Que faisait-il en liberté ?

Je suis habité d’une infinie colère contre notre système de justice pénale, dans lequel j’œuvre depuis près de 40 ans. Quatre personnes sont mortes la semaine dernière dans des évènements qui auraient pu être évités.

Selon les informations obtenues par les journalistes, le suspect des trois homicides survenus la semaine dernière avait déjà été accusé de crimes très graves comme agression sexuelle, agression armée, harcèlement criminel, et ainsi eu de nombreux autres contacts avec la police et les autorités sanitaires. L’individu souffrait aussi de graves problèmes de santé mentale et était considéré comme une personne à risque de violence.

Or, on peut se demander ce qu’il faisait en liberté. Les proches des victimes (mes pensées vont à elles), un jour, devraient demander des explications claires et transparentes sur les actions et décisions prises par les instances judiciaires concernant le présumé tueur, abattu par la police. Et s’il s’avère que le système a failli, je les encourage à entreprendre d’importantes poursuites contre ces mêmes instances.

Si les acteurs du système judiciaire et de santé ne veulent pas faire leur travail de protection du public, il faut les forcer à le faire.

L’idéologie qui prévaut dans beaucoup de milieux professionnels et parmi les politiciens est celle de la décarcération, la déjudiciarisation, l’intervention minimale et la tolérance. Les militants de la justice sociale proposent de limiter les peines pour des gens issus des minorités. Or, malgré tous les bons sentiments que l’on peut avoir pour des gens qui ont des problèmes d’intégration sociale et qui ont été violents, lorsqu’on laisse en liberté un individu dangereux qui a commis des gestes graves, c’est de faire porter le risque à d’éventuelles victimes. Ceci est particulièrement vrai dans des communautés culturelles où, par peur de contribuer à de la discrimination, on laisse courir des gens violents dans les rues.

Pour moi, l’impunité et la tolérance du système de justice au Canada (enchâssés par l’arrêt Gladue) dans les communautés autochtones, en plus d’être éminemment racistes, n’ont fait qu’exacerber les problèmes de violence, notamment subie par les femmes et les enfants. Je ne crois pas que les Canadiens qui sont issus de l’immigration seraient d’accord avec l’idée que les gens de leur groupe coupables de crimes violents reçoivent des sanctions moindres que les gens des autres groupes. En tout cas, il faudrait leur demander.

Pratiquement chaque semaine, on assiste à des évènements violents dans lesquels des coups de feu sont déchargés, des personnes sont blessées. Un rapport vient de nous apprendre que l’indice de gravité des crimes violents était en hausse de 12 % au Québec, et le Québec connaît une hausse de 10 % des voies de fait graves et armées ainsi qu’une hausse de 29 % des agressions sexuelles. Montréal connaît des hausses dans des catégories de crimes comme l’homicide, les vols de véhicules, les fraudes.

Il semble donc que la longue tendance à la baisse de la violence qui dure depuis 30 ans se soit terminée. Probablement que les causes d’une hausse de la violence sont multiples et que personne ne pourra exactement les cibler. Et tous s’entendent pour dire qu’il faut investir dans des programmes sociaux qui visent à enrayer la pauvreté, qu’il faut réduire les inégalités, qu’il faut avoir des programmes pour aider les personnes qui vivent des difficultés. La carotte, bien sûr.

Or, ce qui manque dans le discours des politiciens et dans les lois et programmes mis en place, c’est le bâton.

Restreindre l’accessibilité aux armes à feu est bien, mais il faut aussi sévir contre ceux qui s’en servent pour commettre des crimes. Comment expliquer que le gouvernement fédéral vient tout juste d’abolir la loi qui prévoyait des peines minimales pour l’usage d’arme à feu durant la commission d’un crime ? Depuis quelques années, on assiste à une baisse importante des populations carcérales. À titre d’exemple, s’il y avait en moyenne 2770 personnes condamnées dans les prisons du Québec en 2017-2018, il n’y en avait plus que 1613 en 2020-2021, soit une baisse de 42 %. La pandémie n’explique pas tout, puisque cette progressive décarcération est une tendance lourde de notre système de justice. Or, il est temps que notre société tienne un débat sur la justice et qu’une large part de la population qui demande que l’on protège le public contre les individus dangereux qui ont commis des crimes graves soit écoutée.

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