Relance économique

Les femmes payeront encore la note

Demain, le ministre des Finances du Québec, Éric Girard, annoncera de mauvaises nouvelles. En raison de la pandémie de COVID-19 et du confinement qui s’en est suivi, l’économie québécoise s’est mise à tourner au ralenti. D’un seul coup, nous sommes passés d’une situation de surplus budgétaires avec un très bas taux de chômage au contexte de crise que nous connaissons depuis mars.

Nous savons déjà ce que nous réserve le scénario du gouvernement : il faudra réduire le déficit au plus vite, protéger notre cote de crédit et contrôler les dépenses. Le premier acte de cette mauvaise pièce de théâtre se tiendra demain. L’austérité fera son grand retour, cette fois à la sauce caquiste. Comme c’est souvent le cas, le financement des services publics à la population écopera et les femmes seront les dindons de la farce.

La relance passera encore par les secteurs masculins

Avec le dépôt du projet de loi 61 le 3 juin, le gouvernement a campé le décor : organiser la relance économique en s’appuyant sur le secteur de la construction et les infrastructures. Classique, cette intrigue est aussi éculée : bien que ce soient très majoritairement des femmes qui offrent les services nous permettant de passer à travers la pandémie et que ce soient des femmes qui succombent en majorité à ce virus, la relance passera encore par les secteurs masculins.

Et l’austérité qui suivra afin de payer les coûts exorbitants de cette crise sera assumée par qui ? Vous le devinez, elle visera une fois de plus les secteurs féminins, dont le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS), qui est composé à plus de 80 % de femmes.

On ne leur offre déjà que de maigres augmentations salariales en deçà de l’inflation (5 % en trois ans). En imposant des mesures d’austérité, le gouvernement évitera d’investir dans leurs conditions de travail et dans l’attraction et la rétention de la main-d’œuvre au sein du RSSS. Tout cela maintiendra la surcharge de travail et la détresse psychologique qui en découlent.

On a déjà joué dans ce navet, c’est exactement le plan que Jean Charest et le Parti libéral ont suivi à la suite de la crise économique de 2008, tant et si bien que les salariées du RSSS accusent maintenant un retard salarial de 24 % par rapport à leurs vis-à-vis des sociétés d’État et travaillent à se rendre malades.

En restant collé sur ce scénario clairement inefficace, le gouvernement entretiendra la discrimination systémique envers les milieux majoritairement féminins. Au lieu de préparer le RSSS à faire face à une deuxième vague de COVID-19, le gouvernement Legault le fragilisera en dévalorisant ses salariés. Il doit impérativement changer de plan.

La crise climatique sera aussi une crise de santé publique

Cette mise à jour économique doit aussi nous préparer à affronter une autre crise de santé publique, celle qui découlera de la crise climatique.

Elle surchargera le RSSS, les dégâts économiques seront importants et il sera alors beaucoup plus difficile d’aplatir la fameuse courbe comme ce fut le cas lors de la première vague de COVID-19.

Comme pour toute crise de santé publique, c’est en prévention que les investissements sont les plus rentables. Nous avons aujourd’hui l’occasion de transformer notre économie.

Pour éviter le pire, le Québec doit contribuer à l’effort et réduire ses émissions de gaz à effet de serre de moitié d’ici 10 ans, pour les éliminer complètement d’ici 2050. Il ne suffit pas d’investir dans les transports en commun. Il faut aussi le faire dans l’électrification du transport, encourager la production locale et mettre fin à notre dépendance au pétrole.

Le gouvernement n’a plus le choix, il doit revoir son scénario. Il est plus que temps de sortir des conventions établies afin d’éviter de commettre les mêmes erreurs que celles qui ont entraîné la situation actuelle.

Une chose est claire, les femmes en ont assez d’être les dindons de la farce. Cette relance devra être féministe et écologiste, c’est vital.

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