Ports de Montréal, Québec et Trois-Rivières

L'heure des alliances stratégiques a sonné

Ottawa  — Les administrations portuaires de Montréal, de Québec et de Trois-Rivières sont catégoriques : l’heure des alliances stratégiques a sonné pour renforcer l’attrait du fleuve Saint-Laurent comme corridor commercial de premier plan du pays.

Au moment où les chaînes d’approvisionnement mondiales sont en pleine restructuration à cause des perturbations causées par la pandémie de COVID-19, les dirigeants de ces trois ports créent un groupe de travail pour cibler les initiatives sur lesquelles ils pourraient unir leurs forces pour maximiser les retombées sur le plan économique et environnemental de cette voie maritime.

Entre autres choses, le groupe de travail évaluera s’il est possible d’améliorer la compétitivité du corridor Saint-Laurent en renforçant la connexion entre les ports et les réseaux de transport par camion et train, en misant sur une stratégie commune de marketing ou en assurant une plus grande compatibilité des systèmes technologiques, par exemple.

Les PDG des trois ports ont confirmé cette initiative sans précédent dans une entrevue accordée à La Presse lundi.

Ces alliances stratégiques ne pourront toutefois voir le jour que si le ministère fédéral des Transports modifie la Loi maritime du Canada, qui encadre le fonctionnement des administrations portuaires du pays. Le ministre des Transports, Omar Alghabra, compte moderniser cette loi qui limite considérablement de tels partenariats. Le Ministère mène présentement des consultations à ce sujet.

Intérêt commun

Selon le PDG de l’Administration portuaire de Montréal, Martin Imbleau, il est dans l’intérêt des trois ports de conclure de telles alliances. Car la réorganisation des chaînes d’approvisionnement à l’échelle de la planète fait en sorte que les trois ports ne sont pas en concurrence l’un avec l’autre, mais que le corridor commercial du Saint-Laurent livre une concurrence féroce aux ports de l’est des États-Unis.

« Les chaînes d’approvisionnement mondiales sont en restructuration. Les lignes maritimes et les acteurs de l’import-export cherchent les meilleures routes, au meilleur coût, et veulent accélérer la décarbonation du transport maritime. Il y a des opportunités pour nos ports et pour notre économie. »

– Martin Imbleau

Ensemble, les trois ports manutentionnent annuellement 72,4 millions de tonnes de marchandises diverses, de conteneurs, de marchandises générales non conteneurisées ainsi que de vracs solides et liquides.

L'idée évoquée en 2016

En 2016, l’idée de créer des alliances entre les trois ports avait été évoquée, mais n’avait pas eu de suite. Mais cette question se pose aujourd’hui avec beaucoup plus d’acuité à cause de la pandémie.

« On s’est rendu compte depuis quelques années que les tendances que nous voyons sont similaires et que les défis que nous devons relever sont aussi similaires. On a aussi examiné ce qui se fait ailleurs dans le monde et on a constaté que notre défi sur le Saint-Laurent, c’est de passer d’une vision locale à une vision qui est plus globale », a renchéri le PDG de l’Administration portuaire de Trois-Rivières, Gaétan Boivin.

Le PDG de l’Administration portuaire de Québec, Mario Girard, a donné en exemple Haropa Port – un nouvel ensemble portuaire né de l’union du port du Havre, du port de Rouen et des ports de Paris, l’an dernier, après une décennie de partenariats.

Cette nouvelle entité a été constituée dans le but de reconquérir des parts de marché du transport maritime perdues au fil des ans. Les alliances ont porté leurs fruits. Haropa Port a non seulement stoppé la saignée, mais également réussi à reprendre des parts de marché. Le nombre de conteneurs qui transitent par Haropa Port est passé de 2 millions en 2012 à environ 3 millions aujourd’hui.

« C’est un exemple d’une stratégie de corridor. Ils ont commencé par faire la promotion du corridor ensemble. Ils ont travaillé sur la fluidité de la chaîne ensemble. Il y a des opérations qui sont restées locales », a expliqué M. Girard, précisant qu’il y a d’autres exemples du genre dans le monde.

Gaétan Boivin tient toutefois à être clair. Il n’est pas question de fusion, mais d’alliances stratégiques où chaque port pourrait développer des créneaux spécifiques. « Aujourd’hui, il faut être des généralistes. Mais pour être des généralistes, les installations coûtent très cher. […] Présentement, la Loi maritime nous autorise à être des concurrents ou à fusionner. Mais on ne veut pas fusionner. On veut conclure des partenariats pour le bien du Saint-Laurent », a-t-il expliqué.

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