emploi

Les promesses électorales en matière d’emplois sont dépassées, selon l’Institut du Québec. Et ça, au moment où les employeurs veulent miser sur la conciliation travail-famille.

Promesses électorales sur l’emploi

L’Institut du Québec souhaite une approche plus moderne

Création de 1 million d’emplois au Canada ? La promesse électorale sonne la redite aux oreilles de l’Institut du Québec. En plus d’être un engagement déphasé par rapport aux vrais enjeux de main-d’œuvre, estime-t-il.

« On avait très hâte de voir de quoi auraient l’air les plateformes électorales en période de resserrement », explique Mia Homsy, PDG de l’Institut du Québec, en entrevue. « La première chose qu’on entend est la création d’emplois, alors qu’il y a au Canada 816 000 postes vacants en ce moment, dont plus de 200 000 au Québec, à travers différents secteurs et régions. »

L’Institut avait espoir que les partis aient mené un exercice de réinvention de l’emploi. « On veut qu’ils parlent plus de la transformation de l’emploi, précise Mia Homsy. Il faut que les entreprises puissent prendre un virage. Il faut parler de formation. Ce n’est pas reflété dans les messages des partis. On fait de la surenchère, et l’approche est traditionnelle. On ne bouscule pas. On y va avec une recette déjà testée. On parle des mêmes choses qu’il y a 20 ans. C’est désolant. »

L’Institut vient de pondre une analyse des enjeux électoraux dans laquelle on retrouve des pistes vers lesquelles tendre pour assurer une relance économique. Il enjoint aux partis de moderniser le discours économique, de faire une lecture « lucide de la réalité », lit-on dans un rapport dévoilé mercredi matin.

On souhaite ainsi que les partis proposent des solutions et des actions concrètes. « Ce document n’est pas une charge contre les partis, tient à préciser Mia Homsy. C’est un constat qu’il y a encore beaucoup de travail à faire. On ne veut pas attaquer, mais ouvrir leurs horizons pour les mener à des propositions plus novatrices. »

La transformation de la main-d’œuvre

Ainsi l’Institut conseille-t-il de miser notamment sur la transformation de la main-d’œuvre pour s’assurer qu’il y aura des travailleurs qualifiés pour pourvoir les postes. Il souhaite que les partis proposent des « mesures de soutien pour la requalification et le développement de compétences, principalement des compétences numériques, de littératie et de numératie », une bonification du crédit canadien pour la formation et une garantie de la viabilité financière de la caisse de l’assurance-emploi.

« Bien que les plateformes du Parti libéral du Canada et du Bloc québécois soient celles qui montrent la meilleure compréhension des enjeux de main-d’œuvre, elles ne présentent aucune modernisation de la vision économique et ne proposent rien de nouveau sur ces enjeux. »

— Extrait de l’analyse

« Rien n’indique que la formation tout au long de la vie, le développement des compétences des travailleurs et la gestion des pénuries de main-d’œuvre seront dorénavant intimement liés aux politiques de développement économique. C’est pourtant la seule façon de traverser une décennie de vieillissement de la population avec le moins de conséquences sur l’économie et les services publics », lit-on.

« On est beaucoup dans le soutien aux revenus passifs plutôt qu’actifs, juge Mia Homsy. Donc, dans un cas de perte d’emploi, personne ne dit qu’il faut mettre de l’argent sur la formation des travailleurs pour récompenser ceux qui font des efforts pour se requalifier, par exemple. C’est le nerf de la guerre. Les entreprises vont devoir être plus productives, donc il faudra investir dans les travailleurs. »

Que répondrait Mia Homsy aux chefs de parti qui diraient que la COVID-19 teinte le type de promesses électorales, en cette époque unique et difficile ? « La pandémie a juste exacerbé le problème de main-d’œuvre, répond-elle. Ça a enlevé des travailleurs potentiels. Il y a maintenant 25 % de chômeurs de longue durée, plutôt que 12 %. Ça devient inquiétant, car plus tu restes inactif longtemps, plus c’est difficile de revenir sur le marché du travail. Il faut donc se questionner sur la façon d’améliorer la condition des travailleurs, de les former et de les ramener. Il y a de bonnes choses dans les plateformes des partis, mais la vision fondamentale n’a pas changé. »

Sondage

La conciliation travail-famille l’emporte sur le salaire

En ces temps de pénurie, les employeurs qui veulent séduire de futurs employés et les garder doivent miser sur la conciliation travail-famille plutôt que sur le salaire. C’est ce que conclut un nouveau sondage d’ADP Canada publié mardi.

Le tiers des travailleurs canadiens (32 %) sondés ont dit accorder une importance plus grande à cette conciliation travail-famille pour rester dans leur milieu de travail ou pour explorer de nouvelles possibilités d’emploi.

Pendant la pandémie, 15 % des travailleurs ont volontairement changé d’emploi ou quitté le marché du travail. Interrogés sur les raisons qui ont motivé cette décision, 33 % des travailleurs ont cité des changements dans leur vie personnelle, 29 %, le besoin de limiter la charge de travail et le stress, tandis que 28 % voulaient avoir des horaires plus flexibles.

Lorsqu’on interroge les employés qui travaillent à domicile depuis mars 2020, les résultats sont encore plus probants. Bon nombre de Canadiens qui ont quitté en catastrophe le bureau avec leur ordinateur sous le bras, pensant revenir quelques semaines plus tard, ont fini par s’adapter et aimer ce nouveau mode de vie.

Par conséquent, neuf télétravailleurs sur dix espèrent continuer à faire du télétravail quelques jours, voire cinq jours par semaine, indique l’enquête. Ils sont d’ailleurs 39 % à affirmer que la conciliation travail-famille est plus importante pour eux maintenant qu’avant la pandémie, tandis qu’il s’agit du tiers des Canadiens en général qui ont changé leur perception d’avant la COVID-19. Seulement 20 % estiment que le salaire a gagné en importance depuis la COVID-19.

Les résultats selon l’âge

Lorsqu’on regarde les résultats par groupes d’âge, 42 % des Canadiens âgés de 35 à 54 ans mettent en priorité la conciliation travail-famille, comparativement à 37 % des répondants de 18 à 34 ans et 38 % de ceux âgés de 55 ans et plus.

« Ces données dressent une image claire de ce que les travailleurs canadiens recherchent et de ce que les employeurs devraient privilégier pour aller de l’avant, observe Heather Haslam, vice-présidente du marketing d’ADP Canada. Le travail et la vie personnelle ne sont pas des éléments indépendants qui se battent pour un équilibre 50/50. Pour attirer et retenir les employés, les entreprises doivent reconnaître que le travail et la vie personnelle sont intimement liés, l’un ayant une incidence sur l’autre. »

Des centaines de recherches sur ce sujet avaient conclu par le passé que bien qu’il faille être payé à sa juste valeur pour éviter le sentiment d’iniquité, la rémunération n’est pas l’enjeu principal de la satisfaction et du bonheur au travail.

L’enquête en ligne a été menée du 1er au 3 septembre 2021 par Maru/Blue auprès de 3032 adultes canadiens sélectionnés au hasard et faisant partie du panel de Maru Voice Canada. La marge d’erreur estimée est de +/- 2,2 %, 19 fois sur 20.

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