Planète bleue, idées vertes

Déglacer les routes grâce à l’intelligence artificielle

Chaque hiver, des tonnes et des tonnes de sel sont utilisées pour déglacer les routes au Canada, entraînant des dommages de plusieurs milliards de dollars aux infrastructures et à l’environnement. Trois jeunes femmes espèrent avoir trouvé une solution novatrice qui mise sur l’intelligence artificielle pour réduire considérablement les quantités de sel de déglaçage.

L’idée de départ de Patricia Gomez, Anne Carabin et Claudie Ratté-Fortin était de trouver une solution aux problèmes d’accumulation de sel dans les milieux aquatiques. Les trois jeunes femmes étaient alors à la recherche d’un nouveau défi qui mettrait à profit leurs compétences professionnelles.

« Nous étions en train de prendre un café à discuter d’un nouveau défi à relever, explique Anne Carabin en entrevue avec La Presse. C’est comme ça que tout a commencé en 2019. »

Patricia Gomez, une spécialiste de la gestion des eaux pluviales, est titulaire d’une maîtrise en sciences de l’eau obtenue à l’Institut national de recherche scientifique (INRS), où elle a fait la connaissance de ses futures associées en 2012. Anne Carabin a fait des études en microbiologie et termine actuellement un doctorat en génie civil, avec une spécialité en santé publique et environnement, à l’Université de Victoria. Claudie Ratté-Fortin, une mathématicienne, a un doctorat en sciences de l’eau obtenu à l’INRS.

Limiter les pertes... et les conséquences

Clean Nature, l’entreprise qu’elles ont fondée en 2020, est en quelque sorte le résultat des compétences et des connaissances des trois femmes. Leur produit ? Un outil basé sur l’intelligence artificielle, qui permet de déterminer avec précision la quantité de sel à utiliser sur les routes, limitant du même coup les dommages aux infrastructures et les effets environnementaux.

Les coûts indirects liés à l’utilisation de sel d’épandage totaliseraient chaque année 12,7 milliards de dollars au Canada, selon leurs recherches. Plus de la moitié (56 %) sont le résultat des dommages causés aux infrastructures et le quart (24 %) sont liés à des travaux de maintenance supplémentaire des routes endommagées par le sel.

La plateforme web de Clean Nature, qui est toujours à l’essai, permettrait de réduire jusqu’à 50 % les coûts d’utilisation de sel d’épandage, signale Claudie Ratté-Fortin. Déjà, des entrepreneurs et des municipalités ont manifesté leur intérêt pour leur projet.

« C’est un outil d’aide à la décision, explique Mme Ratté-Fortin, qui se spécialise en modélisation statistique en environnement. Il va déterminer, selon les conditions en place, le type de produit à utiliser, le mélange optimal de sel et d’abrasif. »

En gros, cet outil intelligent rassemble un grand nombre de données, dont les conditions météo et l’état des routes, pour produire des cartes interactives indiquant en temps réel la quantité de déglaçant à utiliser pour chaque route. Grâce à l’intelligence artificielle et à sa capacité d’apprentissage, la plateforme s’améliore au fur et à mesure qu’on lui fournit des données.

Deux prix pour souligner une bonne idée

Dès le départ, en 2019, le projet convainc. Les trois femmes remportent le deuxième prix du Défi AquaHacking, un concours technologique organisé chaque année pour trouver des solutions liées à la santé des cours d’eau. À la clé, une bourse de 15 000 $ et, surtout, un stage de six mois dans un incubateur pour jeunes pousses (start-up) à Toronto.

Un an plus tard, elles gagnent le prix Défi techno Génération H2O, organisé par le Fonds mondial pour la nature (WWF Canada), assorti d’une bourse de 18 000 $ et d’un autre stage à Toronto.

L’entreprise a déjà fait des tests qui se sont avérés prometteurs. « Avec les données qu’on avait, déjà c’était super intéressant », dit Anne Carabin. Elles continuent également de raffiner leur modèle avec des données fournies par des municipalités.

La prochaine étape se traduira par un projet pilote qui sera déployé au début de l’hiver 2022. « Notre objectif, c’est d’acquérir le plus de données possible », ajoute Mme Carabin. C’est pour nourrir la bête, l’outil d’intelligence artificielle qui aura ainsi encore plus d’informations à traiter et pourra offrir, du même coup, des diagnostics encore plus précis.

Si tout se passe comme prévu, les trois associées prévoient commercialiser leur produit au début de l’hiver 2023 au Québec. Des discussions avec des entrepreneurs en Ontario annoncent aussi un éventuel déploiement au Canada anglais.

Pas mal finalement pour un projet lancé autour d’une tasse de café.

Quelques chiffres

1,4 million

Tonnes de sel utilisé pour déglacer les routes annuellement au Québec

5 millions

Tonnes de sel utilisé chaque année au Canada

Source : Statistique Canada

Environnement

Sur le radar

Climat

Le Canada utilise des données désuètes

Pour diminuer les conséquences du nombre grandissant de phénomènes météorologiques violents auxquels les Canadiens sont exposés, il importe d’avoir des données scientifiques fiables, mais les gouvernements canadiens se fient souvent à des données désuètes, selon un rapport commandé par Sécurité publique Canada au Conseil des académies canadiennes (CAC).

Le rapport indique que les dirigeants prennent souvent des décisions basées sur des données météorologiques incomplètes et des cartes d’inondation obsolètes. Même la Base de données canadienne sur les catastrophes, qui est censée suivre tous les types de catastrophes où plus de 10 personnes sont tuées ou au moins 100 personnes sont touchées, n’a pas été mise à jour depuis près de trois ans.

Dans un contexte où le passé n’est plus nécessairement garant de l’avenir, il est de plus en plus important d’avoir accès à des données scientifiques fiables, fait valoir le directeur général d’Ouranos, Alain Bourque, qui fait partie du Comité d’experts sur la résilience aux catastrophes face aux changements climatiques du CAC.

— Stéphane Blais, La Presse Canadienne

Étude

Du glyphosate dans les urines de volontaires-plaignants

Des traces de glyphosate ont été retrouvées dans les urines de la quasi-totalité d’un échantillon de plus de 6500 volontaires, selon une étude réalisée à l’occasion d’une campagne de plaintes en justice en France contre cet herbicide très controversé.

L’étude, parue mercredi dans Environmental Science and Pollution Research a été réalisée sur 6848 personnes, habitant dans 83 départements de la France métropolitaine et à La Réunion. Ces volontaires ont été recrutés par l’entremise de l’association Campagne Glyphosate, qui milite contre ce désherbant classé « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer, mais autorisé en Europe. Les prélèvements ont été réalisés entre juin 2018 et janvier 2020. Résultat, du glyphosate a été détecté dans 99,8 % des 6795 échantillons exploitables, à « un niveau moyen de 1,19 ųg/L ».

En 2019, l’Agence française nationale de sécurité sanitaire soulignait que des quantités de glyphosate de l’ordre de 1 ųg/L dans les urines correspondent à une exposition inférieure à 1 % de la dose journalière admissible.

— Agence France-Presse

Angleterre

Une carrière transformée en sanctuaire pour oiseaux menacés

C’est un refuge salutaire pour de nombreux oiseaux en danger : près de Cambridge, dans l’est de l’Angleterre, une carrière s’est muée au fil des ans en une immense réserve. Cette vaste zone humide d’étangs et de roseaux, qui deviendra à terme la plus vaste du Royaume-Uni, voire d’Europe, a tout pour plaire au butor.

Classé jusqu’en 2015 sur la liste rouge britannique des espèces les plus menacées, cet oiseau des marais au plumage tacheté figure maintenant sur la liste orange, qui regroupe des espèces fragiles, mais moins menacées.

« C’est vraiment la démonstration qu’en travaillant avec des partenaires, en prenant des actions décisives à grande échelle, on peut faire en sorte que des espèces quittent la liste rouge », explique Chris Hudson, responsable de la réserve Ouse Fen, à Earith, à environ 120 kilomètres au nord de Londres, gérée par la Société royale pour la protection des oiseaux.

— Sylvain Peuchmaurd, Agence France-Presse

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