’asseoir », a-t-il dit.

« Ce que le premier ministre vous dit, c’est vrai. […] Puis il a toujours écouté ce qu’on s’est dit », a-t-il ajouté, alors que l’opposition talonne François Legault pour avoir accès aux avis de santé publique.

« Le jour où ils feront de la bullshit, excusez-moi d’utiliser ces termes-là, [mais] le jour où je sentirai que c’est de la bullshit, bien, le directeur Arruda, il ne sera pas là parce que le Dr Arruda n’a pas une crédibilité à perdre. »

— Le Dr Horacio Arruda

Questionné pour savoir s’il craignait de perdre la confiance des Québécois, alors que ses messages semblent moins faciles à faire passer depuis la rentrée, le DArruda a reconnu que la situation était difficile.

« Au début, c’était facile. Confiner tout le monde, les gens écoutaient. Là, on fait un choix, on pénalise un, on pénalise l’autre. Il y a des complotistes. J’ai des menaces de mort. Je reçois des courriels injurieux tous les jours. Tous les jours. Mais je garde la tête haute », a-t-il dit.

— Avec Fanny Lévesque, Pierre-André Normandin et Thomas de Lorimier, La Presse

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