Relance de Montréal

Des déficits pour la Ville et des subventions pour les commerces

Tandis qu’un comité d’experts suggérait mardi que Montréal puisse s’endetter pour relancer son économie, un autre comité recommandera ce mercredi matin un remède de cheval pour éviter l’hécatombe au centre-ville. Voici leurs propositions.

Rendre la rue Sainte-Catherine piétonne sur cinq kilomètres, offrir des stationnements gratuits, présenter des spectacles spontanés ainsi que donner des subventions de plus de 30 000 $ par commerce. Voilà certaines des mesures de relance qui seront présentées aux Montréalais mercredi matin.

Le sous-comité sur la vitalité commerciale du centre-ville piloté par Monique Simard, du Quartier des spectacles, et Michel Leblanc, de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM), dévoile son plan de sauvetage. Le centre-ville fait face à une tempête parfaite d’ici décembre : pas de festivals, pas de touristes, 30 % seulement des étudiants et 20 % des travailleurs dans les tours de bureaux.

« La zone centre-ville de Montréal est à risque parce que sa vitalité repose en grande partie sur l’achalandage généré par les 310 000 travailleurs, 11 millions de touristes et 100 000 étudiants qui fréquentaient le secteur, mais n’y reviendront pas avant plusieurs mois encore. Le spectre de faillites en série plane, ce qui dénaturerait le territoire et lui ferait perdre son attrait pour longtemps », lit-on dans le plan d’action.

« Si le programme d’aide au loyer n’est pas prolongé et assoupli, si le compte d’urgence n’est pas augmenté, le centre-ville de Montréal risque l’hécatombe avec des centaines de fermetures de restaurants, bars et commerces et une pandémie de locaux vides. »

— Michel Leblanc, PDG de la CCMM, dans un entretien téléphonique

Le sous-comité Leblanc-Simard relève du comité consultatif pour la reprise et la relance de Montréal mis sur pied par la mairesse Valérie Plante à la suite de la crise de la COVID-19.

Pour sauver la belle saison, le comité s’en remet aux artistes qui auront ainsi un revenu et des spectateurs cet été. Si le souhait du comité est exaucé, le Partenariat du Quartier des spectacles disposera d’un budget « conséquent » pour préparer des parcours déambulatoires agrémentés de spectacles de rue spontanés.

« On va remplacer les festivals et les spectacles en salle par des surprises, résume Monique Simard, présidente du conseil d’administration du Partenariat. On aménage cinq grandes places publiques sur Sainte-Catherine et les alentours. Nos deux orchestres symphoniques, le cirque Les 7 doigts, les comédiens des salles de théâtre seront tous mis à contribution », précise-t-elle, au bout du fil.

Des déficits pour favoriser la relance de Montréal

La Ville de Montréal devrait être autorisée à contracter des déficits et à émettre des « obligations spéciales de relance » pour se relever de la pandémie qui l’a touchée plus durement que toute autre ville au Canada.

C’est la principale recommandation du rapport présenté mardi par le comité d’experts mandaté par l’administration municipale pour trouver des moyens de relancer l’économie de la métropole.

Présidé par Luc Godbout, titulaire de la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke, le comité a remis mardi un rapport de 25 pages qui contient une quinzaine de recommandations.

D’entrée de jeu, le comité prévient que les défis qui attendent la Ville sont de taille. La crise a mis fin abruptement à plusieurs années de croissance exceptionnelle pour Montréal. Avec le nombre le plus élevé de cas et de morts au Québec, la Ville devra attendre plus longtemps le retour à la normale et anticipe déjà un manque à gagner équivalent à 500 millions dans son budget de 6,2 milliards pour 2020.

Comme la situation financière de la Ville est tellement serrée en période normale, Montréal devrait demander au gouvernement du Québec la levée « temporaire » de l’obligation d’équilibrer son budget et de pouvoir émettre des « obligations spéciales de relance », suggère le comité. Ce qui ne doit pas l’empêcher de recevoir le soutien financier nécessaire des gouvernements fédéral et provincial, précise-t-il.

Avec des moyens financiers accrus, la Ville pourrait prolonger les reports de taxes foncières et accorder des rabais aux secteurs les plus durement touchés par la pandémie. La possibilité de faire des déficits est « un outil additionnel pour la Ville », estime Luc Godbout.

« C’est pertinent, ça donne de l’oxygène », a commenté de son côté la mairesse Valérie Plante. Elle a soutenu qu’elle n’avait pas l’intention de faire un déficit en 2020, mais que la réalité actuelle lui laissait peu de choix. « Je peux taxer ou couper dans les services, ou les deux », a-t-elle rappelé.

Le comité suggère aussi à la Ville d’épauler ses petites entreprises en favorisant l’achat local, mais aussi en favorisant la reprise collective des entreprises qui feront faillite par des OBNL. Les locaux laissés vacants par les fermetures de restaurants et de bars pourraient être repris par la Ville pour leur donner une vocation collective.

Favoriser le télétravail

L’administration municipale devrait favoriser le télétravail de son personnel et offrir du soutien aux PME qui veulent développer le travail à distance, mais ne pas oublier les commerçants du centre-ville qui dépendent de la venue des travailleurs sur le territoire, prévient le comité.

Le groupe d’experts qui a travaillé bénévolement à la réalisation de ce rapport propose également d’autres pistes de réflexion à la Ville, qui vont dans le sens de la transition écologique et la réduction des inégalités. L’appui aux demandeurs d’asile ayant participé à la lutte contre la COVID-19 et l’offre de connexion WiFi gratuite dans les quartiers défavorisés font partie de ces suggestions supplémentaires.

Principales recommandations du plan d’action du comité Simard-Leblanc

Modifier et prolonger jusqu’en septembre le programme d’aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial

Adapter le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes : le prêt sans intérêt passe de 40 000 $ à 60 000 $ et une partie est susceptible d’être convertie en subvention de 10 000 $ à 30 000 $

Offrir le stationnement gratuit

Aménager de grandes terrasses et marchés éphémères et les exempter des frais d’occupation

Prévoir des stations sanitaires

Définir la rue Sainte-Catherine comme une avenue piétonne d’Atwater à Papineau

Piétonniser d’autres artères sur l’axe nord-sud, pour relier le Vieux-Montréal à la Sainte-Catherine

Accorder au Partenariat du Quartier des spectacles un mandat pour l’animation de la zone

Aménager quatre grands stationnements pour vélos

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