Sénateurs d’Ottawa

Une petite visite à Québec ?

Québec — C’est encore préliminaire. Mais des discussions sont amorcées et impliquent le gouvernement Legault, la Ligue nationale de hockey, Québecor et les Sénateurs d’Ottawa afin que cette équipe présente cinq matchs au Centre Vidéotron de Québec la saison prochaine.

En marge de ces pourparlers, à Québec, on a le sentiment de marcher sur des œufs ; une annonce prématurée risque de soulever des questions de la part des fans des Sénateurs et de leurs commanditaires, prévient-on. Surtout dans le contexte de la mort du propriétaire du club, Eugene Melnyk, survenue lundi.

Mais selon les sources de La Presse, c’est Gary Bettman qui a lui-même mis de l’avant un tel scénario lors de sa rencontre virtuelle avec le ministre québécois des Finances, Eric Girard, à la mi-janvier. Et il paraissait convaincu que ce serait chose faite sans trop d’obstacles, confie-t-on.

Lors de la rencontre, le grand argentier du gouvernement Legault a demandé à M. Bettman ce que l’on pourrait faire pour démontrer que la Ville de Québec est un marché pour la LNH. Le commissaire de la Ligue a alors soulevé l’idée de présenter quelques matchs de la saison d’une équipe.

Par la suite, la LNH a présenté un scénario à Québec pour vérifier son intérêt à accueillir cinq matchs des Sénateurs. Le montage financier est « en préparation », mais pas terminé, précise-t-on.

Les Sénateurs exigeraient, c’est évident, des honoraires pour céder ces cinq parties sur la quarantaine présentées à domicile en saison. Le chiffre ne serait pas encore arrêté, semble-t-il. Le gouvernement Legault pourrait être invité à contribuer, mais on voit pour lui plutôt une autre avenue.

Ceux qui pilotent le dossier sont convaincus que les commanditaires ne manqueront pas à Québec pour financer ces matchs. Au surplus, il paraît évident que les parties se joueraient à guichets fermés.

Le gouvernement du Québec pourrait, explique-t-on, jouer un rôle d’appui, pour garantir des pertes potentielles de l’opération, bien peu probables compte tenu de l’engouement prévisible.

Il y aurait un coût, « mais ce n’est pas ça, l’enjeu, c’est plutôt le signal que donnerait l’équipe en disputant des matchs à l’extérieur, c’est très sensible pour les Sénateurs », explique-t-on.

Eric Girard a sondé l’intérêt de gros commanditaires et la réponse a été positive. Les négociations se déroulaient tout récemment, surtout entre les Sénateurs et Québecor, le gestionnaire du Centre Vidéotron – une infrastructure appartenant à la Ville de Québec.

Invité à commenter la nouvelle, un porte-parole des Sénateurs a répondu qu’il nous reviendrait « s’il avait de nouvelles informations ».

Une occasion rêvée

Précision importante : ces négociations ne visent pas une éventuelle garde partagée des Sénateurs entre Ottawa et Québec, ou encore un déménagement du club dans la capitale québécoise. Il n’a toujours été question que de la présentation de cinq matchs.

Mais si une équipe de la Ligue nationale devenait disponible, ces matchs à Québec seraient « l’occasion rêvée de démontrer que Québec est un marché sérieux pour toute concession qui serait en difficulté », explique-t-on.

Une telle avancée serait une excellente nouvelle pour le gouvernement Legault, puisque les démarches du ministre Girard auprès de Gary Bettman avaient été tournées en ridicule par bien des chroniqueurs en janvier.

Il y a exactement 10 ans, le 25 mars 2012, Québecor et la Ville de Québec en arrivaient à une entente sur la gestion du centre sportif qui a coûté 400 millions en fonds publics et qui reste sous-utilisé. Les travaux pour la construction de l’aréna de 18 000 places ont débuté en septembre 2012, et l’édifice a été livré en juin 2015.

Le ministre Girard avait eu le mandat d’étudier la possibilité d’un retour d’une équipe de la LNH à Québec. Publiquement, la rencontre de janvier s’était conclue sur une fin de non-recevoir de la ligue, qui ne voyait « aucune opportunité » pour répondre aux attentes du ministre Girard.

Mort lundi soir des suites d’une longue maladie, à 62 ans, le propriétaire des Sénateurs, Eugene Melnyk, était encore aux affaires début mars. Au gouvernement, on a expliqué mardi que cette disparition était susceptible d’imposer un temps d’arrêt aux discussions encore préliminaires. Melnyk laisse dans le deuil deux filles qui n’ont aucun intérêt pour l’industrie du hockey, indique-t-on par ailleurs.

« La franchise continuera de suivre son chemin, comme d’habitude, a réagi Bettman mardi en conférence de presse. Des gestionnaires professionnels sont en poste. J’ai discuté avec son exécuteur testamentaire. Vous voulez savoir de quoi l’avenir sera fait ? Je préférerais qu’on se concentre sur Eugene. Ses filles, Olivia et Anna, vous donneront toutes les réponses éventuellement. »

C’est connu que l’équipe d’Ottawa éprouve de sérieux problèmes, forcée de jouer dans un amphithéâtre loin du centre-ville d’Ottawa. Le plus récent projet d’aréna au cœur de la ville, un plan de développement appelé RendezVous LeBreton, s’est terminé en queue de poisson après un conflit entre Melnyk et son associé John Ruddy.

La franchise ontarienne obtient depuis plusieurs saisons parmi les plus faibles assistances de la ligue. Les matchs à huis clos ont faussé les plus récentes données, mais les foules, déjà faibles avant la pandémie, n’ont pas repris beaucoup de vigueur avec le déconfinement.

Les Sénateurs font partie des équipes moins fortunées qui reçoivent un coup de pouce financier de la LNH dans le cadre de son programme de partage des revenus. Déjà, au début des années 2010, Melnyk avait d’ailleurs déclaré publiquement qu’il n’avait pas l’intention de suivre les propriétaires des plus grands clubs de la ligue, qui dépensaient sans compter.

Inversement, à Québec, l’amphithéâtre qui devait présider au retour des Nordiques reste peu utilisé. Côté sport, il ne présente que les matchs des Remparts de Québec, de la Ligue de hockey junior majeur du Québec.

— Avec la collaboration de Tommy Chouinard, La Presse

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