Les farines démystifiées

Tout usage, blé entier, blé dur, type 00, à gâteaux et pâtisseries : il existe une panoplie de farines sur les tablettes des épiceries. En prévision d’un grand dossier sur les desserts de Noël qui sera publié samedi, La Presse s’est entretenue avec Kareen Grondin, pâtissière et directrice cuisine chez Ricardo, pour démystifier les différents types de farine.

Tout usage

Est-ce un sacrilège d’utiliser la farine tout usage pour tout ? Pas du tout, estime Kareen Grondin, qui souligne que depuis au moins huit ans, sauf en cas d’exceptions, l’équipe de Ricardo n’utilise que de la farine tout usage dans ses recettes. Cela évite d’accumuler trois, quatre sacs de farine dans le garde-manger et de finir par les perdre (« des farines, ça vieillit, ça rancit »). « Au Canada, la farine tout usage est fine, mais aussi relativement forte, expliqueKareen Grondin. On peut l’utiliser pour tout, du gâteau aux anges à la pâte à pizza. » La quantité de protéines (gluten) varie d’une marque à l’autre ; le résultat en bouche aussi. Kareen Grondin conseille de s’en ternir à la marque qui nous plaît pour éviter d’être déçu.

De blé entier

La farine de blé entier, plus riche en protéines et contenant des flocons de son, fait de très bons pains. Mais peut-elle remplacer la farine tout usage partout ? « J’aimerais dire oui, mais ce n’est pas si simple que ça », répond Kareen Grondin. Les recettes à base de farine de blé entier sont bâties différemment des autres, souligne-t-elle ; les proportions sont différentes (quantité de farine, d’œuf monté, etc.). En substituant l’une pour l’autre, le résultat risque d’être plus dur, plus granuleux. « Mais de changer un tiers de la farine de la recette par de la farine de blé entier, ça va d’habitude relativement bien », dit-elle. On peut notamment le faire pour la pâte à tarte ou pour des gâteaux à saveurs fortes, comme le gâteau aux carottes.

À gâteaux et pâtisseries

Légère, souvent blanchie à l’aide d’additif, la farine à gâteaux et pâtisseries est faible en gluten. Cela permet d’obtenir une pâte moins élastique – ce qu’on recherche habituellement quand on fait un gâteau. Devrait-on opter pour cette farine lorsqu’on revêt son chapeau de pâtissier ? Kareen Grondin y voit peu d’avantages, si ce n’est que la farine à gâteaux sera moins fragile à l’abus de brassage. « En pâtisserie, je dirais sincèrement que la farine tout usage fait un très bon travail, dit-elle. Tout est dans l’utilisation : il ne faut simplement pas trop mélanger sa pâte. » Kareen Grondin aime utiliser la farine à gâteaux et pâtisseries… pour la friture : « elle développe zéro gluten pendant la friture ; la pâte reste donc très, très croustillante ».

De blé dur

Le blé dur (riche en gluten) et le blé tendre (pauvre en gluten) sont deux variétés différentes de blé. La farine tout usage est composée d’un mélange des deux, tandis que la farine à gâteaux et pâtisseries contient surtout du blé tendre. Le blé dur, pour sa part, est notamment utilisé pour faire de la semoule. « La meilleure farine pour les pâtes alimentaires, c’est de la farine de blé dur, résume Kareen Grondin, qui apprécie particulièrement la semoule de Durum. Ça fait des pâtes qui restent al dente. Les meilleures pâtes alimentaires du commerce – et les plus chères – sont faites avec du blé dur. »

De type 00

La farine italienne de type 00 est faite de blé tendre ; elle contient peu de protéines (gluten) et très peu de cendres minérales. Pour fabriquer leur pâte à pizza, des cuisiniers ne jurent que par elle. « Il y a quelque chose dans la grosseur du grain de cette farine qui est très intéressant pour la pizza en particulier, note Kareen Grondin. Il y a un côté rustique. On veut quelque chose qui s’étire, mais qui n’est pas trop fin en bouche. »

De seigle, d’épeautre, de sarrasin…

Le blé n’a pas le monopole de la farine : d’autres céréales font d’excellentes farines, comme l’épeautre, le seigle, le sarrasin et le kamut. « Une miche de pain blanc, c’est bon, mais c’est vraimentun plaisir d’ajouter ces farines-là à son pain maison », souligne Kareen Grondin. Si votre recette de pain demande trois tasses de farine de blé, pourquoi ne pas en substituer une pour l’une ou l’autre de ces farines ? « Il y a des saveurs différentes qui sont hyper intéressantes », dit-elle.

Sans gluten

Il existe de nombreuses variétés de farine sans gluten : riz, maïs, quinoa, pois chiches, fécule de pomme de terre… On trouve aussi sur le marché des farines sans gluten dites « tout usage », composées généralement d’un mélange de farines. Il est possible d’obtenir de très bons desserts à base de farine sans gluten (Ricardo Cuisine propose une recette de gâteau à la vanille sans gluten), mais la substitution demeure parfois hasardeuse. « On a de la difficulté quand même à avoir un résultat similaire », dit Kareen Grondin, qui constate que les gâteaux sans gluten ont souvent une texture moins moelleuse, plus farineuse. Elle conseille aux gens qui souffrent de la maladie cœliaque de s’habituer à une farine et d’apprendre à la travailler.

Des erreurs

Vous ratez systématiquement vos gâteaux ? Peut-être mesurez-vous votre farine de façon inadéquate. Quand on mesure de la farine, on utilise une tasse pour les ingrédients secs (en métal ou en plastique). « On prend une cuillère, on secoue légèrement la farine dans le plat, puis on la met à la cuillère dans notre tasse, indique Kareen Grondin. Enfin, on racle le dessus pour enlever le surplus. » Plus simple encore : on la pèse ! Pour les recettes de Ricardo, une tasse de farine correspond à 150 g. Autre erreur fréquente : garder ses farines trop longtemps, ce qui affecte le goût. « Et il vaut mieux conserver la farine dans un plat scellé plutôt que la laisser dans le sac : la farine attire la vermine », rappelle Mme Grondin.

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