Objectif : 200 000 logements de plus d’ici 2050

Montréal veut accélérer la densification de son territoire afin de livrer 200 000 logements de plus d’ici 2050. Mais pour éviter de rendre la congestion routière encore plus importante, la Ville espère allier ce développement immobilier à celui du transport collectif.

« On veut libérer le potentiel de développement de Montréal. Et ça va passer par des objectifs de densification intelligente », lance la mairesse Valérie Plante, en entrevue dans les bureaux de La Presse.

Dans son Plan d’urbanisme et de mobilité (PUM) 2050, qui sera dévoilé ce mardi, son administration fera place à une nouvelle mesure de la densification, basée sur le logement à l’hectare, avec des barèmes pour une zone de densification faible, modérée ou élevée.

Un secteur classé de première catégorie pourra développer entre 15 et 60 unités par hectare, tandis qu’un quartier considéré comme « modéré » pourra faire entre 60 et 200 logements par hectare. Dans les niveaux les plus élevés de densification, enfin, on pourra surpasser plus de 200 logements par hectare.

Au centre-ville, par exemple, la zone de densification sera « élevée », mais dans des secteurs plus excentrés ou patrimoniaux, ce pourrait être faible ou modéré. « Des maisons unifamiliales où on permettrait, par exemple, l’ajout d’un étage, une cour arrière, des agrandissements, dans des secteurs comme Pointe-aux-Trembles ou Saint-Laurent, ça serait faible », évoque le responsable de l’urbanisme, Robert Beaudry, qui accompagnait la mairesse lors de la rencontre éditoriale avec La Presse.

L’objectif : développer 200 000 logements de plus, dont 20 % seraient « hors marché ». Autrement dit, ils seraient le plus souvent développés par des coopératives ou des organismes et ne suivraient pas les fluctuations du marché.

À plus court terme, la Ville vise à atteindre un seuil global de 12 % de logements « hors marché » d’ici 10 ans. En ce moment, ce taux est à seulement 7 %.

En mars, la Communauté métropolitaine de Montréal avait déjà proposé d’exiger une densité de 450 logements par hectare au centre-ville, alors que le seuil était de 150 logements par hectare jusqu’ici. Ailleurs dans le Grand Montréal, pour les quartiers de banlieue dotés d’une gare du Réseau express métropolitain, on suggérait alors que le seuil passe de 80 à 200 unités par hectare.

« La majorité des grandes villes qui ont revu leur plan d’urbanisme ont aussi intégré cette approche. Au lieu d’aller prescrire des hauteurs et des densités, ça permet une approche en fonction de chaque réalité. On vient changer le paradigme. »

— Robert Beaudry, responsable de l’urbanisme à la Ville de Montréal

Quant aux hauteurs autorisées, cela « dépendra de chaque secteur, de chaque typologie », précise l’élu.

« Une forte densité, ça peut être sept étages, mais de façon très implantée, ou 30 étages, mais très effilé. L’idée, pour nous, c’est d’avoir l’emprise au sol pour, entre autres, dégager des espaces verts », persiste M. Beaudry, qui rappelle que ces orientations « se traduiront ensuite dans les arrondissements par des règlements plus précis ».

Un « cadeau » pour Guilbault

Le long des réseaux de transport collectif, comme le futur prolongement de la ligne bleue, « la densification sera forcément élevée », ajoute la mairesse Valérie Plante.

« On change la formule, parce qu’on ne veut plus refaire l’erreur du passé, c’est-à-dire de construire un quartier complet pour après se rendre compte que, oups, il aurait fallu faire du transport collectif. Les deux vont ensemble, et c’est ça qu’on veut », note-t-elle.

D’ailleurs, elle soutient que son PUM est « un cadeau » à la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, qui prépare l’arrivée de son agence des transports.

« On a fait toutes les analyses, colligé toutes les données. C’est une vision qui permettra aux gouvernements supérieurs d’aller mettre du transport collectif directement là où c’est nécessaire. […] Et on leur donne sur un plateau d’argent. »

— Valérie Plante, mairesse de Montréal

Elle dit ainsi avoir voulu être « stratégique », dans un contexte où « la Ville a une limite dans le financement du transport collectif » et où le gouvernement ne semble pas vouloir financer davantage les transporteurs. « Si un gouvernement décidait que, pour lui, ce n’est pas une priorité ou qu’il n’a pas de vision à long terme, au moins il devra répondre à une planification bien documentée », lance encore la mairesse.

Pour le reste, elle promet que le piéton sera « au centre de la démarche » du Plan d’urbanisme, qui devra, avant son adoption, passer par l’Office de consultation publique de Montréal. « Quand on parle de ville à échelle humaine, c’est ça. Bien sûr, on veut de la hauteur, mais il faut réfléchir pour que ce soit fait de façon cohérente et que le citoyen ne se sente pas engouffré. »

La mairesse estime qu’il reste « encore beaucoup d’éducation à faire » au chapitre du partage de la route. « À Montréal, on a 10 000 km de rues, mais à peine 1 % avec des pistes cyclables, donc on est loin de la ville tout au vélo. Tout le monde a sa place, et on ne pense pas que les voitures vont disparaître […], mais on se doit de ne pas rajouter le même nombre de voitures qu’il y aura de citoyens en plus », conclut-elle.

Plante veut garder les jeunes familles à Montréal

L’administration Plante souhaite convaincre les jeunes familles de rester à Montréal en favorisant la construction de davantage de logements de trois chambres et plus. « Ce qui fait en sorte qu’elles quittent la métropole, c’est souvent le deuxième enfant », explique Robert Beaudry, responsable de l’urbanisme à la Ville de Montréal. Le Plan d’urbanisme et de mobilité 2050 prévoit une ville plus dense, mais qui serait tout de même attirante pour les familles, selon M. Beaudry. Notamment en construisant de grands logements « hors marché » afin de permettre aux « familles qui sont dans tous les niveaux de revenus de pouvoir rester à Montréal ». L’objectif est de mieux planifier en tenant compte de leurs besoins. « On ne peut plus penser un quartier sans les écoles », illustre-t-il. L’administration redoublera aussi d’efforts afin de verdir des « endroits très gris actuellement pour attirer les familles », poursuit-il. La mairesse Valérie Plante cite le futur quartier des Faubourgs, qui regroupe l’ancienne maison Radio-Canada et l’usine Molson, comme exemple de cette nouvelle vision de « quartier complet ». Cette démarche intègre « des terrains pour une école, des espaces verts et un accès à l’eau qui va devenir public », explique-t-elle.

— Thomas Dussault, La Presse

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