Si jamais vous nous écoutez

Une bouteille dans le ciel…

Si jamais vous nous écoutez

Cette création signée par Laurence Dauphinais et Maxime Carbonneau nous plonge avec délice dans les coulisses de la réalisation du Golden Record. Le précieux disque envoyé dans l’espace à bord de la sonde Voyager en 1977 contenait une foule d’informations de la vie sur Terre destinée à d’autres formes de vie intelligente.

Au Théâtre Denise-Pelletier jusqu’au 25 novembre.

7,5/10

À l’heure où on craint les pires catastrophes, guerres et cataclysmes, sur notre petite planète bleue, il n’est pas farfelu de se demander quelle trace l’humain va laisser sur cette Terre – qu’il est en train de détruire progressivement (et sciemment). Pas étonnant, dans ce contexte, qu’on se tourne vers les cieux.

C’est à partir de ce constat que Laurence Dauphinais et Maxime Carbonneau ont conçu cette pièce-documentaire, qui fait le récit du processus de création du Golden Record, mené par l’astrophysicien Carl Sagan avec la NASA. Déjà, dans les années 1970, le scientifique américain s’intéressait à la vie extraterrestre (aujourd’hui une hypothèse plausible) et aux moyens de communiquer avec « eux ».

S’il fallait que ce disque se retrouve entre les mains d’une civilisation extraterrestre (ailleurs dans le cosmos), quel message voudrait-on lui envoyer ? Comment décrire ou représenter notre vie sur Terre ? Comment témoigner de nos connaissances ? Ce « polaroïd » de notre vie terrestre sera-t-il encore valable dans cinq milliards d’années ?

Voilà quelques questions que Carl Sagan s’est posées en concevant le Golden Record, avec une équipe réunissant scientifiques et artistes : l’astronome Frank Drake, le journaliste scientifique Timothy Ferris, sa fiancée Anne Druyan, l’artiste visuel Jon Lomberg et sa femme Linda Salzman Sagan, également artiste.

Laurence Dauphinais et Maxime Carbonneau recréent pour nous ce processus épique ayant abouti à la sélection de quelque 300 pièces musicales, des extraits sonores (bruits d’un train ou d’un avion, de la pluie, mais aussi d’un battement de cœur ou d’un baiser). Une sélection d’images, un message de salutations enregistré en 55 langues, un mot du président américain de l’époque, Jimmy Carter, ainsi que du secrétaire général de l’ONU de ces années-là, Kurt Waldheim.

Si jamais vous nous écoutez nous entraîne ainsi dans cette folle équipée, compliquée par une intrigue amoureuse à l’intérieur de la cellule créative.

Robin-Joël Cool incarne avec aplomb le personnage de Carl Sagan. Il est entouré de belle façon par Évelyne Rompré (Linda Salzman Sagan), Olivier Morin (Frank Drake), Simon Landry-Désy (Timothy Ferris) et Phara Thibault (Anne Druyan). Ensemble, les cinq acteurs nous font vivre les émotions vives qu’a dû ressentir ce groupe d’artistes et de scientifiques durant la conception du fameux disque.

Un des segments les plus intéressants est la sélection des pièces musicales (90 minutes de musique) – la majorité étant instrumentale, un parti pris justifié par le fait que les êtres vivants extraterrestres ne parlent pas nos langues.

Le duo de créateurs a ainsi pu romancer certains éléments de ce récit historique, comme les raisons pour lesquelles Carl Sagan a finalement accepté d’inclure la pièce Johnny B. Goode, de Chuck Berry, unique pièce rock’n’roll enregistrée dans le Golden Record. Ce sont ces petites pépites qui donnent une couleur intéressante à la pièce dont l’histoire (connue) est parfaitement résumée sur Wikipédia.

Pour ce qui est du contenu véritable du Golden Record, une chouette application – que l’on peut télécharger en tout temps (en tapant Si jamais vous nous écoutez) – a été conçue par La Messe Basse et nous donne accès à tout ce qui s’y trouve.

Si jamais vous nous écoutez se termine par une image forte du satellite, qui prend une dernière photo de la Terre avant de quitter notre système solaire. Une photo qui nous fait prendre conscience de la fragilité de notre planète. Et du fait que nous sommes peut-être dus pour envoyer un autre message dans le cosmos. Celui-là pourrait prendre la forme d’un SOS. En espérant qu’il se rende à destination.

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